vendredi 30 juillet 2010

C'est l'été... bon vent

J’ai suivi cette semaine les conférences de Michel Onfray rediffusées sur France Culture pendant l’été. Difficile aujourd'hui de parler de Michel Onfray et de Freud sans faire référence à la polémique sur son dernier ouvrage. Lire aussi ce billet d'un blogueur sur le sujet.
Pas tristes du tout ces quelques notes de Sigmund Freud, issues d'une des conférences.
Il nous dit :

« Une flamme c’est un phallus et il y a une homologie entre le jet d’urine sur le feu et l’acte sexuel avec un homme ».
« La miction c’est la jouissance de la puissance masculine, sans la compétition homosexuelle. Se retenir d’arroser le feu c’est la maîtriser, la maîtriser c’est la puissance » (sic).

Il dit encore :

Pourquoi est-on mélomane ? (Je vous le donne en mille ;o))
« Il y a des mélomanes parce qu’il y a des pétomanes ! »
C’est une correspondance du 26 juin 1931 avec Stefan Zweig (Michel Onfray a rectifié le lendemain qu’il s’agissait bien de Stefan et non d'Arnold Zweig comme il l’avait indiqué. Les deux eurent un lien d'amitié avec Sigmund Freud) qui nous le dit.
« J’ai remarqué en analysant plusieurs musiciens qu’ils avaient un intérêt particulier – et depuis l’enfance – pour les bruits que l’on produit avec les intestins. Est-ce une forte composante anale dans cette passion pour le monde sonore ?»
On sait qu’il a analysé Gustav Mahler en faisant une balade dans un jardin, deux ou trois heures dans une après-midi, et que Mahler s’en est trouvé probablement « allégé ».
Il y a une relation entre le fait d’aimer la musique et d’avoir été pétomane un jour.
« Pétomane un jour, pétomane toujours » dixit M. Onfray.

La suite ou le début de cette conférence à écouter ici.

Interpellée par le sujet (rires) j’ai trouvé le texte ci-dessous - que l’on peut lire entièrement ici - très intéressant :

Du pétomane au mélomane

De nombreux auteurs ont souligné l'importance de l'analité dans la genèse pulsionnelle de la musique, qui prendrait son origine dans le plaisir infantile du pet, comme Ferenczi (1922) a cru le déceler chez des musiciens ou mélomanes. Milner (1969) rapporte les démêlés de Suzanne, et Lecourt (1987) ceux de David, avec le pet. Après quoi, cet enfant autiste pourra se mêler de musique. Cependant cette connotation, anale d'une part, musicale d'autre part, du pet n'implique pas, en bonne logique, de lien direct, et surtout causal, entre musique et libido anale.
En fait, l'intérêt pour la musique pourrait avoir de bien étranges et plus anciennes racines. Nous trouvons dans l'expérience ante-natale de quoi nourrir notre réflexion à ce sujet : le foetus est l'auditeur obligé du concert sans cesse renouvelé des rythmes maternels, bruits respiratoires, cardiaques, mouvements de la marche ; il entend aussi une mélodie : celle des bruits intestinaux de sa mère (suintements, claquements, grincements, écoulements, etc.) qui évoquent pour nous, de toutes les manières, les sons du pet. Le caractère régressif de ces sons les rend très réactogènes, non seulement chez les tout-petits auxquels nous avons fait entendre des enregistrements intestinaux, mais aussi chez les adultes, tels ces apprentis musicothérapeutes de L'A.M.Bx qui en furent étonnés. Les anciens soulignaient cette proximité qui se redouble de celle de la parole en la personne d'Hermès (Mercure), tout à la fois dieu de la musique, des vents (!), de la parole et... de l'argent ! Aux bruissements intestinaux du plaisir, après les rugissements et les couinements de la détente en train d'advenir, répondent, chez le foetus qui les entend, l'inondation chimique qui l'excite et lui donne peut-être quelque genre d'orgasme avant la lettre ! Il retrouvera tout cela dans les ineffables gémissements ou les harmonies sublimes de la musique. Avec la demi-jouissance des sens qu'elle engendre à n'être pas compagne de réalités plus somatiques comme dans le " paradis " matriciel.

Le très intéressant film de Horatiu Malaele (Roumanie, 2008) "Au diable Staline, Vive les mariés" nous présente au cours du repas de Noces un des protagonistes incapable de contenir ses bruits intestinaux alors que toute la noce - y compris l'orchestre - s'impose la contrainte du silence pour éviter d'être repérée par les soviétiques. L'effet est saisissant et son comique réside pour beaucoup dans cette substitution inattendue à la musique interdite de cette musique inconvenante !


Je ne suis pas musicienne mais je suis… euh… mélomane. Non mais !

C'était : mon bon vent musical de l'été.

Una Furtiva Lagrima



Pavarotti : Donizetti, L'Elixir d'amour, Una Furtiva Lagrima
Dans cette aria Neronimo évoque cette simple larme qu'il a vue perler dans l'oeil d'Adina. Il comprend ainsi qu'elle l'aime, malgré ce qu'elle veut lui faire croire. La musique exprime avec fougue son bonheur lorsqu'il s'écrie : "Elle m'aime, oui, elle m'aime, j'en suis témoin". Mais Néronimo se reprend : "Ce serait merveilleux de mêler mes soupirs aux siens".

jeudi 29 juillet 2010

Un amour de solitude

Matinée remplie d'espoir.
Début d'après-midi, incertitudes.
Fin d'après-midi, certitudes.
Début de soirée, (des)espoir(s).

J'ai toujours préférer aimer que d'être aimée c'est sans doute pour cela que depuis toi mes amours sont si brèves, parce que, évidemment, il est impossible de continuer d'aimer sans être aimée en retour. Et je cherche, vainement, qui m'a vraiment aimée depuis toi. Si, il y en eut un que j'aimerai d'un amour éternel, pas comme toi puisque tu étais l'homme de ma vie, mais je le garderai dans mon coeur pour toujours, et il ne le sait pas; c'est même cela qui est beau. Il m'a aimée. Il m'a aimée. Il m'a aimée et peut-être m'aime-t-il encore. Ce fut un amour impossible, lui aussi. Bien sûr, depuis toi, ce ne furent que des amours impossibles, seulement des histoires d'amour, de désir. A chaque amour pourtant je m'investis totalement, en sachant que ce sera éphémère, qu'importe, je vis, je frémis, je vibre, je ne peux être amoureuse avec légèreté, insouciance. Je ne peux accepter le silence que lorsque je sais que je suis aimée. Et je préfère savoir que je ne suis pas aimée que de rester dans un silence rempli d'incertitudes.

Je ne peux vivre sans amour.

Je sais que je vieillis et que bientôt je serai transparente, que plus un homme ne posera son regard sur moi avec une étincelle dans les yeux, ils ne me verront plus. Je n'ai pas cette sagesse des femmes vieillissantes qui ont tiré un trait sur une vie amoureuse. Même sans amour, mes pensées seront toujours celles d'une amoureuse... en transit, jusqu'à la fin de ma vie, j'en suis sûre. Ce sera un amour de solitude;o) (je ris).

Je ne peux vivre sans amour.

Ce soir je n'attends plus, c'est une certitude, je ne suis pas aimée. Ce fut si bref que je n'ai pas eu le temps, d'être désespérée.

Qui n'en veut...

Hier midi! Je reçois des amis en vacances en Bretagne.

Je retire les morceaux de scotch pour ouvrir le papier-cadeau "maison". A l'intérieur l'objet est encore entouré d'un papier kraft.


Pas d'étiquette de magasin mais c'est sans importance, on peut dénicher de jolies choses dans les brocantes. Avant que je le découvre, elle me dit :
- C'est très moderne. Mais si tu n'aimes pas tu en feras cadeau.
Et lui rajoute en riant :
- Tu le vendras sur eBay s'il ne te plaît pas.
Je m'attendais au pire et ce fut pire que pire. Un vase immonde.


