mardi 31 août 2010

Attention, chef d'oeuvre

Je n’ai jamais autant regardé le ciel que depuis que je vis en ville; les petits bouts que j’en vois, cernés au dessus des toits, sont mon immensité.


Lorsque je vivais à la campagne, le ciel était tellement vaste que je ne le voyais plus, ou alors, seulement le matin, quand j’ouvrais les volets de ma chambre à l’étage et que, les yeux encore ensommeillés, j’étais éblouie, tellement c’était beau.
Ici, je capture des moments de la journée, comme la lune avant-hier matin pas encore couchée alors que le soleil était déjà levé, ou les mouettes, pigeons, tourterelles, choucas qui traversent ce ciel, par bandes, dans le même territoire, sans jamais se cogner, sauf pour s’aimer.
Hier, ce sont ces avions que j’ai suivi du regard, le premier traversant « mon ciel » du Nord au Sud et l’autre arrivant Sud Ouest. Je les voyais tirant cette ligne blanche comme une étoile filante qui venait vers moi. J’oubliais en les regardant qu’il y avaient des passagers, dans cette étoile.



Hier soir…
J’ai regardé La Belle Noiseuse, envie de voir le film après avoir relu le texte de Honoré de Balzac. Jacques Rivette l'a adapté, de façon moderne.
Le synopsis : « Un peintre vieillissant est rongé par un secret qui l'obsède : l'abandon, il y a dix ans, d'un grand tableau qui devait être son chef-d'oeuvre et dont sa femme était le modèle. L'arrivée d'un jeune couple dans sa propriété du Midi va lui permettre de reprendre cette oeuvre et c'est la jeune femme, qui cette fois, lui sert de modèle. Pendant les cinq journées de pose, la tension va monter entre les différents protagonistes. »
C’est un long film (4 h), je n’aurai pas pu le voir en salle, bien installée dans un bon fauteuil, c’était mieux, et la vidéo est sur deux DVD, on peut faire un break, pas inutile, tant la tension de l'artiste et son modèle vous capte. Et puis, le petit écran sied bien à ce film intimiste, intime.
Emmanuelle Béart est d’une beauté éblouissante et Michel Piccoli, époustouflant de vérité.



Je comprends pourquoi ce film est si long. Tout y est étudié du travail du peintre dans le moindre détail : la lenteur, la réflexion, le doute, le geste sur la toile, l’arrêt du geste, l’angoisse, le trou noir puis la lumière qui rejaillit, le geste qui assure, la pose du modèle qui inspirera le peintre. Une merveille du metteur en scène Jacques Rivette. Emmanuelle Béart est extraordinaire en modèle du peintre. On y croit, on souffre avec elle. Envoûtement charnel, beauté du corps. C’est une sculpture vivante, magistrale.
Pas de musique dans ce film, si ce n’est celui du générique de fin : Igor Stravinsky. Jane Birkin aussi est « habitée » dans ce film. Jacques Rivette est un très grand cinéaste.
La musique c’est le silence mais aussi des sons amplifiés par ce silence : le bruit de la plume qui encre le papier, celui du pinceau qui brosse et racle la toile.

La tension est omniprésente, j’en suis sortie épuisée mais émerveillée. La seule scène où la tension s’apaise c’est quand ils boivent tous les deux, faisant baisser la pression ; légèrement enivrés, le peintre et son modèle se mettent à rire, relâchement, très belle scène, d’un naturel incroyable, parce que réellement, ils vivaient ce film. Durant cette scène je me suis lâchée aussi, j'étais en totale osmose avec eux, cela m'arrive rarement. J’ai eu l’impression durant tout ce film, d’être dedans, à fond, mentalement. Non pas d’être Emmanuelle Béart (loin s’en faut, rires), ni Jane Birkin mais d’être dans leur tension, au plus près. Un moment extraordinaire.
Peu de dialogues dans le film.
Quand le tableau est achevé, le peintre emmure son œuvre, La Belle Noiseuse, puis il place une toile vierge sur le chevalet et à nouveau dessine, on entend le bruit du fusain qui racle. Il laissera croire que La Belle Noiseuse est cette dernière œuvre… Mais tout est mieux dit ici.

lundi 30 août 2010

Sous le soleil, la misère

Même jour, 18 h 30.
Je rentre de quelques courses au Super le plus proche, celui qui me fait passer devant ces quelques SDF? qui sont là chaque jour et qui me saluent en passant. Ce soir, l'un d'entre eux était au Super devant moi, à la caisse, il payait un sandwich qu'il venait d'acheter. Un autre client nous séparait. Je le regardais, je voyais son visage enflé, défait, de plus en plus défait depuis quelques jours, ses cheveux en bataille, sa barbe (non ce n'est pas celui-ci dont j'ai parlé avec son chien, cela fait un moment que je ne l'ai pas vu d'ailleurs), ses plis sur le front (il doit être encore jeune pourtant), il avait l'air soucieux, je l'ai vu plus décontracté. Il doit boire beaucoup et bien encaisser (je ne l'ai jamais vu soûl) car il est grand et grande aussi sa corpulence. Mais dans ses yeux aujourd'hui je voyais un je ne sais quoi de tristesse, comme une fatalité. J'aurais voulu lui offrir son sandwich mais j'ai toujours cette peur de blesser.
Oh que j'étais malheureuse de le voir aujourd'hui, il avait l'air si désespéré.
En rentrant et en traversant la passerelle, il était déjà de l'autre côté, avec ses compagnons d'infortune qui buvaient leur bière. Lui, mangeait son sandwich. Je l'ai regardé dans les yeux, il m'a dit : bonsoir madame et je lui ai souri.
C'est tout ce que j'ai pu faire ce soir.
Je me sens bien inutile.

