vendredi 30 avril 2010

jeudi 29 avril 2010

La jeune veuve

Ce soir en parcourant mon Journal manuscrit, à la date du 1er novembre 2007, je lis cette fable de La Fontaine :

LA JEUNE VEUVE.
.
La perte d'un époux ne va point sans soupirs,
On fait beaucoup de bruit ; et puis on se console :
Sur les ailes du Temps la tristesse s'envole,
Le Temps ramène les plaisirs.
Entre la veuve d'une année
Et la veuve d'une journée
La différence est grande ; on ne croirait jamais
Que ce fût la même personne :
L'une fait fuir les gens, et l'autre a mille attraits.
Aux soupirs vrais ou faux celle-là s'abandonne ;
C'est toujours même note et pareil entretien ;
On dit qu'on est inconsolable ;
On le dit, mais il n'en est rien,
Comme on verra par cette fable,
Ou plutôt par la vérité.
.
L'époux d'une jeune beauté
Partait pour l'autre monde. A ses côtés, sa femme
Lui criait : ' Attends-moi, je te suis ; et mon âme,
Aussi bien que la tienne, est prête à s'envoler. '
Le mari fait seul le voyage.
La belle avait un père, homme prudent et sage ;
Il laissa le torrent couler.
A la fin, pour la consoler :
' Ma fille, luit dit-il, c'est trop verser de larmes :
Qu'a besoin le défunt que vous noyiez vos charmes ?
Puisqu'il est des vivants, ne songez plus aux morts.
Je ne dis pas que tout à l'heure
Une condition meilleure
Change en des noces ces transports ;
Mais, après certain temps, souffrez qu'on vous propose
Un époux beau, bien fait, jeune, et tout autre chose
Que le défunt. - Ah ! dit-elle aussitôt,
Un cloître est l'époux qu'il me faut. '
Le père lui laissa digérer sa disgrâce.
Un mois de la sorte se passe ;
L'autre mois, on l'emploie à changer tous les jours
Quelque chose à l'habit, au linge, à la coiffure :
Le deuil enfin sert de parure,
En attendant d'autres atours ;
Toute la bande des amours
Revient au colombier ; les jeux, les ris, la danse,
Ont aussi leur tour à la fin :
On se plonge soir et matin
Dans la fontaine de Jouvence.
.
Le père ne craint plus ce défunt tant chéri ;
Mais comme il ne parlait de rien à notre belle :
' Où donc est le jeune mari
Que vous m'avez promis ? ' dit-elle.


Je fus une jeune veuve, il y a déjà... 24 ans! Je n'ai jamais supporté ce mot. Faire une croix dans une case pour dire sa situation familiale passe encore mais répondre à la question : êtes-vous mariée et devoir répondre de vive voix, non je suis veuve, je n'ai jamais pu, alors je répondais : non, je vis seule. Aussi quand je vois que mes très jeunes, folles et adorables petites amies parisiennes mettent dans leur profil de Face Book - pour plaisanter - qu'elles sont veuves, j'éclate de rire parce que ce mot-là - elles ont raison - on ne devrait le prononcer qu'avec humour. En vrai, il faut juste un peu de temps... le temps de passer de la survie à la vie.

A fleur de nerf

Pas la peine de prendre mon pouls au poignet en ce moment : les pulsations sont partout.
Dans mes dents, dans ma tête, dans ma poitrine, dans mon ventre...
Et de battre dans mon coeur.
Tout est à fleur de nerf, de vie.

mercredi 28 avril 2010

Quelques réflexions à bâtons rompus


En faisant une recherche sur Rodin, j'ai découvert ce livre de Philippe Sollers sur les Dessins érotiques de Rodin.

Qu'y a-t-il sur vos murs?
"Presque rien. Un dessin de Rodin, un petit nu ; un magnifique rouleau que j’ai trouvé dans un coin à Pékin - de la calligraphie. Elle représente mon idéal, le paysage avec l’écriture, le tableau en même temps que le poème. C’est magnifique de ne pas accepter la dislocation entre d’un côté ce qu’il y a à voir et de l’autre ce qu’il y a à dire. C’est la même chose."

Je redécouvrais également lors de cette recherche les dessins de Matisse et leur correspondance chez Rodin, que ce soit dans les sculptures ou les dessins, la comparaison ne laisse de surprendre. Les artistes ont souvent été inspirés par des maîtres; je retrouve aussi le dessin ci-dessous de François Matton, un contemporain, qui, par le mouvement, autorise également la comparaison, le rapprochement.
Rodin, Femme nue aux longs cheveux renversée en arrière, vers 1900


Matisse, Grand Acrobate, pinceau et encre de chine. 1952.




François Matton, fusain, dessin.

J'aime quand dans l'érotisme d'un tableau, d'une photo, la lecture vient s'insérer; cela donne une spiritualité sensuelle à laquelle je suis très sensible.

 Antoine Wiertz, La liseuse de romans, huile sur toile. 1853.




Willy Ronis, Estelle, Paris. 1999

mardi 27 avril 2010

Vous avez dit Art?


Elle s'est arrêtée devant la vitrine d'un magasin de décoration qui faisait face à celle que je regardais, surprise de découvrir dans ma ville une librairie spécialisée dans le manga - j'allais pouvoir parfaire mes connaissances après l'expo de l'autre jour -, et je l'entendis dire à son mari (?) : tiens, j'aime assez celui-là, il fait moderne sans faire trop moderne! Il n'a rien répondu.
Elle regardait un tableau en vitrine; en le voyant je me suis dit : ce tableau ne viendra pas déranger sa décoration c'est sûr; aucun intérêt. Il n'y avait pas de prix mais il ne valait pas un clou.
Faire moderne sans faire trop moderne. Même pas morte de rire. Effrayant!
Ce genre de croûtes tiens (merci Google) :
L'art moderne dans sa plus belle parure. Succombez au charme de fuzz, il habillera votre intérieur et lui apportera la touche d'élégance et d'originalité que vous ne trouverez nulle part ailleurs.
Seulement 4 tableaux disponibles
Dépêchez vous il n'y en aura pas pour tout le monde !
Seulement 59 €
Au lieu de 127 €
Dimensions :
Largeur de chaque volet : 60 centimètres
Hauteur : 60 centimètres
Epaisseur : 4 centimètres
Nombre de volet : 3
Description :
Le tableau est entièrement réalisé et peint à la main.
La peinture utilisée est une peinture à l'huile aux pigments éclatants.
Il est disposé sur un châssis de bois brut séché à vide.
Les bords sont recouverts par la toile peinte
(*)Attention! Il est possible qu’il y ait de très légères variances de couleurs due au caractère unique de chacune de nos œuvres.

"Caractère unique de nos oeuvres", non mais je rêve. Bon je sais, tout le monde ne peut pas s'offrir un original de Nicolas de Staël, de Zao Wou-ki ou de Jackson Pollock mais tout le monde peut s'offrir un beau poster de ces artistes, c'est tout de même mieux que çà non, et puis il y a aussi des oeuvres d'artistes moins connus qui sont abordables, si on s'intéresse un peu à l'art.
C'est rigolo, au moment où j'écris ces lignes, je reçois un mail de Artprice. Y a des caméras partout!

lundi 26 avril 2010

Allo maman bobo

Ce matin en écoutant une émission sur le courage, je me disais que j'en manquais aujourd'hui. Ne plus supporter d'avoir mal, est-ce manquer de courage?
Le premier jour on accepte la douleur même si elle est insupportable, parce que l'on se dit : demain çà ira mieux.
Le deuxième jour on la maudit, parce qu'elle n'a pas diminué d'un iota.
Le troisième jour on augmente la dose parce qu'on vous a prescrit les antalgiques pour 4 jours. C'est donc qu'au quatrième jour vous ne devriez déjà plus souffrir!
Le quatrième jour est là et ce n'est plus seulement à l'endroit meurtri que vous avez mal mais la douleur s'est étendue et a envahi de ses tentacules toute la région sensibilisée.
Et le cinquième jour? Demain? Pfuittt, plus rien?

Allo maman bobo...

"Le courage, le vaillant refus du désespoir, l'art sans victoire de maintenir le désir, de renaître à la vie séance tenante, malgré la peur, l'adversité, la lassitude."
Baltasar Gracian, Le Héros.

dimanche 25 avril 2010

Laurent Terzieff


Laurent Terzieff, Molière 2010 du comédien,
ici dans Philoctète
Je viens de regarder la présentation des Molières 2010. Il est aussi nommé pour ses rôles dans deux pièces : L'habilleur et Philoctète. Voilà, çà me suffit, j'ai vu et écouté ce comédien merveilleux, la voix toujours aussi douce et puissante dans un corps décharné mais terriblement vivant, et ce visage émacié à l'aura sans pareille. J'avais fait un rêve que je n'ai pas réalisé; lors de mon récent séjour à Paris ses spectacles faisaient relâches. J'espère de tout mon coeur pouvoir le voir lors de ma prochaine escapade.