Que faire, que dire? Je n'ai pas pu sauter de joie. Faux-cul j'ai dit :
- Oh merci, je manque de vases. Mais je n'ai pu rien dire de plus.

Mais comment ose-t-on offrir un objet que l'on a soi-même reçu (c'était une évidence) avec une seule envie, ne plus l'avoir sous les yeux.

Ça c'est le truc que je n'oserai jamais faire. J'ai déjà refilé des cadeaux innommables à des ventes de charité, pour des tombolas ou des kermesses quand j'habitais à la campagne mais jamais je n'offrirai à des amis quelque chose que je n'aimerai pas. Je n'offre que ce j'aimerais que l'on m'offrît.

Celui-là, je l'ai posé sur mon meuble design, j'ai sorti le champagne pour fêter leur venue dans mon appartement qu'ils ne connaissaient pas - mais tout de même ils avaient vu des photos; cela faisait dix huit mois que nous ne nous étions pas revus. J'ai occulté le vase, j'étais contente de ces retrouvailles. Et hop dès qu'ils sont partis, je l'ai remis dans son papier kraft, il ira chez Emmaüs.

Il ne s'agit pas ici d'un manque de goût de leur part, je sais qu'ils en ont et, justement, c'est pire, un manque de délicatesse. Comme un coup de canif dans notre amitié.

Chaque année nous nous retrouvons avec plaisir, et l'année prochaine c'est sûr, ils ne verront pas leur vase. Je ne pense pas qu'ils me poseront de question, ils auront compris, j'en suis certaine.

mercredi 28 juillet 2010

Vertige

"Le vertige : ce n'est pas la peur de tomber, c'est le désir de tomber".
Jacques Darriulat (Philosophe)

Je suis sujette au vertige... aux vertiges... de toute sorte...

Le désir de tomber... dans ses bras?

mardi 27 juillet 2010

PSA

En Suisse j'aime (ou j'aimais) :
les montagnes
la Fondation Giannada à Martigny (Nicolas de Staël en ce moment)
les cinéastes de ma jeunesse (Claude Goretta, Michel Soutter, Alain Tanner)
le chocolat
le fendant
le restaurant Mövenpick (ses glaces et son incomparable boeuf) dont il y eut une réplique à Paris, à la Madeleine, mais aujourd'hui disparu. Il semblerait que le Mövenpick d'aujourd'hui rue Cendrier à Genève n'ait plus rien à voir avec celui que j'ai connu dans les années 80, hum!
le couteau
les montres (en plastique) bien connues
et aujourd'hui l'humour de ce Père Siffleur!
Un nouveau parti est né en Suisse : le Parti Suisse des Animaux;o).

Mon Dieu, tous ces souvenirs de la Suisse... j'enfonce le clou... de ma jeunesse là... et de ma futilité.

lundi 26 juillet 2010

Poursuivre? Arrêter?

J’aurai dû rester plus mystérieuse, ne pas me dévoiler mais c’est plus fort que moi, ce besoin de me dire, comme pour donner envie… de crever l’écran. Je crains avoir déclenché l'effet inverse.

Mais c’est bien pour moi que j’écris, alors, qu’importe ? Je vais poursuivre, encore un peu. Je m’étais fixé un objectif : 500 billets ou une année. Je vais peut-être miraculeusement faire coïncider les deux, j’en suis au 472ème et le premier fut écrit le 28 août 2009 !
J'ai un fidèle lecteur qui, à chaque billet, m’envoie trois mots, une phrase. Encourageant.
Je me dis qu’il faut faire un sacré effort pour m’écrire puisque je n’ai pas ouvert les commentaires.
C’est tellement plus simple de commenter un billet, cela ne demande aucun effort, juste un peu d’humour; c’est presque exigé de répondre avec humour, de ne pas s’investir personnellement.
S’investir personnellement dans un commentaire, quelle blague ou plutôt, quelle folie. Je suis folle !

Il fait un temps délicieux. Ce fut une journée formidable : qu’ai-je fait ? RIEN. Un rien exquis. J’avais pourtant programmé : ménage, courses. RIEN, je n’ai rien fait.

Allez, zou ! Crevons cet écran.


Je découvre à l’instant ce billet d’un blogueur (que je lis régulièrement) et ces quelques réflexions sur le « blog et l’expression du moi », assez justes.
(A lire en écoutant la musique, colonne de droite : Don Giovanni, ouverture).
C’est donc qu’il serait grand temps que j’arrête mon Je narcissique. Ça tombe pile-poil avec mes interrogations.

dimanche 25 juillet 2010

I feel Pretty

Samedi soir. Invitée à dîner, nous étions cinq à table. Il n’y a que sur les tables rondes que je ne me sens pas de trop, la cinquième roue du carrosse c’est moi. Je suis le nombre impair. Mais cela me procure une légèreté d’être, même pas insoutenable. Au contraire, comme une impression de liberté, aucune pression de nulle part. La soirée fut joyeuse et je rentrai sous une pluie fine dans la nuit me demandant si mes essuie-glaces étaient usés car je ne voyais rien, ou si ma vue baissait dangereusement la nuit. Je n’ai pas dépassé le 90 sur la voie à 110. Je suis arrivée tranquillement. Je me suis connectée avant d’aller me coucher en me disant que ce serait tellement plus doux de poser mes mains sur un visage plutôt que sur un bouton.

Dimanche après-midi. Dans ma voiture, encore. Mes pensées se bousculent. Je me demande si ce n’est pas le seul endroit où je me sens vraiment bien, le seul endroit ou je peux rire ou pleurer ou chanter, tout mon soûl, sans risquer que l’on me surprenne. D’ailleurs je chante : I feel Pretty ! Je suis gaie. Puis j’entends Jérôme Garcin sur France Culture parler des chevaux, de leur grâce ; il parle de Bartabas – que j’admire - faisant corps avec le cheval, de l’esthétique du cheval dans l’art et là je suis d’accord, cet animal de quelques 500 kilos est souvent représenté avec une légèreté aérienne. J’ai toujours aimé les chevaux, leur œil m’attire et je n’ai jamais eu peur de les caresser lorsque je me promenai dans la campagne. Ceux-là étaient des chevaux de trait, bien plus lourds mais tout aussi beaux.



Ce soir. Je dîne sur la terrasse, j’écoute Le Masque et la Plume.
Coup de fil, je décroche, il a une bonne voix, pourtant il va reprendre les séances de chimio, mais "seulement" deux jours par mois me dit-il. Cela le rassure de reprendre la chimio, c’est donc qu’il y a encore de l’espoir. Il s’accroche, se raccroche à la vie, même avec ses misères, ses nouvelles douleurs, il est content, content d’être là, et moi aussi. On raccroche et voilà que d’un seul coup je n’ai plus envie de chanter.

Il va falloir que je remonte dans ma voiture… pour pleurer, puis rire, puis chanter.

samedi 24 juillet 2010

Eros et Agapè

Eros cordant son arc, Musées du Capitole, Rome

Et l’amour continue d’être mon sujet favori, surtout en son absence.