Je me souviens de l'avoir vu il y a... 30 ans? Je ne sais plus où mais c'était dans une sorte de café théâtre, je crois me souvenir que c'était dans le 15è, nous étions assis sur des bancs, en arc de cercle... et il m'a fascinée. Cette fascination n'a jamais cessée. Admiration.
J'ai beaucoup apprécié ses lectures dans l'émission de Vincent Josse Esprit critique, que l'on peut réécouter ici,
et cet entretien dans l'Express en septembre 2009 par Laurence Liban, dont extrait :

"Vous admirez particulièrement les plasticiens...

Personne n'est plus mystérieux qu'un peintre. Eux-mêmes ne savent pas ce qu'ils font, comme s'ils étaient détenteurs d'un don qui les dépasse. Ils vivent dans un monde de couleurs, de formes, de précarité aussi. André Masson, que j'ai rencontré lorsqu'il faisait les décors de Tête d'or, de Claudel, était avenant, ouvert, mais très secret. Une porte était fermée."

Tête de clown

Ce matin j'ai une tête de clown! Même pas envie de rire, d'ailleurs je ne peux pas. Pourtant, faut que je me pince pour ne pas éclater (de rire) en lisant ce jour :

"Affligé d’un nez fort long, il tient en laisse un carlin au mufle écrasé dans l’espoir que les passants opéreront machinalement entre ces deux extrêmes une moyenne acceptable."

Eric Chevillard, L'autofictif.

samedi 24 avril 2010

Rage de dents, rage d'amour

Ben voilà, fallait que je m'y attende, j'ai une chique, faudrait maintenant "botoxer" l'autre côté pour équilibrer! Du coup, plus de rides, vive les oedèmes. Pfff!

Pourquoi lorsque j'ai du temps pour lire n'y arrivé-je pas? Il me faut de la lecture reposante, comme celle-ci :

LETTRE 50
[Printemps 1761], [f. 136]

Bonjour cher coeur. Vous voulez avoir des nouvelles de mon rhume? Je vous dirai donc que j'ai très bien dormi mais qu'il continue toujours de même. Je vous ai fait dire que nous nous verrions demain par méchanceté, espérant que vous croiriez que je ne dîne pas avec vous. Hélas oui! Je dîne de l'autre côté! [...] Adieu, cher coeur, je suis d'une humeur de chien mais qui ne m'empêche pourtant pas de vous aimer à la rage et de vous baiser de tout mon coeur.

LETTRE 51
[Printemps 1761], [f. 180]

Je suis déjà excédée de ma lecture, quoique belle, ainsi je m'en tiens à un quart d'heure par jour. Adieu, bonsoir, pour aujourd'hui vous n'aurez plus de billet. Je vous baise et rebaise. Mon éventail me tourne la tête, j'ai mal aux dents comme vous savez bien, la fièvre, l'inflammation, la gangrène, etc. Au reste je vous aime toujours à la rage.
LETTRE 62
[Août 1761], [f. 129]

Comme probablement nous ne pourrons pas nous voir de quelque temps, je vous conjure seulement de me mander en deux mots à quel sujet peut-être pourrais-je vous tranquilliser avant. Je suis d'ailleurs moi-même inquiète et je me pendrais si j'avais pu vous fâcher. J'en ai été de mauvaise humeur toute l'après-midi. Adieu, de grâce un mot, je vous baise et adore.

LETTRE 111
[Décembre 1762], [f. 273]

Voici des choses utiles et magnifiques que je viens d'acheter et que je prends la liberté de vous présenter : un miroir, une chaise percée et mon coeur, voilà ce qu'il vous faut. Ainsi j'espère qu'à votre toilette en chiant et à tous les instants vous penserez à moi. Adieu. Ma Soeur Jeanne va à peu près de même, plutôt mal. Je vous baise; j'espère que la brouillerie de cette nuit n'influera pas sur notre amitié, ce qui est sûr, c'est que je suis brouillée avec la Erdödy à cause de vous.

Isabelle de Bourbon-Parme, "je meurs d'amour pour toi...". Lettres à l'archiduchesse Marie-Christine.
Edition établie par Elizabeth Badinter. Editeur : Taillandier, la bibliothèque d'Evelyne Lever.

Isabelle de Bourbon-Parme est morte en 1763, elle allait avoir 22 ans. "L'épouse parfaite, la belle-fille admirable, celle qui montre un visage lisse et souriant est une révoltée qui se tait, une passionnée dévorée par la jalousie. [...] Les plaisirs conjugaux et maternels ne sont pas - en dépit des apparences - ses priorités. Ses lettres à Marie-Christine lèvent le voile sur plusieurs aspects cachés de sa personnalité et notamment sur son amour quasiment exclusif pour sa belle-soeur."
Il s'agit bien là d'une passion amoureuse et non d'une amitié. Dans cette correspondance les déclarations d'amour abondent :
"Je vous aime à l'adoration et mon bonheur est de vous aimer et d'être assurée de vous..."; "Je suis amoureuse de toi comme une folle, saintement ou diaboliquement, je vous aime et aimerai jusqu'au tombeau..."; "Je meurs d'amour..."; "Je vous aime, divinité..."; "Je suis très disposée à vous étouffer à force de caresses..."; "Vous me faites tourner la tête... Je suis dans l'état le plus violent, la sueur me coule sur le front, je suis sans haleine..."

Lorsque j'ai entendu Elizabeth Badinter parler de Isabelle de Bourbon-Parme, je n'ai eu qu'une envie : lire ce livre. Les extraits lus par Raphaël Enthoven n'ont fait que conforter ce désir. A la lecture cela me passionne bien moins que les Lettres à Lou de Guillaume Appollinaire ou que la merveilleuse Correspondance amoureuse d'Anaïs Nin et Henry Miller. Cependant je reconnais que cette Princesse de Parme - pour son époque - est une femme dotée d'un charme très particulier.

Ah l'amour... à quoi sert de vivre sans amour... je me le demande, flûte!

vendredi 23 avril 2010

Rude journée

8 h 20. Je me gare, je prends un Doliprane 1000 selon les instructions qui m'ont été données.
10 h 30. Je reprends ma voiture complètement sonnée. Il m'a posé trois implants au lieu de deux, pour le même prix!!! Le bridge aurait trop souffert avec deux. Pendant qu'il forait l'os en peinant il me disait : c'est du granit breton!
Un panoramique avant de partir. Un des implants est à un millimètre du nerf. Le stomato me dit : lorsque l'anesthésie sera résorbée, vérifiez que votre lèvre ne reste pas anesthésiée, auquel cas vous m'appelez vers 16 h. 'tain, j'espère qu'il a pas touché le nerf.
11 h. At home, l'anesthésie commence à s'estomper.
12 h 30. Plus d'anesthésie, lancements et mal de tête. Un Doliprane 1000. Je m'assoupis, position assise, interdit de s'allonger. Je bouge ma lèvre, je la touche, je la sens, comme avant. Ouf! Je sentirai toujours les baisers...
14 h 30. Mal au coeur, je bois un verre de lait. Je vais sur la terrasse, il fait un temps superbe. Même à l'ombre le mal de tête ne passe pas. Je reviens dans le salon. Trop de douleurs pour lire.
16 h 30. J'en peux plus, trop d'élancements, trop mal, je reprends un Doliprane 1000. Posologie du stomato : 1 matin midi et soir. Peux pas attendre ce soir. Je regarde ce qui est marqué sur la notice : 3000 mg par jour doivent suffire. Si douleurs intenses 4000 mg. Douleurs intenses.
Ne pas se fixer sur la douleur; j'allume mon ordinateur, 8 messages. Je vais lire le dernier billet d'un blogueur : envie d'éclater de rire, peux pas mais çà me détend, un court instant.
Je mange de la glace. Je retourne m'allonger, dos position assise, sur mon canapé, je ferme les yeux, j'ai mis un CD Silence et je somnole.
19 h 30. Je regarde mes messages, une jeune amie dentiste s'inquiète de moi, me donne des conseils, çà me fait chaud...; un blogueur regrette que je n'ouvre pas les commentaires. Hier mes ami(e)s m'ont encouragée, cela compte beaucoup pour moi. Je me sens moins seule.
Je prends mon antibiotique, j'ai faim, autorisation de manger froid, mou ou mixé. Ce sera compote et yaourt. Demain je mangerai un peu plus.
20 h 30. Douleurs. Je vais attendre pour prendre un dernier Doliprane 1000. Et j'ai toujours mal au crâne.