J’ai donc tendu l’oreille ce matin en écoutant Répliques, l’émission de Alain Finkielkraut, dont le sujet était : Eros et Agapè. Les deux signifient l’Amour.
Eros et Agapè = Amour et Amour. Deux traditions, grecque et chrétienne habitent le même vocable. Platon ne sait rien d’Agapè mais Saint Paul ne sait rien de l’Eros. Il importe donc de savoir quand nous aimons ou quand nous invoquons l'amour, ce que nous devons à Platon et ce que nous devons à Saint Paul. (Personnellement, je m'en fiche un peu, je n'ai jamais pu aimer sans que le désir et l'esprit ne soit intimement liés, je suis donc pour l'éros agapique!)
Qu’est-ce qui se passe quand on a de l’amour pour quelqu’un, quand on a le cœur qui bat pour quelqu’un ? Est-ce qu’il y a de l’Agapè dans l’Eros ?
(Réécouter l’émission ici). Moi je dis oui ;o) ! Oh oui, que oui ho ho pour plagier Nizon ! Et ce n’est pas Vladimir Jankélévitch dans le Traité de la vertu (extrait ci-dessous) qui me contredira, quand il parle de l’amour-sentiment.

« Une fois au moins dans sa médiocre vie, l’homme le plus sec, tandis qu’il était amoureux, aura connu la grâce de vivre pour un autre, pour une femme. Aussi se rappelle-t-il avec une reconnaissance infinie, cette courte saison de sa jeunesse où il fut comme tous les amoureux, vrai et naturel, et désintéressé, où pendant quelques semaines au moins, il cessa d’aimer l’argent, oublia de revendiquer ses droits et d’éblouir la galerie, se révéla modeste et spontané, n’eut d’autre souci en ces jours bénis que le bonheur de quelqu’un, d’autre plaisir que les plaisirs d’un autre, se réjouissant de sa joie et souffrant de ses peines, craignant de sa crainte et espérant de son espoir.
Il n’est presque personne, même parmi les plus flétris et les plus déformés, qui ne soit momentanément redevenu simple et authentique pendant ces années, il n’est pas de bourgeoisie conventionnelle qui n’ait eu aussi sa minute d’innocence et, d’intensité passionnée. »


En ce 24 juillet, je me prépare mentalement à accepter le grand vide de l'été.

vendredi 23 juillet 2010

La fourrure de la truite

J’étais aussi un excellent marcheur, oh oui, que oui, ho ho, chantonnais-je en marchant pour revenir chez moi. En mon for intérieur je dis toujours « marcher », jamais « aller », ni « me promener, ni « me balader » : marcher, j’étais un marcheur, j’avais même été démarcheur, démarcheur de dépêches, je veux dire, à l’armée, quand j’étais estafette. Oh oui, que oui, ho ho, chantonnais-je, comme si j’étais joyeux et béatement satisfait de la marche des choses. Tout suit sa marche, voilà encore une de ces pensées magiques qu’il faudrait inscrire dans un cadre doré et suspendre dans une église, pour qu’on puisse s’agenouiller devant, ho oui, que oui, ho ho. Etais-je satisfait de la marche des choses ? La question n’est pas là, ce n’est nullement la question, chère Ghislaine, dis-je en pensée, et je levai doctement l’index, en pensée toujours, pour qu’elle m’écoute bien.
Page 93.
[…]
Où diriger mes pas ? pensai-je entre guillemets. La journée est encore jeune point d’exclamation, comme on dit dans mon pays. Jeune, la journée, à neuf heures quarante-cinq ? Voyons : elle dure exactement vingt quatre heures, en comptant la nuit. Elle commence à minuit, progresse plus ou moins invisiblement, car dans le noir jusqu’au lever du soleil, passent discrètement l’heure ou les employés entrent en masse au bureau et celle de l’ouverture des magasins. Oh que oui. Quant à dire si, à dix heures moins le quart, elle est jeune ou adolescente virgule c’est une question de goût. Sa jeunesse, c’est vrai, se mesure également d’après le niveau sonore. Pour l’instant celui-ci, rue Custine était plutôt bas, inférieur à la moyenne. Point d’exclamation. Ou points de suspension ?
Alors, où porter mes pas ? Tirer un trait sur le sentiment perdu et non retrouvé fut l’affaire d’un instant. Fini. Je m’engouffrai dans une impasse, tout en veillant bien à prendre l’air incognito, ce que je pouvais parfaitement faire, moi, sans fausse moustache.
Page 105.


Paul Nizon, La fourrure de la truite, éditions Acte Sud 2006.

J’ai beaucoup aimé ce livre de Paul Nizon, comme les précédents, et je dédie ces extraits au Vagabond, oh oui, que oui, ho ho, point d'exclamation. Bien sûr, il est insolent de ma part de les sortir ainsi de leur contexte mais pour mieux comprendre le narrateur, on peut écouter ici l'auteur parler de son livre.

jeudi 22 juillet 2010

Une leçon d'amour


Il y a cette scène magnifique, au début du film.
David est gynécologue, marié.
Suzanne une jeune femme, très brune, amoureuse de lui, mariée également, se présente à son cabinet.
Elle est très belle. Ce n'est pas elle sur la photo du DVD.

- Je dois vous faire un aveu : je ne suis pas venue pour une consultation, je vous observe depuis longtemps, je suis amoureuse de vous. (Elle lui saute au cou).
- Je fantasmais sur vous. (Il la repousse).
- Partez je vous en prie, je n’ai pas de temps à perdre.
- Ne me renvoyez pas.
- Il le faut, pour diverses raisons.
- Vous aimez votre femme ?
- Oui. Ca ne vous regarde pas. Partez maintenant. (Il la dirige vers la porte, l’ouvre, mais elle la referme).
- Vous ne l’aimez pas. (Elle le regarde intensément, elle est désirable).
- Madame Vérin vous êtes charmante, on peut même dire que vous êtes séduisante. Je suis touché par vos attentions. Quel homme ne le serait pas ? Mais je suis aussi ennuyeux que votre mari. J’ai certains principes sur le mariage et la fidélité… (Elle baisse les yeux, elle est troublante)… et ainsi de suite, rajoute-t-il.
- Vous êtes adorable quand vous me grondez.
- J’ai une femme extrêmement séduisante, que j’aime depuis… voyons 15… 16 ans en octobre. Je ne lui ai jamais été infidèle. (Il s’est penché vers elle, leurs visages se touchent presque).
- Comment s’appelle la jeune femme qui s’était amarrée à votre jetée ? (Il se redresse, gêné).
- C’est une amie de ma femme.
- Vraiment ? Vous n’avez pas tenté de l’embrasser quand votre femme était partie ?
- Cà alors !
- J’ai pleuré toute la nuit.
- Pas de larmes ici. (Il ouvre la porte, elle la referme et se jette à son cou, elle l’enserre. Elle est si belle, pulpeuse, il ne peut que succomber mais il résiste).
- Vous allez m’embrasser, ensuite je partirai. (Il commence à s’émouvoir).
- Je n’ai pas envie de vous embrasser.
- Quel menteur vous faites, vous en mourez d’envie, et ce n’est pas tout… (Elle le serre de plus près).
- C’est complètement ridicule jeune dame. (Il serre le haut de son bras nu, sa chair le trouble, leurs visages s’effleurent, il se détache brutalement, troublé, nerveux, retourne vers son bureau).
- Je proteste avec véhémence dit-il. (Elle rit)
- Tel un porte-paroles des Nations Unies ?
- Il y va de ma vie.
- Je suis si dangereuse ? (Elle s’avance vers lui, altière et sûre de son pouvoir de séduction. Il commence à sourire).
- Si j’avais une aventure avec vous, quels terribles événements résulteraient-ils d’un petit instant d’égarement ? (Elle s’installe à genoux sur un fauteuil)
- Personne ne le saura. (Elle est sérieuse et tragique soudain). (Et lui en rajoute se sentant prêt à lâcher prise).
- Je préfère ma petite vie avec ses tracas et ses petites joies ; je préfère mes pantoufles et l’indifférence d’un bon feu de bois au parfum de votre corps, un tout autre genre de feu, très dangereux et qui va contre toutes les notions de décence. Et de plus, qui ne mène absolument à rien. (Le regard de la jeune femme devient douloureux). En lui caressant la joue il lui dit :
- Partez Suzanne. (Il ne l’appelle plus Madame Vérin !). (Elle appuie son visage sur la main qui la caresse).
- Vous m’aimez.
- Non je ne vous aime pas. Mais je veux vous toucher, sentir votre feu consumer mon ennui. Je veux que vous dissipiez la grisaille qui m’a envahi et que je ne parviens pas à chasser. (Elle ferme les yeux, elle l’écoute, apaisée, offerte). Il poursuit :
- N’était-ce pas banal, idiot, bête et ridicule ?
Et il se penche vers elle et la prend dans un baiser foudroyant.