(Je me sens un peu mélancolique. Cà va passer, quand douleurs et fatigue auront disparues. Je pense à mon frère, et mes plainte me paraissent indécentes).

jeudi 22 avril 2010

A chaque jour suffit... sa joie


Ne pouvant faire de folies gourmandes ce soir - avant une intervention mieux vaut ne pas faire d'excès - je me suis fait plaisir hier soir.
Une impression presque estivale ces jours-ci m'a donné envie d'aller dîner au bord de la mer, là où réside ma famille en vacances. Du coup je leur avais promis de passer les voir pour prendre une tisane (ils ne m'ont pas proposé de dîner avec eux) sans leur dire que j'allais dîner non loin de chez eux, dans ce restaurant devant lequel nous passions souvent et dont la vue de la terrasse me faisait envie depuis longtemps. A chaque fois que nous passions devant, ma soeur s'arrêtait pour regarder la carte et sur un ton dégoûté disait : tu as vu le prix? ils font payer la vue! Et moi cette vue je trouvais qu'elle n'avait pas de prix. Ma soeur n'a jamais été une contemplative de la nature, elle préfère contempler ses petits enfants, c'est bien aussi. Moi je n'en ai pas et je suis une amoureuse inconditionnelle du ciel, de la mer, de la campagne, de la montagne, des lacs, des arbres, des oiseaux, de tout ce qui peut embraser mon regard et mon coeur. Aussi, je m'étais promis d'y dîner dans ce restaurant, même seule. En revanche, il fallait que j'y aille de bonne heure, étant attendue à 20 h 30 pour la tisane! On est très à cheval sur l'heure dans ma famille. Tant pis, j'avais faim ayant comme d'habitude déjeuné très légèrement.

Je me pointe à 19 h 10 au restaurant, pas un chat évidemment, j'ose pousser la porte et je demande à l'homme (le patron?) qui se trouve à l'accueil : à partir de quelle heure peut-on dîner? Il se retourne, regarde l'horloge et me dit : maintenant c'est possible, avec un beau sourire. Je lui dis : eh bien je vais dîner. Évidemment j'espérais avoir une table près de la baie mais elles étaient toutes réservées, ce que je comprenais; il faisait encore un peu frais pour rester en terrasse. Il me propose une table d'où je peux tout de même voir la mer, le ciel, les mouettes et je suis ravie. Je m'excuse auprès de lui de venir si tôt mais j'ai un impératif. Pas de problèmes, il est charmant, me met à l'aise, ce qui n'est pas toujours le cas quand une femme seule arrive dans un restaurant, si encore on ne vous met pas dans un coin, bien cachée pour qu'on ne vous voie pas.
- Un apéritif?
- Non merci.
Je consulte la carte et me laisse tenter par un Parmentier de cabillaud à l'andouille! (Je ris, je prends le risque). Carte des vins : je choisis un verre de chablis 1er cru et une carafe d'eau s'il vous plaît.
Je me repais du paysage, quelques chalutiers rentrent tardivement au port. Deux femmes rentrent dans le restaurant, elles n'ont pas réservé et donc seront aussi au deuxième rang si je puis dire!



Le garçon m'apporte une verrine de saumon mariné en amuse-bouche ainsi que mon verre de chablis; pain et beurre salé cela va de soi, nous sommes en Bretagne.
Je me régale en me disant : tu ne t'emmerdes pas quand même! J'en oublie mes soucis dentaires... Je goûte le chablis : bonne température, savoureux.
Je n'ai pas regretté le plat choisi, un mélange audacieux très réussi servi avec une salade de mesclun.
Je regarde l'heure, j'ai envie d'un dessert mais vais-je avoir le temps?
Le garçon m'apporte la carte, un assortiment rigolo me tente : crème brûlée, glace café, expresso, liqueur de café. Je demande au garçon si çà peut être rapide? Sans problème me dit-il.
Les premiers clients ayant réservé près de la baie arrivent... et mon dessert aussi.


Je pensais laisser la liqueur de café dans le verre mais c'était fort bon!
Ah mais, faut pas se laisser abattre! Solitude mon amour...
Le ciel a pris un ton bleu-rose magnifique. (Je pense à toi, à tes huiles sur papier Fenêtres sur mer...)
Je suis arrivée les joues en feu chez soeur, beau-frère, nièce, neveu, petites nièces en leur disant que j'étais allée manger des crêpes et qu'il faisait un chaleur étouffante dans la crêperie. Mais tu aurais pu manger avec nous clament en choeur ma nièce et ma soeur! Ben oui, mais je n'ai pas été invitée! J'étais gaie, je me sentais bien, je ne leur en voulais pas, j'avais même envie de les remercier pour ce moment de plénitude, je les aimais.

Demain sera un autre jour, n'y pensons pas trop.

mercredi 21 avril 2010

Jean DANIEL (suite)

De la vieillesse.

En se promenant sur la plage d'Essaouira :

"C'est un grand atout dans ce combat incessant de la vieillesse heureuse contre la proximité de la mort, d'être aussi disponible pour la beauté.
J'ai lu beaucoup de textes sur l'âge, sur la vieillesse, sur l'idée que le moment était d'autant plus précieux, qu'on avait - plus que les autres - l'idée qu'il était unique, qu'il avait une force, une singularité tellement grande.
Mais ma chance, c'est de pouvoir à chaque moment jouir de ce qui justifie au fond la création de la vie; la seule chose qui justifie Dieu, c'est que quand il fait beau on dit que c'est grâce à lui; quand il ne fait pas beau on n'y croit pas, il n'existe pas. Il est gagnant sur tous les terrains. C'est un imposteur"
(et Jean Daniel sourit avec douceur en disant cela).

Ici, à Porto Vecchio où il se baigne :

"S'arrimer à la vie, avoir l'impression qu'elle va se poursuivre. L'immersion, le fait de faire partie de l'élément, le fait de n'avoir pas de pesanteur, le fait d'avoir l'impression d'une étreinte - un peu cosmique, çà fait des armes contre la mort, qui sont ignorées par tous, sauf dans l'amour.Et en riant il ajoute : Ah, vous en avez pour votre argent là".

Quel charisme, quelle chance d'avoir encore cette vigueur, ce désir de la vie pour faire reculer la mort, à près de 90 ans. On parle parfois de jeunesse dorée, la vieillesse dorée existe aussi, je l'ai vue dans ce beau reportage. On est loin de celle dont Simone de Beauvoir parle dans son essai.
Le film se termine sur cette phrase de Tolstoï :
"L'existence de la mort nous oblige soit à renoncer volontairement à la vie, soit à transformer notre vie de manière à lui donner un sens que la mort ne peut lui ravir."

mardi 20 avril 2010

Jean DANIEL

Jean Daniel. Cet homme laissera une Empreinte(s) forte dans mes souvenirs. En l'écoutant, en le regardant dans l'émission d'Arte, à bientôt 90 ans, il me séduit toujours en tant qu'homme autant qu'en journaliste. J'ai pourtant abandonné mon abonnement au Nouvel Observateur depuis très longtemps, il m'arrive seulement de le consulter parfois sur Internet, pour lire son éditorial.
Dans l'émission Empreintes, on le voit en compagnie de Jean Lacouture. Ce qu'il est beau. Evidemment, il doit avoir du "personnel" pour s'occuper de ses chemises impeccables me disais-je en le regardant. Il doit être plus facile d'être en bonne forme dans un âge très avancé quand tout vous est apporté sur un plateau d'argent. Cependant, il ne suffit pas d'avoir un intellect brillant pour rester lumineux...

Avec Jean Lacouture :
"Je pense en gros que le 20è siècle a infligé au 21è une obligation d'humilité écrasante, la somme des illusions perdues, les combats qu'on peut tourner du tragique à la dérision, la remise en question de certaines valeurs fondamentales, dans l'engagement, dans les prises de positions; une contrainte au doute. C'est pas responsable de notre part d'avoir aujourd'hui les mêmes idées, d'avoir le même confort. Nous avons perdu la sécurité intellectuelle...
... J'ai fait mon métier de journaliste avec l'idée que non seulement je ne m'éloignais pas mais que je me rapprochais de la littérature en donnant aux autres le goût d'un journalisme culturel."

"Je ne me souviens pas d'un moment de ma jeunesse, de ma prime jeunesse, où je n'ai pas été environné par les livres".

Le Nouvel Observateur c'est l'empreinte de ma jeunesse, de mes années d'étudiante bien avant Mai 81. Aujourd'hui, je suis plus imprégnée de littérature que de politique.

Jean Daniel cite René Char :
"La lucidité est la blessure la plus rapprochée du soleil".

Lu aussi ailleurs :
"Sarkozy m'a tutoyé çà m'a déplu".
Evidemment... la classe... c'est inné!

lundi 19 avril 2010

La famille

Il y a des jours où j'aimerais savoir écrire des romans. J'oserais ainsi dire ce que j'en pense et on me dirait : çà sent le vécu; c'est autobiographique évidemment! Et, fabulatrice, je répondrais : pas du tout, c'est un roman.
Une partie de ma famille est en vacances ici, ma soeur aînée, ma nièce. Sous prétexte donc qu'elles sont là avec leurs enfants, je devrais aller les voir séance tenante mais elles, eux, jamais ne viennent me voir. Je ne sais d'ailleurs pas quelles sont les règles en la matière : est-ce l'individu qui débarque quelque part qui doit rendre visite à celui qui vit là à longueur d'année ou est-ce à celui qui vit là d'aller voir les arrivants? Me poser cette question est bien la preuve d'une obligation contraignante plus que d'un plaisir, auquel cas l'une ou l'autre nous nous précipiterions pour nous revoir et puis, entre soeurs les obligations çà ne devraient pas exister!
Il semblerait aussi que ma famille (nombreuse) s'imagine que puisque je vis seule, je me morfonds (et là, pour une fois je ne dis pas le gros mot je me contrôle), que je ne dois pas savoir que faire de mes journées. Ce qui est faux bien sûr. Prendre le temps de lire est important non? S'ennuyer l'est également. Aussi quand je leur dis : je peux vous voir aujourd'hui parce que : demain je vais au golf, mercredi je déjeune avec un ami et je vais voir une expo après, jeudi je vais faire le plein de choses liquides ou molles parce que pendant une semaine je vais avoir quelques difficultés pour mâcher et que vendredi on me torture (triture) la bouche et donc le week-end je vais être sonnée; j'entends alors au son de leur voix au téléphone qu'ils ne sont pas contents, qu'ils pensent que je dois inventer des rendez-vous (c'est vrai aussi que parfois j'invente, hum) et que je suis vraiment le mouton noir de la famille. Et justement aujourd'hui je pourrais les voir et elles (les femmes) ne sont pas libres : les filles vont à la plage (oui il fait un temps incroyable), les mères à la thalasso. Et le soir? Moi j'adore sortir le soir, aller dîner, faire une balade au port ou le long de la mer mais elles non, enfin si, elles y vont, en lousdé (expression qu'on affectionne dans ma famille) sans m'en parler. Alors je ne vois pas pourquoi ce serait moi qui devrais être à leur disposition.

J'y suis attachée pourtant à ma famille; s'il leur arrive quelque chose de grave j'en suis tourneboulée (çà existe çà? oui, vérifié!). Mais bon sang se voir pour se dire : quel beau temps, c'est dur de vieillir, mon Dieu que l'hiver fut long, qu'est-ce que tu as vu à la télé? Surtout qu'on se téléphone entre-temps pour se dire : quel temps il fait chez vous? Ah, tu as une bronchite? Moi, j'ai une rhinite allergique! Passionnant tout çà. Mes nièce et neveu ne sont pas enseignants mais maintenant dans le privé, avec les trucs TT et tout çà, ils sont tout le temps en vacances. Çà c'est ma tite soeur qui me le disait au téléphone tout à l'heure en riant, et avec elle, je me marre toute l'année comme une baleine.

Donc today was a lovely day : tranquille sur ma terrasse avec Beckett!

"Vivre et inventer. J'ai essayé. J'ai dû essayer. Inventer. Ce n'est pas le mot. Vivre non plus. Ça ne fait rien. J'ai essayé. Pendant qu'en moi allait et venait le grand fauve du sérieux, rageant, rugissant, me lacérant. J'ai fait çà. Tout seul aussi, bien caché, j'ai fait le fat, tout seul, pendant des heures, immobile, souvent debout, dans une attitude d'ensorcelé, en gémissant. C'est çà, gémis. Je n'ai pas su jouer. [...] C'est que j'étais en proie au sérieux. Ça a été ma grande maladie. Je suis né grave comme d'autres syphilitiques. Et c'est gravement que j'ai essayé de ne plus l'être, de vivre, d'inventer, je me comprends. Mais à chaque nouvelle tentative je perdais la tête, me précipitais comme vers le salut dans mes ténèbres, me jetais aux genoux de celui qui ne peut ni vivre ni supporter ce spectacle chez les autres. Vivre. J'en parle sans savoir ce que ça veut dire. Je m'y suis essayé sans savoir à quoi je m'essayais. J'ai peut-être vécu après tout, sans le savoir. Je me demande pourquoi je parle de tout çà. Ah oui, pour me désennuyer. Vivre et faire vivre..."

Samuel Beckett, Malone meurt, p. 33-34, éditions de Minuit, Collection "double".

dimanche 18 avril 2010

Voyages en pays manga

Ouf! terminé la corvée terrasse. Je ne suis pas fière de moi, j'ai tout bâclé cet après-midi; plus d'énergie!

Mais donc hier après-midi, après avoir déambulé à la bibliothèque, je suis allée voir l'exposition Voyages en pays manga. Cela m'a donné très envie de mieux connaître un domaine qui m'est totalement inconnu.

Avant d'être photographiées les Cosplayeuses prennent une pose bien étudiée
qu'elles aiment faire et défaire durant des heures
devant la glace de leur salle-de-bains



En entrant dans la salle d'exposition j'ai été happée par la Cosplayeuse (voir légende sous la première photo) au fond de la salle, puis émerveillée par les couleurs. Toutes les photos de l'exposition sont superbes (je parle des originaux, les miennes manquent de lumière). En m'attardant sur chacune d'elles je remarque la concentration des lecteurs de mangas, de tous âges. Tous les endroits sont bons pour lire une BD : en avion, en taxi, sur un quai de gare, sur une pelouse, dans la rue...




Je m'initie au langage manga :

Plusieurs définitions sont possibles pour le terme manga : "esquisses fantaisistes, "dessins au trait nerveux", "dessins dérisoires".
Le Shojo est un mot japonais signifiant jeune fille ou petite fille. En occident, il désigne les mangas ciblant un public exclusivement féminin et plutôt jeune. Le vie quotidienne, l'école, les histoires d'amour ainsi que la magie font partie des thèmes récurrents.
Le Shönen qui signifie adolescent en japonais, est exclusivement utilisé pour désigner un type de manga ciblant un public masculin et adolescent. Le combat, le dépassement de soi sont les thématiques prédominantes.
Le Seinen qui signifie jeune homme en japonais, est exclusivement utilisé pour désigner un type de manga ciblant un public plus adulte que le Shönen, avec des intrigues plus complexes.
Le Josei manga s'adresse avant tout à un public de jeunes femmes (18 - 30 ans). Tout comme le Shojo, il a le plus souvent comme trame les histoires d'amour de jeunes personnes. Néanmoins, le sujet est traité de manière plus sérieuse et plus réaliste, abordant les préoccupations des jeunes femmes d'aujourd'hui : la quête d'un partenaire, le célibat, la vie active, la maternité...
Le Gekika correspond à un terme créé en 1957 par le mangaka (dessinateur de manga) Yoshihiro Tatsumien. Littéralement il désigne des dessins dramatiques. L'histoire, la politique, les faits de société sont source d'inspiration pour ce type de manga.

Osamu Tezuka (né à Osaka 1928 - 1989) est considéré comme un dieu au Japon. Véritable pionnier dans le domaine du manga. Un musée a été inauguré en son honneur à Kyoto en 1994.
D'autres auteurs renommés : Jiro Taniguchi (né à Tottori en 1947), Keiji Nakazawa (né à Hiroshima en 1939) et de plus jeunes auteurs: Ai Yazawa (née en 1967), Kiriko Nananan (née en 1972).

Le musée international du manga à Kyoto est un centre de recherche sur la BD japonaise mais aussi sur la BD dans le monde. La structure accueille 270 000 visiteurs par an et 40 000 albums sont à la dispositions du public. Les français sont les premiers visiteurs (10% du public) devant les américains, les australiens et les anglais. En France le manga représente 40% du secteur de la BD.
60% des japonais lisent un manga par semaine.