Cette scène est d’une sensualité torride. Elle n’est pas le sujet du film qui est, pour David, de tenter de reconquérir sa femme Marianne qui l’a quitté pour Carl-Adam. C’est une comédie légère, une sorte de jeu de l’amour et du hasard qui n’est pas vraiment dans le registre des films de Bergman mais qui est très agréable à regarder.

UNE LECON D’AMOUR de Ingmar Bergman.
Sur la couverture de ce DVD, Marianne (Eva Dahlbeck)et David (Gunnar Björnstrand).
Je n’ai trouvé aucune photo de Yvonne Lombard (Suzanne)


mercredi 21 juillet 2010

Eblouissement? Aveuglement!




J'ai cru vous voir ce soir dans les nuages mes êtres chéris.
Sans doute un éblouissement, j'étais aveuglée à vouloir regarder le soleil en face.

J'ai dû attendre qu'il se cache derrière les nuages... et je n'ai plus rien vu.

Je me la pète un peu


Souvenir d'avoir fait ce parcours en 1986 avec Franck Riboud et un de ses amis dont j'ai oublié le nom. Je pris le départ au n°1 seule, ils m'avaient devancée d'un trou et arrivée au n° 3, je les talonnai un peu; ils étaient en voiturette électrique. Ils me firent signe de passer et lorsque je les rejoignis me proposèrent de jouer avec eux et se présentèrent. A cette époque-là, je ne savais que vaguement qui était la famille Riboud, seulement que Antoine, le père de Franck, était le PDG de Danone et de différents complexes de la station thermale (je lisais régulièrement les pages saumon du Figaro pour mon boss). Franck fut très simple, voire galant car il me proposa de tirer mon chariot et de profiter de la voiturette! Je ne refusai pas, le parcours étant vallonné et assez fatigant. Ils me posèrent quelques questions sur mon séjour et s'étonnèrent que je puisse venir à Evian, seule, passer des vacances, cela les faisait gentiment rire. Je ne m'étendis pas sur les circonstances qui m'amenèrent à venir en ce lieu, en septembre 1986, trois mois après ton décès. Je lui demandais des nouvelles de son oncle Marc Riboud, le photographe, que j'admirai. Ils n'allèrent pas jusqu'à m'offrir un verre au club house après la partie tout de même. Je les remerciai vivement de leur fair-play et rejoignis ma petite Super 5 noire sur le parking, qui faisait un peu tâche parmi les automobiles d'un tout autre acabit! Cependant je n'avais aucun complexe, tu m'avais appris à me moquer de tout cela.

Mais cet épisode reste un souvenir assez incroyable quand j'y repense aujourd'hui.

L'Evian Masters débute demain, sponsorisé entre autres par ROLEX, ah ah ah! La favorite est la japonaise Ai Miyazato.

Et pour rester dans l'art des japonais, cette fois pictural, voir ici l'étonnante composition de Utagawa Kuniyoshi.

***

"Les antalgiques (médicaments anti-douleur) contenant du DXP (dextropropoxyphène), à l'instar du Di-Antalvic, ne seront plus commercialisés en France d'ici quinze mois, a annoncé mardi l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) dans un communiqué. L'Afssaps avait prévu dès le mois de juin dernier de retirer progressivement la molécule opiacée du marché, avant le retrait définitif préconisé par l'agence européenne du médicament (EMEA)."



Youpi! Quinze mois de répit.

***

Et si le bonheur de la journée c'était, voir le ciel se dégager en prenant son petit déjeuner dehors, en contemplant la ronde des oiseaux au-dessus de la rivière.

***

Et si le plus grand moment de désespoir c'était, se réveiller en pleurant.

mardi 20 juillet 2010

Certitudes? Espoir!

Greta Garbo et Eroll Flynn





Photos de Doisneau


Un baiser s'il vous plaît.


Il n'y a pas d'amour de vivre sans désespoir de vivre.
Albert Camus.

lundi 19 juillet 2010

Doutes


Ciel du matin, chagrin.

Le ciel est, par-dessus le toit...

Le ciel est, par-dessus le toit,
Si bleu, si calme !
Un arbre, par-dessus le toit,
Berce sa palme.

La cloche, dans le ciel qu'on voit,
Doucement tinte.
Un oiseau sur l'arbre qu'on voit
Chante sa plainte.

Mon Dieu, mon Dieu, la vie est là,
Simple et tranquille.
Cette paisible rumeur-là
Vient de la ville.

--Qu'as-tu fait, ô toi que voilà
Pleurant sans cesse,
Dis, qu'as-tu fait, toi que voilà,
De ta jeunesse ?

Paul VERLAINE, Sagesse (1881)

Ciel du soir, désespoir.



Ciel de la nuit...?

dimanche 18 juillet 2010

Le zérokini



La ville est en fête. Balade ce matin le long des quais, en musique, binious et cornemuses pour enchanter les touristes mais pour ma part, je préfère d’autres instruments plus doux pour mes oreilles, ingrate payse que je suis.
J’apprécie les endroits plus calmes comme cette petite venelle, les ponts fleuris.



Un dimanche après-midi comme je les aime, à ne rien faire, juste rêvasser, somnoler et lire un peu, en commençant par La fourrure de la truite, de Paul Nizon :

« J’avais donc été élevé au rang de fiancé et, à ce titre, de quasi-Sud-Américain, il allait donc de soi que Carmen prit mon bras quand nous partîmes. Tout naturellement, nous allâmes chez elle. Et là, nous nous aimâmes. En levant le camp je pensai, Ce n’est pas seulement une question de faim à assouvir : celui qui reste longtemps exclu du circuit sexuel tombe hors du monde. Le désir inassouvi amène à diaboliser le sexe féminin. A l’inverse, le regard de l’homme qui sort des bras d’une femme est le plus philanthropique qui soit. Amen. Voilà à quoi je pensais sur le chemin du retour. » Pages 45-46.
(Et moi je souris en lisant ça.)
« Et la fourrure de la truite ? Etait-ce le legs de ma prétendue tante ? Son message ? Oui, la truite n’est pas seulement l’être le plus glissant que jeconnaisse, mais aussi le plus brillant, surtout quand elle saute. Non, Carmen ne pouvait nullement être appelée ma truite. La truite est le plus insaisissable, le plus fuyant , le plus exposé, le plus vulnérable, le plus trompeur et espiègle, le plus beau des êtres d’argent, c’est de l’argent liquide à proprement parler. Je commence à comprendre qu’on puisse éprouver le besoin de le recueillir dans un manteau de fourrure, dans une peau de bête, et de l’y réchauffer. » Pages 51-52.


Puis j’ai poursuivi par le Philosophie Magazine de juillet-août, quelques articles à lire les doigts de pieds en éventail ;o) sur une chaise longue :

.L’IPAD, ou la tentation du superflux ! Liberté ultime ou servitude volontaire ?