Les photos sont de Thierry Soufflard, photographe et journaliste. (Cliquer pour agrandir)

Très belle exposition. Oui, pour moi cette découverte fut magique.

samedi 17 avril 2010

Du manuel à l'intellectuel

Vive le printemps! Pour m'éreinter, rien de mieux qu'une journée ensoleillée, presque chaude.
Passé des heures à brosser ma terrasse, à l'huile de coude et je n'ai fait que la moitié de la surface. Finirai demain... si je peux bouger!

Milieu d'après-midi à la bibliothèque (oui j'arrête d'acheter des livres... jusqu'à la prochaine fois). Çà y est je me décide à lire Proust, enfin, je vais commencer ce que j'ai trouvé car, je n'ai pas voulu prendre tous les tomes en un seul volume de 2600 pages, pour avoir une tendinite, merci! Pas trouvé Du côté de chez Swann, fallait faire une demande, ce n'est pas grave je l'ai lu il y a très très très longtemps. Je vais donc lire (enfin essayer il y a tout de même 500 pages écrites tout petit). A ce sujet, la bibliothécaire, disons plutôt l'aide-bibliothécaire (elle n'avait pas l'air très érudite), ne trouvant pas ce que je voulais sur son ordinateur me demande :
- et de la lecture en écoute vous ne voulez pas?
- jamais-de-la-vie lui dis-je. J'attendrai d'être devenue aveugle!
- et en gros caractères?
- ah non merci! après je ne pourrais plus lire que çà, tsss!
- bon, alors je n'ai que celui-là A l'ombre des jeunes filles en fleurs en poche Folio classique.
- très bien.

Ensuite j'ai pris un Beckett : Malone meurt qui fait partie de sa trilogie : Molloy, Malone meurt et L'innommable. La quatrième de couverture m'a séduite :
"Malone meurt est l'oeuvre dans laquelle, avec un humour extrême, une acuité et un sens poétique infinis, Samuel Beckett s'exprime le plus explicitement sur l'acte d'écrire et sur la complexité des rapports entre un écrivain, sa création et ses créatures."

J'ai terminé l'après-midi parmi les mangas! Magique...

vendredi 16 avril 2010

Ma vie est passionnante


10 h. Ce matin émotion. Un blogueur (et là pour le coup je trouve ce mot très réducteur puisque c'est un journaliste qui tient un blog)) m'a envoyé un mail parce qu'il s'inquiétait : je ne laissais plus de commentaires sur son blog depuis quelques mois. Son petit mot m'a chamboulée. Je me suis si souvent dit : tu pourrais disparaître, personne ne s'inquièterait de ton absence sur la toile. Eh bien si, ce blogueur s'est inquiété de moi; c'est quelqu'un que j'écoute toujours chaque jour avec plaisir et que je continuai de lire, sans commenter. Ô merci très cher ****** comme je vous sais gré de ce mail, vous qui ne me connaissez pas alors que moi j'ai l'avantage de vous connaître, par média interposé. Touchée, jusqu'au coeur.
[...]
13 h... Flûte, je n'ai plus d'oeufs durs pour mes salade du déjeuner.
Je vais en cuire 4 avant de partir faire mon shopping.
14 h. Hop, une casserole, faire bouillir l'eau et plonger les oeufs. Le temps de me faire une beauté, hum et ils seront cuits!
Programme cet après-midi : passer devant la sécu déposer ma feuille de maladie (énervants ces toubibs qui ne prennent pas la carte vitale), faire un tour chez Fly pour voir si je trouve des tables gigognes design pour mon salon (ma belle table en chataîgner massif ne va plus du tout avec mon nouveau canapé, il faut que j'essaie de la vendre), puis passer chez Harmonia Mundi rayon CD jazz et faire le plein d'essence.

14 h 30. Le programme a démarré comme prévu : sécu, Fly. Je m'attarde sur les tables basses, il y en a une laquée blanc à deux plateaux pivotants qui serait pas mal dans mon salon. J'essaie de la soulever, impossible. Je me penche pour examiner le socle, un coin d'angle a éclaté, le morceau est par terre, je l'attrape, le regarde et me dis : c'est de la camelote, de l'agglo mélaminé, les plateaux laqués doivent en être aussi (d'où le poids) et donc fragiles. Un vendeur vient vers moi, me fait l'article : très belle qualité et patati et patata. Je lui dis : vous avez vu le socle? il y a un éclat! J'avais laissé le morceau au sol. Il me dit : tiens c'est bizarre on a passé l'aspirateur tout à l'heure (sic). Je ne voyais pas le rapport, ou alors si, le préposé à l'aspirateur à cogné le socle et pété l'angle. Ben non, je ne lui ai pas dit : c'est de la vase, il n'aurait pas compris. Je n'ai rien dit et j'ai poursuivi mon shopping. J'arrive au rayon des ustensiles de cuisine et je vois de jolies cuillères en plastique vert pomme, jaune fluo, vermillon qui seraient plus guillerettes que mes vieilles cuillères en bois pour touiller purée, compote... et, au moment où je m'apprête à en prendre deux, soudain une tornade dans ma tête! Nom de zeus (j'ai dit p... en fait! oui je jure comme un charretier depuis ma plus tendre enfance au désespoir de ma mère qui n'est plus là pour m'entendre) merde, p... : j'ai oublié mes oeufs dans la casserole et je n'ai pas éteint la plaque avant de partir. Je regarde ma montre : une heure que je suis partie (faut 10 mn pour cuire un oeuf;o), je quitte Fly comme une voleuse en courant, parking, je démarre en trombe, j'essaie de ne pas m'arrêter aux feux, j'accélère à l'orange (je sais, c'est mal), bon là il est rouge, je m'arrête quand même! L'angoisse monte, j'imagine de la fumée, le bâtiment en feu (mon voisin du dessus pas content déjà qu'il n'est jamais content), les pompiers, mes tableaux (le reste je m'en fiche) partis en fumée. Quinze minutes plus tard j'arrive dans mon quartier, devant la biscuiterie - çà ne sent pas le cramé, çà sent bon - l'église est là intacte;o), pas de fumée sur ma terrasse, ouf! Je sors mes clefs, énervée j'ai du mal à ouvrir la porte, çà y est! La kitchenette est à peine enfumée, ma plaque à induction ne s'est pas éteinte toute seule (je l'avais un peu espéré), et j'entends les oeufs qui grésillent scotchés dans la casserole qui n'a plus, évidemment, une goutte d'eau. J'éteins la plaque, je prends la casserole et je vais sur la terrasse pour la rafraîchir. J'adore ce bruit de l'eau qui bouillone dans ma casserole chauffée à blanc : "pschchch"!


Comme disait ma tante dès qu'elle avait envie de boire un apéro : je l'ai bien mérité! Bon, pour moi à cette heure-là (16 h 30) ce sera un thé vert. Je l'ai bien mérité. Il ne me reste plus qu'à être zen après cette montée d'adrénaline.

Je suis tout de même un peu inquiète : comment ai-je pu oublier mes oeufs sur le feu? D'habitude c'est quand je suis sur Internet que je laisse déborder mes casseroles, calciner mes compotes, mais là tout de même, j'ai dû prendre trop de temps pour me faire une beauté - même pas réussi - et du coup j'ai oublié mes oeufs? Ah mais non, je sais pourquoi j'avais la tête en l'air : ce mail reçu ce matin... tellement inattendu.

jeudi 15 avril 2010

Ma vie est futile

Pablo Neruda défenseur des opprimés, dont tout le monde connaît le beau poème Il meurt lentement, fut aussi un poète inspiré par les femmes :

Corps de femme, blanches collines, cuisses blanches,
l'attitude du don te rend pareil au monde.
Mon corps de laboureur sauvage, de son soc
a fait jaillir le fils du profond de la terre.

Je fus comme un tunnel déserté des oiseaux,
la nuit m'envahissait de toute sa puissance.
Pour survivre j'ai dû te forger comme une arme
et tu es la flèche à mon arc, tu es la pierre dans ma fronde.

Mais passe l'heure de la vengeance, et je t'aime.
Corps de peau et de mousse, de lait avide et ferme.
Ah ! Le vase des seins ! Ah ! Les yeux de l'absence !
Ah ! Roses du pubis ! Ah, ta voix lente et triste !

Corps de femme, je persisterai dans ta grâce.
Ô soif, désir illimité, chemin sans but !
Courants obscurs où coule une soif éternelle
et la fatigue y coule, et l'infinie douleur.



Pablo Neruda 1924

A titre posthume fut publié J'avoue que j'ai vécu (Gallimard 1987), extrait :

«Je veux vivre dans un pays où il n'y a pas d'excommuniés.
Je veux vivre dans un monde où les êtres seront seulement humains, sans autres titres que celui-ci, sans être obsédés par une règle, par un mot, par une étiquette.
Je veux qu'on puisse entrer dans toutes les églises, dans toutes les imprimeries.
Je veux qu'on n'attende plus jamais personne à la porte d'un hôtel de ville pour l'arrêter, pour l'expulser.
Je veux que tous entrent et sortent en souriant de la mairie.
Je ne veux plus que quiconque fuie en gondole, que quiconque soit poursuivi par des motos.
Je veux que l'immense majorité, la seule majorité : tout le monde, puisse parler, lire, écouter, s'épanouir.»


Je ne sais pas pourquoi je pense à Pablo Neruda aujourd'hui mais je trouve cet extrait de son autobiographie d'une actualité perspicace.
Ma vie est futile : je pars au golf.

mercredi 14 avril 2010

Précieuse ridicule

Entendu sur France Culture il y a quelques jours une femme... :
- "Excusez moi mais je vais être vulgaire : à un moment vous êtes vraiment dans la vase."

Quand la merde devient de la "vâse" (insister sur le a), sûr c'est plus délicat. Cela avait une sonorité qui frisait le ridicule, tant le ton de la précieuse était ampoulé.

***

"Elle me tourna le dos pour composer son code à l’abri de mon regard indiscret, lequel donc se reporta sur ses fesses."
Eric Chevillard, L'autofictif (14 avril 2010).

mardi 13 avril 2010

Apple

J'ai un ami qui ne jure que par Apple, comme d'ailleurs la plupart des utilisateurs de Mac (et je crois qu'ils ont raison). Ce matin j'étais allongée sur le fauteuil de mon stomato et je le voyais pianoter sur son Mac à l'écran géant qui était juché sur un pied en métal très design. Il faut reconnaître que ce sont de beaux objets. (L'image de mon panoramique dentaire ne m'a pas détendue pour autant).

Dans la salle d'attente cinq minutes plus tôt, je lisais un article sur l'iPad : l'ardoise magique débarque! Les fans d'Apple vont se précipiter, juste pour être dans l'air du temps. "Comme ce fan qui expliquait cette semaine dans le New York Times que l'iPad est totalement de l'ordre du "superflu", un objet dont les principales fonctions sont déjà remplies par l'iPod ou l'iTouch ou le MacBook. Mais si Apple se décidait à sortir une gamme de caleçon, j'en porterais un!"

(Rendez-vous est pris pour le forage de la mâchoire dans dix jours! Et là les boules Quiès ne serviront à rien! Faut subir le marteau piqueur. La dernière fois que j'ai subi ce supplice - il y a un an - j'avais crié sur tous les toits que... jamais plus! Eh bien si, je vais y repasser et j'ai les j'tons).

lundi 12 avril 2010

Le retour

Jeudi 1er avril.

10 h. Le propriétaire arrive, je lui dis que j'ai apprécié le studio. Il espère que je lui enverrai des clients-locataires. La rue est bouchée les voitures ne bougent plus, ma valise est trop lourde pour prendre le métro (escaliers) et c'est risqué de faire venir un taxi dans cette rue. Le propriétaire, adorable, propose de m'accompagner jusqu'au boulevard Saint-Denis à 300 mètres pour trouver un taxi. Vraiment gentil, galant.

... 12 h. Dans le train je refais mon séjour dans ma tête : mes amis (es) mes dîners mes balades solitaires mais excitantes. Mon premier séjour parisien qui ne fut pas une escapade amoureuse. Sentiment de liberté : solitude mon amour. Je n'aurais pas fait le quart de ce que j'ai fait si j'avais eu un amoureux à revoir mais je n'aurais pas eu non plus cet eczéma, cette gratouille qui ont redémarrés.
Mélancolie. Je vais retrouver my sweet home, ma vie de province. Ici ou ailleurs, la solitude est la même et puis, je suis devenue si indépendante et tellement lente et chiante, qu'il n'y a que moi pour pouvoir me supporter.

Il me reste si peu de temps à vivre, je le sais, je le sens, je le veux.

16 h. Le train rentre en gare...

dimanche 11 avril 2010

Septième jour

Mercredi 31 mars.

Dernier jour à Paris. Je donne un coup d'aspirateur dans le studio ce matin bien que le ménage soit inclus dans le forfait; envie de laisser une bonne impression car j'ai l'intention de revenir. Terminés les séjours à l'hôtel, c'est bien plus agréable la location, plus économique et on se sent comme chez soi.
Je décide de passer la journée dehors même si le vent ce matin est encore glacial et qu'une balade au Luxembourg est plus agréable quand on peut s'asseoir dans les fauteuils presque relax près du bassin ou de la Fontaine Médicis. Le souvenir le plus marquant pour moi au Luxembourg en Juin 2008 fut celui de l'orage et de la pluie torrentielle qui m'ont fait me réfugier sous un arbre aux côtés de Micheline Presle qui gentiment m'a proposé de m'abriter sous son parapluie : un moment absolument délicieux. Elle était belle à 85 ans tout en blanc avec des Converse basses! Le temps d'échanger trois mots, de la remercier et la pluie s'est arrêtée; dommage.

Donc je descends à Odéon, il est déjà presque midi, je remonte la rue de l'École de Médecine, je m'arrête devant le cinéma Racine, encore des souvenirs, ceux où j'ai vu les premiers films d'Alain Tanner et mes stars... et je file jusqu'au Luxembourg par le Boul'Mich'; je m'arrête dans un bistrot plus loin, il me faut ma drogue du matin (même à midi) un café serré; je le prends au bar, vite fait.

J'abrège, je n'ai pas chaud, j'aurai vraiment dû venir avec ma veste d'hiver, le vent d'est est cinglant. 13 h, je vais me réchauffer dans un restaurant japonais, çà pullule en redescendant la rue Monsieur le Prince. Je ne suis pas fan de sushis, je prends des petites brochettes à la sauce yakitori...

Re Boul'Mich (j'ai 20 ans youpi), le soleil a fait son apparition (youpi), je reprends les rues arpentées il y a... euh... chut...! Le Musée de Cluny, le petit square de la Sorbonne, la rue Saint Jacques où j'étais en stage (les pavés, les barricades, les bombes lacrymogènes sont les images qui me reviennent à l'esprit). Je savoure cette promenade même (et surtout) en solitaire


Derrière la statue Puvis de Chavannes Square Paul-Painlevé,
le musée de Cluny

La Sorbonne

Le temps passe, j'arrive devant Le Champo et là mes yeux brillent du feu de mes souvenirs. Il est 14 h 45 et je regarde les films qu'il projette, je vois à 12 et 16 h : L'étranger de Luchino Visconti avec Marcello Mastroiani et Anna Karina!! Epatant, voilà qui va reposer mes gambettes. J'ai une heure devant moi, je voulais aller prendre un café au Soufflot, ça me laisse le temps... de rêvasser un peu sur la terrasse chauffée, de regarder les passants, de me dire que cette journée, la dernière, est divine et de dire : Paris je t'aime.

Retour au Champo, ce cinéma pour moi mythique, combien de films ai-je vus ici quand j'étais étudiante et durant mes années de célibat? la salle est petite, JE SUIS AU CHAMPO ET JE NE RÊVE PAS! C'est mercredi c'est raviolis, euh non, c'est tarif réduit! Je n'ai pas regretté ces presque deux heures avec Meursault, Mastroianni absolument magnifique dans le rôle et quel plaisir de revoir Anna Karina, même si les critiques s'accordent à dire que ce n'était pas du meilleur Visconti (le film a été rénové), je trouve qu'en cette année d'hommages à Albert Camus ça vaut le coup de le voir; néanmoins j'ai préféré le livre. MAIS J'ETAIS AU CHAMPO!



What a lovely day!

(Cliquer sur les photos pour agrandir)

samedi 10 avril 2010

Sixième jour


Mardi 30 mars.

Je dors de mieux en mieux dans ce studio, il faut dire que j'enfonce mes boules Quiès jusqu'à la gorge! Ni volets ni rideaux aux fenêtres, j'avais heureusement prévu mon "loup" pour occulter la lumière.
Petit déj. en écoutant F. Inter, comme chez moi; je suis conquise par ce studio, le propriétaire m'avait laissé sa chaîne hi-fi, sa radio, sa télé (pas beaucoup regardée).
Je pars rue Montorgueil - çà devient une habitude - prendre un café serré. Il fait toujours très frisquet.