. L’HONNEUR DE DURER – Au fil des âges : " Est-ce que vieillir est une performance ? Durer dans un monde qui change, accepter la déchéance physique dans un univers jeuniste, supporter les épreuves non négociables que sont la maladie et la solitude, attendre sa fin quand l’infini semble promis… Ce n’est pas rien. "

. DEMAIN, ON ENLEVE LE BAS ? Il y eut le bikini, il ne provoqua pas de scandale, il était conforme aux règles qui édictaient ce qu’on pouvait montrer et ce que l’on devait cacher dans les lieux publics.
Puis vint le monokini : " un presque rien de tissu devenu le symbole de la déchirure que la modernité a introduite dans nos mœurs." Celui-ci au contraire du bikini mis la mode hors la loi.
Le monokini dont l’usage s’est banalisé est-il encore érotique ? Le monokini a désexualisé la nudité pour qu’elle puisse être tolérée dans l’espace public.
« Pour prendre le monokini au sérieux il faut s’intéresser à ce qu’il cache et non à ce qu’il montre. C’est la condition d’une philosophie politique de ce petit habit."
A quand le zérokini ?
(Il y a une belle photo en noir et blanc d'une pin-up en monokini par le photographe Steeve Iuncker)

Puis un dossier intitulé
. PEUT-ON CHANGER DE VIE ? avec quelques témoignages intéressants, j’ai particulièrement été touchée par celui de Nicolas Henry, ex-alcoolique, sauvé par Nietzsche.

Bref, je n’ai pas eu le temps de lire le dossier auteur : Le marquis de Sade, certainement passionnant. Disons qu’après le bi-mono-zéro-kini je me suis mise à rêvasser, à somnoler à l’ombre de mon parasol en pensant à tous les pékins qui devaient griller sur la côte d’azur sur un mètre carré de serviette et je me suis dit : quel pied d’être ici. Puis à la réflexion j’ai pensé : c’est peut-être cela aussi vieillir, ne plus supporter la promiscuité ?


Non monsieur, vous ne pourrez pas acheter de CD aujourd'hui!

samedi 17 juillet 2010

Un si beau sourire

Pincement au coeur ce matin en apprenant sa mort.
J'admirais sa force pour appréhender son cancer. A chaque apparition à la télévision, je cherchais le détail sur son visage, dans son regard qui pouvait me faire dire : courage, tu remontes la pente, je sens que tu tiens le bon bout, tu vas vaincre... Oui, je le tutoyais. Une nuit j'ai même rêvé de lui, enfin, je ne savais plus si c'était lui ou... toi... Tu es toujours en vie, tu tiens le bon bout!

10 h. Le plombier s'affaire pour réparer ma chasse d'eau!
12 h. La nouvelle tombe, Bernard Giraudeau... mon coeur se serre.
15 h. Artillerie lourde pour configurer mon nouveau PC, un informatitien au top!
18 h. Je le teste. Je tâtonne. Je lui parle, c'est ma plante, pourvu qu'il ne plante pas!
21 h. J'écoute Bernard Giraudeau, retransmission d'une lecture faite au Théâtre de l'Odéon en octobre 2009. France Culture lui rend hommage.

vendredi 16 juillet 2010

Je branche le son

Je reviens sur ce que j'ai dit ce matin. Deux amis - que je remercie - se sont inquiétés à mon sujet. Ce qui fait vraiment défaut dans l'écrit c'est qu'on n'a pas le son, le ton pour bien comprendre ce qu'a voulu dire l'auteur. Combien de fois ai-je déjà écrit cela dans les blogs ou mes correspondances par mails avec mes amis.
Je peux écrire sur des sujets sérieux, voire mélancoliques qui, si je les lisais à voix haute ne seraient point tristes. Exemple :

Alors, ce billet : Ecrire, pour ne pas mourir, vous semble-t-il toujours inquiétant? Ma voix est-elle triste? J'espère vous avoir convaincu, que... je n'ai pas envie de mourir;o)

(Je ris en m'écoutant, je ne reconnais pas ma voix, à la réécoute, je la trouve un brin précieuse..., le trac peut-être?).

Ecrire, pour ne pas mourir

Je lisais ce matin quelque part : "... je réapprends à parler...".
Ecrire est-ce parler?
Si oui, il est temps pour moi d'apprendre à me taire.
Mais alors si je n'écris plus et que, ne pas parler (sauf à moi-même et parfois à voix haute pour vérifier que celle-ci a un encore un son) est mon quotidien, je vais mourir, lentement, mais sûrement.

Mais il y a aussi : dessiner, peindre pour ne pas mourir et parfois c'est très beau!

jeudi 15 juillet 2010

Harold et Maude


J'ai emprunté ce matin à la médiathèque un DVD.
Je viens de revoir Harold et Maude.
Je devais avoir vingt ans quand je l'ai vu pour la première fois, au Quartier Latin. Je me souviens d'avoir trouvé cette histoire merveilleuse, croyant ferme qu'elle pouvait être vraie.
Je pensais en le revoyant ce soir, ne plus y croire. Disons qu'elle me fait rêver. Mais n'est pas Maude qui veut. Elle est si pétillante, si vivante, si jeune.
C'est un film fou, d'une tendresse inouïe. Harold est absurde à la Beckett, magnifique!
Un amour auquel on a envie de croire.
Et la musique de Cat Stevens, j'adore cette musique, je l'avais oubliée... mes années 70... ma jeunesse revenue ce soir.
La morale bourgeoise ne tient pas la route contre la folie de Maude.
Beaucoup de gaîté dans ce film qui rend la fin encore plus douloureuse. Après qu'elle eût pris ce qu'il fallait pour mourir, le jour de ses 80 ans et qu'elle l'annonce à Harold, celui-ci reste hébété. Mais je vous aime lui dit-il. Elle le regarde tendrement et lui caresse la joue en lui disant :
Va Harold, et aime encore.
C'est donc une très belle fin. Celle que je voudrai; je ne parle pas d'être aimée mais juste pouvoir choisir de partir, le moment venu, avant qu'il ne soit trop tard.
Je ne veux pas mourir tout de suite, je veux vieillir comme Maude, sans morale, pleine de folie : sentir la terre et regarder les étoiles... et aimer...

Y a-t-il un pilote pour driver mon PC?

10 h 30. Boutique France Télécom/Orange : Bonjour, j'ai acheté un nouvel ordinateur et le CD d'installation ne fonctionne pas pour Windows 7! J'ai un modem vieille génération.
Il sourit, va chercher un CD, revient et me dit : voilà, ça devrait marcher.
Merci.

12 h. Je m'installe pour exécuter la configuration Orange avec le nouveau CD, piaffant déjà à l'idée d'envoyer des mails avec mon nouveau PC... enfin!
Je suis les instructions à la lettre : modems... autres modems, ouf le mien est là, je clique sur Windows 7 et hop, stop, ça coince! Une fenêtre s'ouvre :

"Utilisateurs avancés : les pilotes de ce modem se trouvent dans le répertoire Drivers de ce CD Rom. Vous devez procéder à une configuration manuelle. Cliquer sur Quitter pour fermer cette application ou sur Retour pour continuer."

B..del de m.rde! Oui maman, je sais, tu n'aimes pas quand je jure.
Je tente Retour, rien. J'éjecte le CD et le remets. Je recommence, idem, je clique sur Continuer, que dalle!
Au secours! J'éjecte, je rugis, je respire un bon coup et je ferme l'ordinateur.

13 h. Déjeuner frugal. Vais-je attendre que mon beau-frère vienne m'aider? Donc pas tout de suite...?

14 h. Grosse averse, vent fou. Un temps à faire du repassage. Ben oui, la vie ce n'est pas que de la poésie et puis, ça va détendre les bretelles d'autoroutes qui commencent à s'emmêler les pinceaux dans mon cerveau.