Je retourne au Salon du livre cet après-midi; je sens que je commence à être fatiguée. Je n'arrête pas de marcher depuis maintenant cinq jours. Un jeune homme vend des billets d'entrée à 5 euros au lieu de 9 à la sauvette; je crains de me faire arnaquer, suis un peu c.. et je vais acheter mon billet à l'entrée principale à 9 euros. Pfff! Vendredi j'avais une invitation. Je refais le tour, m'arrête au studio de France Culture espérant y faire une pause mais à l'heure où je passe pas d'émission en direct. Sur le stand de France Info, Katherine Pancol; je l'ai déjà beaucoup entendue parler de ses livres, je n'ai pas envie de m'arrêter. Je m'attarde sur quelques stands de livres d'art; à vrai dire, je voudrais pouvoir m'asseoir un peu en feuilletant des livres mais pas un banc, pas une chaise dans ce Salon. Je crève de chaud et me dirige vers un bar que j'aperçois pour prendre une petite bouteille d'eau pétillante; on me donne un verre en plastique. Il y a quelques tables et chaises toutes occupées. Je sens que je commence à saturer; je rêve d'être dans une librairie silencieuse, entourée d'ouvrages où se trouverait un petit salon avec des fauteuils clubs comme celle que j'affectionne dans ma ville et qui s'appelle Les vents m'ont dit (titre d'un livre de Xavier Grall). Je remarque que mes librairies favorites portent des noms évocateurs (Les vents m'ont dit - L'écume des pages...). Je me souviens aussi de cette délicieuse librairie découverte à Noirmoutier Trait d'union et de son charmant jardin de curé où l'on pouvait siroter un café en feuilletant des livres, des revues.



Je passe chez l'éditeur P.O.L. pour compléter un peu ma collection d'ouvrages de François Matton mais là je crois qu'il me faudra faire un billet à part pour parler de ce merveilleux dessinateur-écrivain et du livre acheté DE PIÈCES EN PIÈCES Chroniques sur des oeuvres nomades. Ce livre d'art est riche et nous parle d'art contemporain sans emphase... Les dessins et les textes de François Matton sont devenus pour moi le baume au coeur qui me redonne le sourire quand je vais mal, grâce à lui TOUT VA BIEN.

En fait je suis revenue aujourd'hui au Salon du livre (le Saloon de la foire du livre comme l'a dénommé cette année France Inter) pour rencontrer Philippe Annocque et me faire dédicacer son dernier livre Liquide (j'apprendrai que le prochain va sortir cet automne). C'est un écrivain dont j'ai déjà parlé; découvert grâce à son blog et dont j'ai beaucoup aimé les livres. Dès que je l'aperçois je le reconnais, je m'approche, intimidée, je me présente (il me reconnaît me dit-il, ben oui, à force d'échanger des commentaires sur le blog on finit par imaginer l'autre et parfois on ne se trompe pas). Mais que je suis nulle; je n'ai pas su lui parler, je lui avais déjà tellement dit combien son écriture m'avait séduite que je n'osais plus rien dire; il était pourtant très chaleureux. Bon, ce n'est pas grave, j'avoue que j'aurai préféré un endroit plus intimiste (où j'aurai pu m'asseoir enfin), avec aussi du vrai liquide;o) pour faire disparaître le trac : une librairie, voire un bistrot où il aurait fait une lecture ou nous aurait parlé de lui, bref il m'a fait une très jolie dédicace et je suis repartie, trop rapidement, assoiffée, avec mon Liquide sous le bras, saturée du Salon. Je déteste les Salons (chut).

Je ne pouvais pas traîner, une soirée très douce, m'attendait chez mes plus chers amis au monde, dans leur atelier : mes anciens voisins parisiens.


Un couple merveilleux, lui, Michel Rousseau, est artiste-peintre et sculpteur, elle, sa muse. Je ne séjourne jamais à Paris sans passer les voir. J'avais besoin de leurs bras ce soir, qui savent si bien m'envelopper de leur douceur, de leur tendresse, de leur amitié, de leur amour, tout ce qui me manque au quotidien. Elle me dit : j'ai fait un pot-au-feu (elle sait que j'adore son pot-au-feu qui nous réunissait le soir de Noël, oui un plat simple pour ce réveillon qui n'avait besoin d'autre chose que ce nous partagions richement). Aïe et moi j'ai apporté une bouteille de Valpolicella, j'avais tellement apprécié la veille celle dégustée avec mes petites chéries! Mais ça sira très bien me dit-elle avec son accent catalan que j'adore. Je les ai quittés les yeux brillants du bonheur d'avoir passé cette soirée avec eux. Trop de choses à dire sur ces quelques heures précieuses pour pouvoir les écrire.

Je prends le métro, la ligne est directe, il est 23 h 30. Je pense à toi, si tu savais comme tes amis parlent toujours de toi, comme si tu étais vivant, je veux dire, comme si tu n'étais pas mort. C'est fou çà. J'aurai comme une envie d'être amoureuse ce soir... de quelqu'un d'autre, tsss! Ma vie amoureuse est un désert!

vendredi 9 avril 2010

Cinquième jour



Lundi 29 mars.

Je suis restée dans "mon" quartier. Impression de redevenir parisienne = revivre. Paris m'envoie des ondes positives, je ne l'explique pas. Si, peut-être en regardant cette photo.


Willy Ronis
(Et pourtant je ne supporterai plus d'y vivre, longtemps. Enfin, je n'en sais rien. Enfin si, je sais. Je sais que maintenant ma vie est ici, en province, voire en provinciale (quel mot horrible) je sais que je ne vivrai jamais en provinciale. Quand on a vécu trente ans à Paris on garde toute sa vie cette empreinte même au regard des autres et d'ailleurs j'y tiens).

Donc, balade vers Beaubourg, Centre Pompidou, la queue pour Lucian Freud, je me contenterai du catalogue feuilleté hier à L'écume des pages. Je m'arrête devant une affiche qui présente un fauteuil design extraordinaire (fait de papier en provenance d'une déchiqueteuse!). Je rentre dans la galerie pour voir l'expo sans savoir que je suis au Centre Wallonie-Bruxelles à Paris. Titre de l'expo : LE BONHEUR EST DANS LE DESIGN! La collection du Grand-Hornu 26 mars/14 juin 2010.
Hairy chair, Charles Kaisin
Je suis ravie de ma découverte. Ci-dessous :
Rag Chair, Tejo Remy


Thinking Man's Chair, Jasper Morrison

"Devenue une référence internationale en matière d'expositions liées au design, Grand-Hornu Images est fréquemment sollicitée pour des travaux d'expertise, des co-productions, avec des organismes prestigieux tels que le Design Museum à Londres, la Fondation Cartier à Paris, le MUDAM (Musée Grand-Duc Jean) à Luxembourg... des publications à diffusion internationales etc."

Mais je retiens surtout de cette journée, ma soirée de retrouvailles avec mes petites chéries à Odéon. Il en manquait une mais je me promets de la voir bientôt! Quand je les regarde c'est moi que je revois... quarante ans plus tôt, remplie d'espérance dans la vie qui allait s'offrir et qu'il allait falloir conquérir. Je n'ai pas été déçue, sans être épargnée pourtant, j'ai beaucoup reçu et, donné. Je ne me fais pas de souci sur leur devenir.

jeudi 8 avril 2010

Quatrième jour

Dimanche 28 mars.

Je traîne ce matin dans le studio ayant savouré une grasse matinée, pas de travaux dans la rue ce dimanche! Mon voisin d'en face est là, solitaire devant son écran!

Cet après- midi : quartier latin. Je descends à la station Saint-Germain des Prés, une citation sur les murs et dans des vitrines quelques livres de poésie (Paris sans cesse tu m'enchantes)


et je vais à pieds au musée Maillol en passant par la rue des Saints-Pères, coup d'oeil aux vitrines de Sonia Rykiel. Pas de sex-toys en vitrine... oui, il n'y a pas si longtemps, elle avait mis cet objet à la mode; les bourgeoises déculpabilisaient paraît-il en l'achetant dans cette boutique de luxe. Pfff!
Musée Maillol, il est tôt pour un dimanche donc pas de queue pour voir l'exposition les Vanités dont j'ai déjà parlé ici. Les salles sont sombres comme pour nous mettre dans l'ambiance un peu mortifère et pourtant pas triste du tout. Là encore photos interdites! Les visiteurs s'attardent tous devant la "reproduction" de la vanité toute de diamants de l'artiste Damien Hirst. Dans la plus grande salle (et la plus éclairée) j'aime beaucoup le crâne de Yan Pei Ming. Plus on avance dans l'exposition, je dirais même plus on s'enfonce, plus les découvertes sont extraordinaires. Cette tête de mort d'où sort (dommage je n'ai pas pu la photographier) des vers est d'une gaîté repoussante mais joyeuse. Oui, j'avoue m'être bien amusée en contemplant ces trésors.
J'ai bien fait de venir de bonne heure, la foule se pressait quand je suis repartie à 16 heures. Un monsieur qui faisait la queue m'interroge : combien de temps faut-il pour visiter l'expo? Je le regarde avec de grands yeux et lui dit : cela dépend : si vous tenez le coup, deux heures et si vous vous reconnaissez dans votre devenir, quinze minutes. Mais non, je plaisante : c'est passionnant, prenez votre temps.

Je suis quand même heureuse d'être dehors, il fait beau et j'ai une petite faim! Je reprends le boulevard Saint Germain, arrêt à ma librairie préférée ouverte le dimanche : L'écume des pages. Les terrasses du Flore et des Deux Magots sont pleines comme d'habitude et sans grand intérêt. Je poursuis ma balade vers la place Fürstenberg, dans une petite rue qui me mène vers la Seine, ces deux affiches remplaceront les photos que je n'ai pas pu prendre : Vanités et Ambre, cette pierre que j'affectionne!


Cette rue est calme, je respire à pleins poumons l'air de Paris, je me sens bien. J'arrive sur les quais : quai Conti, galerie Katia Granoff (souvenir mon amour). Je traverse la place Saint Michel pour longer les bouquinistes où je m'attarde. Amusant de voir la façade la Préfecture de Police bâchée pendant les travaux et qui profite de cette occasion pour afficher ses visages et métiers.



Ma petite faim se réveille, The Tea Caddy me tend ses "scones"! La photo est prise avec mon téléphone portable, beurk, mais ce qu'il y avait dans l'assiette était "gorgeous" : thé vert "sous la véranda" et scones Devon servis tièdes avec crème et confiture, je le dis, aussi bons qu'en Irlande!



Suis rentrée, vannée! Comme le dit Stendhal dans son Journal :
Florence, 27 septembre 1811.
Je rentre à midi de ma tournée du matin. C'est le régime qui convient pour le repos des jambes et des yeux. J'ai toujours les jambes fatiguées depuis que je suis en voyage.
Il faut : café à huit heures, sortir, à midi déjeuner, à six dîner, promenade, une heure où je m'ennuie, et opéra.

mercredi 7 avril 2010

Sacre de la femme

Journal parisien : pause.

Celle qui aura quelque chose de plus
que toutes les autres...

Il m'arrive, les soirs où la solitude est un bienfait qui survient après la cohue, de me demander en toute sincérité (du moins dans un effort qui s'y essaie) jusqu'où pourrait aller mon amour. Je sais qu'il peut n'être rien, et qu'il est si mince, parfois, qu'il consiste simplement à faire un bout de chemin, dans le lit ou ailleurs, avec "elle", à scruter sa personnalité, à en saisir un aspect, un seul, le meilleur ou le pire, puis à repartir d'un pas lourd. "Elle" n'était pas, comment dire? pas... adorable.
D'autre fois, il s'égale à un Tout, à un presque tout. Car quand la femme est extraordinaire, le choc l'est aussi. L'Absolu est en vue, il est le fond du fond, le haut du haut, l'immédiatement-là, le Grand Tangible. C'est alors que j'ai le vertige et non n'importe lequel. Que j'ai le sentiment (illusoire? Mais comment savoir?) que la Mort et la Femme en même temps m'enjôlent, confondues. Il me semble bien qu'avec la seconde je pourrais gravir toutes les marches du péril, tandis que la première me tend les bras sur l'ultime degré. Pire, j'ai le sentiment que je cesserais d'écrire, si d'aventure l'élue m'en priait.
[...]
Celle qui aura quelque chose de plus que toutes les autres qui elles-mêmes me semblaient si douées, ce sera peut-être une Parque moderne, une figuration de l'orgasme éternel en son parfum tragique. Je n'en vois guère le visage, et pourtant je sais qu'il suffit de l'avoir tenu entre ses mains et élevé vers l'Amour pour se sentir glisser doucement dans un monde d'où l'on ne revient plus.

Marcel Moreau, Sacre de la femme (p. 536-538), éditions Denoël, collection des heures durant...

mardi 6 avril 2010

Troisième jour

Samedi 27 mars.

(Je ris en mettant cette date, je pense à un blogueur inconnu qui ironise sur l'écriture d'un Journal; il n'a pas tort).

Donc, ce samedi, pfutt la migraine, partie, envolée! Matinée, idem le veille : un express rue Montorgueil puis je décide d'aller faire un tour sur les Grands Boulevards. Boulevard Saint-Denis, je suis étonnée de voir le nombre de très jeunes asiatiques - dès le matin - qui font le tapin. Plus loin je passe devant le REX : souvenirs de cette salle immense où, à l'époque, on pouvait fumer sans avoir l'impression d'être dans un nuage de fumée, l'air conditionné renouvelant l'air en permanence. Je crois me souvenir aussi d'un plafond comme un ciel de nuit étoilé mais je ne suis plus certaine que ce soit au REX. Ce dont je suis sûre c'est d'avoir vu, à l'entracte sur scène : les Grandes Eaux, je jure que c'est vrai. Je poursuis ma balade et décide d'aller à pieds jusqu'à Opéra. Près de la station de Métro un groupe d'individus se chamaillent et crient, un type a le visage en sang. Gratiné ce Boulevard. J'attends au feu pour traverser, le trottoir d'en face a l'air plus calme. Non, c'est pas vrai! A l'entrée d'une rue perpendiculaire au Boulevard j'aperçois un type accroupi qui... Mon Dieu quelle horreur. Vite je n'ai plus envie de rester sur ces Boulevards; çà n'arrive qu'à moi de voir des trucs horribles! Un bus arrive, direction Opéra, je le prends, d'ailleurs faut que je ménage mes gambettes, j'ai plein de choses à voir. Je m'extasie devant le Palais Garnier, c'est vraiment quand on vient à Paris en touriste que l'on voit la beauté de cette ville (bon, j'occulte le laid et les horreurs). Je commence à être fatiguée mais je pousse à pieds jusqu'à la rue Tronchet pour aller à la Carpe. J'adore cette caverne d'ali-baba! Et chouette j'ai trouvé un petit bec verseur anglais pour ma jolie théière en porcelaine (héritée de ma mère) dont j'ai cassé le bout du bec. Si je n'avais craint d'être trop chargée au retour j'aurais acheté une jolie bouilloire.

Je passe sur le déjeuner... sur le pouce!

Après-midi direction le Trocadéro, le Musée d'Art Moderne me tente. Je m'en tiens aux collections permanentes d'art contemporain. Je me régale. Je partirai bien sous le bras avec une tête sculptée de Fautrier! Là, les photos sont autorisées, sans flash, mais je me dis que sur Internet via Insecula je pourrais en avoir de plus belles. Bon, j'en ai quand même pris deux ou trois... Je descends au sous-sol voir Le théâtre d'ombres de Boltanski. Tout de même, ces collections permanentes que l'on peut voir gratuitement, quel privilège.

 Fautrier, Visage de jeune fille étonnée




Les oeuvres ne sont pas des objets autonomes
Les oeuvres ne sont pas des bibelots que l'on aligne
Les oeuvres ne sont pas fermées sur elles-mêmes
Les oeuvres ne sont jamais fixées
Les oeuvres sont toujours en devenir

François Matton, DE PIECES EN PIECES Chroniques sur des oeuvres nomades. Editions P.O.L.

Je passe à la cafétéria et m'assois en terrasse en contemplant la Seine, la Tour Eiffel, un bateau mouche passe. Entre les colonnes du Palais de Tokyo, Michaël Jackson me fait un clin d'oeil!



Soirée chez des amis près du Canal Saint-Martin. On ne s'étaient pas vus depuis 15 ans!!! Emotion de voir sur les murs quelques tableaux de mon Aimé. Ils veulent tout savoir de ma journée, de ma vie... depuis lui, sans lui...J.P. a vu que j'étais un peu fatiguée et m'a ramené en voiture dans le Marais. Ma nuit sera courte.
(Cliquer sur les photos pour agrandir)