15 h. J'ai laissé tomber le repassage, il ne pleut plus. Me voilà de nouveau dans la boutique F.T./Orange. Une queue pas possible. Mais qu'est-ce qu'ils ont tous à acheter des nouveaux téléphones? Fait une chaleur là-dedans! Quinze bonnes minutes plus tard, youpi c'est mon tour. Pas le même vendeur que ce matin, je réexplique et je lui dis : ça ne marche pas non plus avec ce CD... et patati et patata et je ne sais pas faire de configuration manuelle.
- Il le faudra pourtant me dit-il!
Il sort un classeur, fait une photocopie d'un feuillet et marque au stabilo la partie que je vais devoir suivre pour configurer. Je sors mes lunettes, c'est minuscule et je lis qu'il faut avoir l'éthernet ou un truc comme ça.
- Mais je n'ai pas Ethernet!!! J'ai un modem USB S. F. 800.
- Alors vous ne pourrez pas l'installer me dit-il, il vous faut une Livebox pour Windows 7.
Petite envie de pleurer là. Bon, je ne montre pas mon désarroi, je souris, je lui dis OK, je vais voir avec mon beau-frère.

16 h. Allo? c'est moi aaaarrrrgggrrr schpppllliiiiggg bref, peux-tu venir demain matin, le CD ne marche pas et il me faut la Boîte Directe;o), hum! Tu m'as dit que t'en avais une en réserve pour tester.
OK, je viens à 11h.
Le pauvre, il est en vacances et je n'arrête pas de l'embêter.

Livebox... je crois qu'il est temps de changer tout ça et que je prenne aussi le wi-fi. (Je lis sur Google, wi-fi : les informaticiens le mette au masculin et les non-initiés au féminin). Non mais!

Et après, ce n'est pas tout, faut encore effectuer une réinstallation du système sur des CD, je n'y comprends rien.

Ils se moquent de moi tout de même : "les pilotes de ce modem se trouvent dans le répertoire Drivers de ce CD Rom".

Je veux un pilote automatique dans mon PC!

***

Rafraîchissant!

mercredi 14 juillet 2010

Vie privée danger

Je me demande si je n'en dis pas trop finalement. Et je connais la réponse : si! D'accord je ne suis qu'un JE ici mais c'est une plaisanterie de croire que je suis une anonyme. Tout se sait sur la toile. Il suffit de taper un nom et un prénom pour tout savoir sur untel, s'il fait partie d'un réseau, etc. Idem avec une adresse mail. Il suffit de laisser un commentaire sur un blog et vous voilà fiché avec une adresse IP. Les données personnelles ne sont pas protégées. C'est terrible et un peu inquiétant tout de même.

Je viens d'écouter Du grain à moudre et Jean-Marc Manach parler de son livre :
La vie privée un problème de vieux con? (avec un point d'interrogation dans le titre). Le titre me fait rire, tellement il me parle. J'ai dans mon entourage des "vieux cons" si j'ose dire qui, bien sûr n'ont pas d'ordinateur ni d'accès à Internet et bien évidemment pour eux, ce mot Internet, c'est le diable en personne . Néanmoins, il semblerait qu'aujourd'hui il n'y ait pas que les vieux cons qui commencent à prendre conscience du danger des données personnelles non protégées, mais aussi les jeunes cons.

Alors pour rester dans l'intime :

12 h. Mail : boum boum badaboum.

15 h. Petite revue de presse. Un peu d'humour (Wolinski, JDD):

15 h 30. Sieste. Non mais, c'est crevant le 14 juillet!
16 h 30. Bol d'air, ça souffle, grande marée, fort coëfficient, même l'Odet est en zone de turbulences. J'ai eu le droit à la newsletter de la mairie! Bouh! Ce ne sont pas des inondations, même si l'heure est aux débordements de toutes sortes et qu'une tempête souffle sur l'Elysée!
17 h 30. Lecture : La fourrure de la truite, Paul Nizon.
"J'avais déposé mes bagages, valise et sacs, dans l'appartement de ma tante. Ils semblaient se serrer les uns contre les autres comme de pauvres réfugiés. L'appartement dans sa bavarde intimité, et mes bagages comme un ramassis de désarroi au milieu de l'ordre pathétique des meubles et des objets qui, tous, parlaient de ma défunte tante. [...] Les bagages, image de l'épuisement. Le jour baissait derrière la fenêtre. Il me semblait que la lumière déclinait par à-coups, et je me pris à penser : Et si ce n''était pas le jour, mais ma vue qui baissait? Déjà je me voyais, les mains tendues, tâtonner vers la sortie et, dehors, fourrager dans l'air à la recherche de la rampe. Et appeler à l'aide".
Le ton est donné dès la première page, c'est du Nizon, à suivre.
18 h 20. J'écoute donc Du grain à moudre.
Et puis il y eut quelques moments joyeux dans cette journée, les seuls qui m'aient donné... du grain à moudre?

mardi 13 juillet 2010

Balade à Douarnenez




Petite balade en juin sur les traces de... Georges Perros. Je me demandais ce que penserait Georges Perros de voir un bateau de plaisance avec le nom de ses Poèmes bleus.
Poèmes Bleus
Mais après avoir lu les quelques mots du skipper (un chirurgien), c'est un bel hommage qu'il rend à l'écrivain-poète.
Une autre "barque" me vient à l'esprit qui agréerait j'en suis sûre à Georges Perros.
 Un vrai "poème bleu" de Jàc Plassan

Huilesur carton, Jàc Plassan

La mer est jeune, quel âge a-t-elle
Elle est ce mur horizontal
Où s'appuyer quand rien ne va
Et rien ne va plus trop souvent
Cette béquille infatigable
Qui n'en finit pas de jeter
Sa parabole au fond des sables
Dans le coeur mat d'un coquillage
On l'entend encore chanter.

[...]

J'allais une fois encore vers cette Bretagne
Qui m'a très jeune fasciné
Qui m'est aimant quand j'en suis loin
Qui m'est douleur quand de trop près
J'en subis la loi inflexible
De pierres de ciels d'horizons.
Les hommes partout se ressemblent
Les lieux n'y pourront jamais rien
Les lieux ne nous donnent à vivre
Qu'avec parcimonie
Pour renouveler le bail, le contrat qui nous lie
A nos frères, puisqu'il paraît.

"La solitude tenue n'est ni un exploit, ni un retrait.
C'est un plaisir, comme l'incognito.
Rien ne prouve que le plaisir soit un phénomène heureux."

Papiers collés 1, p. 207.

"L'incognito - n'être vu que par Dieu - ne fait jamais qu'accuser notre dérision."
Papiers collés 2, p. 211.

"Georges Perros est mort en 1978 à Douarnenez. C'est dans ce port du Finistère, à l'entrée du Cap Sizun où la pointe du Raz est l'extrême du continent, qu'il avait choisi de vivre. Loin du Paris des intrigues littéraires, loin du théâtre où il avait fait un début, loin de ses amis. Il vivait là dans un immeuble populaire, avec une femme, trois enfants, un chien, une pipe et une moto. Il travaillait dans des chambres de circonstances empruntées à des maisons proches de la démolition. Il fréquentait les bistros du port. Il lisait beaucoup, pour la richesse des livres bien sûr, pour quelque rémunération aussi en dépouillant des manuscrits mornes. Il écrivait. Des poèmes rarement, deux livres : Poèmes bleus et Une vie ordinaire. Des notes qui finissaient par faire des livres, trois tomes de Papiers collés. A Douarnenez, c'était M. Poulot, ainsi nommé à l'état-civil. Perros était son nom de plume. On ne savait guère qui il était. C'était un homme de mansarde. Il se blotissait sous les toits pour écrire "en chien de fusil"**, sous le ciel, au hasard des locations. "Mansarde. Cabine. Je campe. La terre tourne.""**
Gilles Plazy, L'incognito de Douarnenez.*

C'est le coeur plein d'émotions que j'ai parcouru le port et la ville, sous un ciel d'azur.

J'ai cherché des nuages où j'aurai pu voir dessiné ton visage mais le ciel était d'un bleu insolent. Je pensais aussi à un ami douarneniste, poète, mort en août 2009, Yan Balinec, à Anita Conti, la dame de la mer et à bien d'autres encore. Douarnenez a inspiré des peintres, des poètes. Je me suis arrêtée dans cette boutique, une petite folie, véritable caverne d'Ali Baba...



Boutique à découvrir absolument si l'on passe à Douarnenez. Une affichette à l'intérieur indique l'interdiction formelle de photographier, ce n'est pas un musée, précise la patronne sur un ton qui fout les j'tons. Entendez par là qu'il vaut mieux ressortir avec un souvenir. Je me suis un peu planquée pour photographier l'extérieur!

* Le livre de Gilles Plazy, L'Incognito de Douarnenez (Georges Perros) a été publié en 1999, aux éditions du Scroff.
** Papiers collés 3, p. 190.
** Papiers collés 3, p. 201.
Il eut aussi une belle correspondance avec Jean Paulhan.

***

Le 11 septembre 1985.

15h45 (au bureau).

Mon Amour,

Je viens de t’appeler deux fois de suite, énervée, stressée, voire même plutôt méchamment et pourtant je voudrai tellement être douce, calme, gentille et plus compréhensive avec toi. J’ai envie de t’appeler sans arrêt, d’entendre le son de ta voix ; tu me manques tellement. Tu es ma vie, et le poids que j’ai perdu c’est la partie de toi qui est trop loin de moi.

lundi 12 juillet 2010

Bourdon butineur




Je prenais tranquillement mon ptit déj et je le vois tournoyer au-dessus des pivoines. J'ai déclenché un peu trop tard, je ne me balade tout de même pas avec mon appareil de photo dans mon peignoir!

Mais si je vous assure, il est au coeur de cette fleur!


Bon, la photographe peut aller se rhabiller et finir son ptit déj, parce que franchement les photos sont un peu ratées et n'ont rien à voir avec le merveilleux de la réalité.

Hop! Le voici qui passe dans l'autre pivoine.
Miam, ça a l'air vachement bon là-dedans.

dimanche 11 juillet 2010

Swing Swing


Réagir à chaud n'est jamais bon mais je n'ai jamais pu différer mes émois.
Il est 11 h 20 et je viens d'arrêter de respirer.

Vertiges.
Incompréhension.
Palpitations.
Hypertension.

J'ai cru que... mais si je me trompais?
Pourquoi suis-je si à fleur de peau?
Ne pas rester devant cet écran, il faut que mon coeur cesse son affolement.

Je pars faire les 9 trous sur mon petit golf.
Pas un chat sur le parcours à l'heure du déjeuner, c'est superbe; ils ont arrosé les greens et les avant-greens Il fait lourd. Je sais que ce n'est pas la bonne heure. Mais je m'en ficherais de crever sur place d'inanition.
Dès que je frappe dans la balle, j'oublie tout, l'espace de quelques secondes. Puis, je reprends ma marche jusqu'au prochain coup et là, j'ai des vertiges, ma vue se trouble, je regarde le ciel (encore et toujours) et je parle à mon coach, là haut! Mais il ne m'entend plus. J'ai de la glycérine aux mirettes. Je souffle j'inspire, je respire amplement pour retrouver mes esprits. Je culpabilise, à mort, amor. C'est de ma faute, ça ne peut être que de ma faute. Je n'avais pas le droit d'exprimer mes sentiments. D'ailleurs, je n'ai plus le droit d'aimer. Je suis trop vieille.

J'ai fait trois fois 9 trous, j'ai bu un litre et demi d'eau, j'ai mangé trois abricots secs, je rentre les jambes coupées mais la tête un peu lavée.



Swing Swing!
(Vidéo de Valérie)



14 h 30. Je n'ai pas faim, il faut que je mange quelque chose.
Je sors le melon (d'Espagne) du frigo. SWING! Je souris.



Je le vide.
Je me dis que ce serait chouette de pouvoir faire la même chose dans mon cerveau
avec une cuillère.



Je le goutte. Il est bon, c'est rempli de flotte,
c'est excellent.



Je l'ai fini.




15 h 30. Je lis un mail. Trois mots suffisent à me redonner vie et le sourire. Je me suis trompée.
Ce n'est pas ma faute. Mais pourquoi suis-je ainsi, si folle, si excessive. Je déteste les drames, j'aime tant rire. Ce matin en écoutant Maison d'étude sur France Culture (j'étais plutôt de bonne humeur en me levant) je note ce proverbe :
"Je ne sais pas d'où je viens, je ne sais pas où je vais, je m'étonne que je sois si gai".
En effet, il y a de quoi s'étonner me suis-je dit en riant.

17 h. Je ferme Chien de Paul Nizon. Je l'ai fini. Magnifique.

21 h. Depuis trois jours j'ai peu dormi. Je ne suis pas triste, je me le suis promis. J'ai terriblement culpabilisé et de quoi, je n'ai rien fait... simplement de penser que je puisse faire du mal, porter préjudice à un être cher. Je suis prête à disparaître pour que cet être soit apaisé.

Je le coupe en deux, je remets une moitié au frigo.

Mektoub


J'ai déposé cette fleur pour toi dans le ciel...


... et pour lui dans ces nuages, je dépose un baiser.


Non, en regardant le ciel je n'étais pas mélancolique, je sentais cette énergie que tu m'as toujours insufflée quand j'en avais besoin.
Et là hier soir, en regardant le ciel j'ai senti cette chaleur me pénétrer.
La tienne et la sienne.
J'ai compris alors que je ne devais plus être triste, que dans la vie, quoi que l'on fasse, tout est écrit : Mektoub!

samedi 10 juillet 2010

L'escalier

Ai rêvé que ma voiture avait pété une durite! et qu'il me fallait absolument en acheter une autre avec les options intégrées!
Je crois que j'ai confondu dans mon rêve, voiture et ordinateur; j'avais la tête pleine de PC et de Mac en me couchant!



J'ai déconnecté ce matin, n'en pouvant plus de surfer sur les sites de comparatifs de marques. J'ai le cerveau lent quand il s'agit de prendre des décisions rapides, mon cerveau (lent) n'est efficace que les jours de grand vent!

Aussi, ce soir, je me laisse aller.
Il n'y a qu'ici que je peux me laisser aller... à pleurer. Et ce n'est pas pour un ordinateur.


"Les escaliers, montées, descentes, cavalcades, trains, etc sont le symbole des rapports amoureux.
[..]
Tout ce qui est élevé est symbole de désir et d'espoir."


Cette nuit, je veux rêver d'un escalier.

La vie, la mort, la solitude... les sentiments

"On vit, on meurt de solitude. C'est pour cela que je fais du théâtre, pour briser cette solitude."

"Les sentiments nous poussent à demander à la raison d'être claire".


Laurent Terzieff.

A réécouter sur France Culture ce mois-ci.

vendredi 9 juillet 2010

Je ne sais plus...

Il faudra me décapiter pour arriver à l'oublier.

*_*

Passé l'après-midi à chercher un nouvel ordinateur.
Que les Mac sont beaux! Le "piqué" de l'image sur l'écran est exceptionnel.
J'étais partie pour acheter un PC. Je n'ai rien acheté.


En attendant, ce soir j'ai la tête comme une pastèque!

jeudi 8 juillet 2010

Jours heureux

21 h. J'ai dîné seule ce soir sur ma terrasse encore chaude du soleil de la journée et face à moi la chaise était vide. Mon jeune ami nantais est reparti.
Hier nous fîmes le matin une belle promenade dans les rues du vieux Quimper. J'ai même découvert avec lui, un endroit plein de charme que je ne connaissais pas; un instant nous n'étions plus dans le brouhaha de la ville mais dans le calme d'un lieu qui pût être la place d'un village provençal à l'ombre des platanes. Le silence était extraordinaire. Puis nous sommes redescendus sur terre, et dans le monde des humains pour prendre un café. A midi nous dûmes nous boucher les oreilles : les sirènes nous rappelant que nous étions le premier mercredi du mois. Tonitruantes!
Nous rentrâmes tranquillement nous arrêtant aux Halles pour acheter quelques succulents involtini chez l'italien. Encore une découverte pour moi.
Balade l'après-midi sur la baie d'Audierne.


Le soir nous dînâmes sur le petit port de l'Ile Tudy, les meilleures places aux terrasses étaient prises d'assaut. La lumière était belle.


Ce matin nous fîmes un dernier tour dans cette ville que mon ami a aimé avec ses ponts et ses parterres fleuris, ses rues pavées, ses maisons à colombages, sa cathédrale, ses librairies.


Je l'ai emmené dans celle-ci qui m'avait séduite il y a quelques mois : Le piano livre. Le Maître de céans était là; avec un grand sourire je lui ai demandé s'il nous jouerait quelques notes de jazz sur son piano et il ne s'est pas fait prier. Nous l'avons écouté en continuant de butiner dans les rayons. Encore une fois nous étions à mille lieues de l'agitation de la ville, feuilletant de vieux ouvrages, accompagnés d'un libraire-pianiste qui ne jouait que pour nous deux. Grand moment de bonheur. Mon ami m'a offert une vieille édition, 1965, Jean-Jacques Pauvert de L'astragale de Albertine Sarrazin puisque nous en parlions la veille (je lui avais offert à son arrivée Lettres à Fanny de John Keats) et je me suis fait plaisir en achetant Volupté de Sainte-Beuve dans une édition de 1877, sans même savoir si ce livre allait correspondre à l'état de mon âme, le titre à lui seul me faisait rêver.

Il me serait difficile de dire ici avec justesse ce que furent ces deux jours avec mon ami (qui n'est pas mon amoureux je précise). Il me reste maintenant ces petits instants de bonheur qui ressurgiront pour un oui pour un non et ces jolies pivoines avec lesquelles il est revenu ce midi pendant que je préparais hâtivement une salade avant qu'il ne reparte.

mardi 6 juillet 2010

Lettres à Poisson d'Or

"Je ne peux vous aimer sans devenir le coeur de ce qui existe avec. Mon être est par vous tout esprit à force d'être l'intelligence de tout ce qui nous a rapprochés. Une lumière lourde comme de la rosée tombe dans le vent gris d'un jour odorant, aussi doux que la chair. Les oreilles pleines de la rumeur qui, pour vous être transparente, n'a qu'à se traverser de mon amour pour vous, attentif à tous les bruits où tressaille le passage du temps, je jouis délicieusement de ne me sentir réel que dans le berceau d'une pensée toujours la même et si exceptionnelle que la vision ne s'y distingue plus de l'idée. Il est si bon de savoir qu'il existe un être tel que penser à lui ce soit déjà le voir et le toucher; que sa présence réelle, ainsi, soit l'unité de l'esprit et du coeur, qu'il se rende capable et grâce à sa beauté de faire de la lumière la transparence de la vie intérieure."

Joë Bousquet, Lettres à Poisson d'Or, p. 37. L'imaginaire*, Gallimard.

16 h. J'attends un ami cher qui ne saurait tarder. Je regarde dans ma bibliothèque les livres qu'il m'a fait découvrir, je sors celui-ci parce qu'en ce moment je suis comme un poisson qui nagerait dans une eau lourde et tiède, et qui se laisserait engloutir dans cette douceur comme on s'enfonce avec délice dans le sentiment amoureux.
* Le mien est très sollicité ces jours-ci.

lundi 5 juillet 2010

***

Je l'imagine, j'en rêve.
Il est loin, et si près.
Je l'invente, mais il existe.

Imagination, rêverie (suite)




Hier soir j'ai revu un film de Eric Rohmer : L'amour l'après-midi. Je peux revoir les films de Rohmer sans aucune lassitude. Ils ne vieillissent pas, les sujets sont intemporels.
Je trouve dans Télérama cette critique et cette phrase qui me fait sourire à propos du film :
"Genre : les mots sont faibles devant la chair."

Pourtant, Frédéric ne succombera pas à la tentation si je puis dire. Il n'ira pas jusqu'au bout de son désir, le remord (c'est ainsi que je l'entends) le fait s'enfuir pour retourner auprès de sa femme, qu'il aime et j'ai trouvé la dernière scène très belle, surtout quand il lui dit (à Hélène sa femme) : tu m'intimides... parce que je t'aime. C'est tellement ça l'amour : être intimidé, bafouiller, avoir le trac, se taire. Rester intimidé l'un par l'autre, c'est très troublant.

Dans la première partie du film, Frédéric qui a une vie parfaitement réglée, organisée semble s'ennuyer dans son confort bourgeois sans pour cela nier le bonheur qu'il a trouvé auprès de sa femme. Dans cette scène où il est attablé à une terrasse, il se parle et des images de femmes lui apparaissent (ce sont les actrices fétiches de Rohmer) :

"Je sens que ma vie passe et que d'autres vies se déroulent parallèlement à la mienne et je suis comme frustré d'être resté étranger à ces vies, de n'avoir pas retenu chacune de ces femmes, ne serait-ce qu'un instant. Et je rêve, je rêve que je les possède toutes, effectivement. Depuis quelques mois j'aime à me complaire - à mes moments perdus - dans une rêverie qui se précise et s'étoffe de jour en jour.
Rêverie enfantine et probablement inspirée par une lecture de mes dix ans; j'imagine que je suis possesseur d'un petit appareil qu'on suspend à son cou et qui émet un fluide magnétique capable d'annihiler toute volonté étrangère. Je rêve que j'exerce son pouvoir sur les femmes qui passent devant la terrasse du café : indifférente, pressée, hésitante, occupée, accompagnée, solitaire (et l'on voit chacune des ces femmes...).
Tandis qu'il poursuit son rêve, l'appareil magnétique au cou exerce son effet. Françoise Fabian (la magnifique) passe d'un pas vif, il l'interpelle :
- Pardon madame, êtes-vous très pressée?
- Franchement monsieur, non... pas très.
- Puis-je vous demander si vous avez une heure à perdre?
- A la vérité, oui.
- Vous serait-il agréable de la perdre avec moi?
- A vrai dire je n'en sais rien?
- Faisons-en l'expérience, comme ça vous saurez.
- C'est vrai, je le saurai, excellente idée."


Puis, il va vers une autre femme... et sa rêverie continue...
J'ai aimé cette séquence mais tout le film est passionnant, j'aime ce cinéaste des mots, de l'introspection.

Chloé, cette amie (qui devient amoureuse de lui) vers qui il se sent attiré sans oser transgresser son désir, lui dit :


"Tu es ma seule raison de vivre, tu me fais du bien et si je ne t'ennuie pas c'est magnifique, même si tu n'es pas d'accord ça fait du bien de parler. Il lui répond :
Toi aussi tu me fais du bien, tes soucis très réels me délivrent de mes angoisses imaginaires".


Ce film L'amour l'après-midi est dans la série des Contes moraux de Rohmer, tout est suggéré et d'autant plus sensuel et la fin est évidemment morale (moraliste?).

Dans la dernière scène où l'on croit (ou j'eusse aimé qu'il succombât;o)) qu'il va succomber au plaisir de la chair avec Chloé, il s'arrête soudain, figé et s'enfuit.


Il revient vers sa femme, c'est une très belle scène. J'ai aimé qu'il retourne vers sa femme mais j'ai aussi pensé au chagrin de Chloé qui l'aimait.

Je suis une inconditionnelle des films de Eric Rohmer.