Le désir, c'est selon...

11 h 45. Échographie, hé hé, non je ne suis pas enceinte ! Mais du coup je les envie les femmes enceintes, c’est d’un doux de sentir ce gel glisser sous le… sous le quoi d’ailleurs, ce truc comme un micro qui vous parcourt et donne l’image sur un écran. Tiens, à la prochaine visite chez mon toubib je lui demande qu’il me prescrive des échographies partout ! Non mais !
- Rien d’anormal me dit le radiologue, on va faire une radio de contrôle.
- Rien d’anormal non plus à la radio.
- Ben flûte alors, comment je fais pour soigner mes douleurs si on ne trouve rien. Je vous jure qu’elle est très violente cette douleur.
- Ce doit être une tendinite du……. Prenez des anti-inflammatoires.
Et voilà, le tour est joué. La prochaine fois ce sera radio de l'estomac avec tout ce que j'ingurgite en ce moment.

13 h. Je m’arrête au Pub face à la rivière pour manger une salade. La terrasse est pleine de… travailleurs, des jeunes cadres dynamiques ou des petits chefs. Ça sent la rentrée et c'est encore l'été. Là, ils sont quatre à la table qui jouxte la mienne. Celui-ci est en chemisette à manches courtes et cravate. Impeccable le blanc de sa chemise sur son bronzage, sauf que, sa lame de rasoir sous le cou a dû déraper ce matin ; de fines gouttelettes de sang font tâches sur le bord du col empesé, bien serré. Je trouve que ça lui donne un peu d’humanité, moins de raideur, j’aime bien. Mais, que vois-je ? Ses avant-bras nus sont remplis d’écorchures. C’est sûr, ce jeune cadre dynamique est aussi un débroussailleur le week-end. Décidément, il m’est sympathique.

Après ma salade, en attendant mon café je lis la presse, les pages CULTURE : la rentrée littéraire et ses 701 romans. Bouhhh ! C’est trop pour moi.

Théâtre, ce titre de l’article : "Selon le désir de Jacques Weber". En le lisant ce serait plutôt : Le désir selon Jacques Weber, mais bon, l’autre va bien aussi. Dans Solness le constructeur d’Henrik Ibsen il est Solness, "ce personnage que l’amour va rendre fou". Interviewé par Delphine de Malherbe :
"J’ai eu 61 ans hier. Je sais qu’il ne faut pas attendre la maladie pour philosopher. J’ai l’âge de revoir les matières inutiles. De plonger en eaux profondes pour désirer plus fort." Comme vous avez raison cher Jacques Weber, la vie est si courte, Alain Corneau vient de mourir apprend-on aujourd'hui, à 67 ans, Bernard Giraudeau il y a peu, à 63 ans. Ma fin approche, hum ! désirons, désirons fort ! Selon le metteur en scène Hans Peter Cloos "La pièce parle du désir qui fait déplacer des montagnes, mais aussi de cet espace fragile où se joue la liberté d’un être". Et Jacques Weber de poursuivre : « Mes rêves je les réalise, je ne les laisse pas me dévorer »… avec la profonde conviction que la vie, c’est le désir. Et ce, qu’il soit intellectuel, charnel, amoureux, méditatif, spirituel. "Il rend mystérieusement fort […], le désir et l’amour transcendent la vie". Décidément, je l’adore Jacques Weber quand il pète le feu et qu’il conclue par ceci : "L’écriture est le premier lieu du désir".
JDD du 29 août 2010.

Je ne sais pas si je vais boire mon café serré après ça. J’ai déjà des palpitations.

dimanche 29 août 2010

Consolation


Je pensais que ma journée allait être à la mesure de ce ciel, légère, lumineuse, apaisée.
Elle ne fut que tourmente.Le soleil était déjà levé tandis que la lune s'attardait encore ce matin.



Je cherchais alors une consolation dans la lecture.
"Et maintenant elle veut savoir ce que je cherche et trouve donc chez les putes. Et je réponds - la soirée est douce, avec dans l'air déjà une note automnale, les clients sont rares dans ce restaurant aux niches rustiques, et j'ai prescrit à Marianne un Irish Whiskey contre sa toux et ses pleurnicheries, et à moi un bourbon à l'eau... -, je réponds : Il y a d'abord la solitude; quand je reste si longtemps seul, il faut de temps en temps que j'aie une femme dans mes bras, ça me permet de tenir un moment. Si je vais chez des prostituées , ce n'est pas du tout parce que j'ai un blocage ou des problèmes de contact. D'ailleurs ce que je recherche, ce ne sont pas les filles du trottoir mais plutôt les "belles de jour*", les filles de maisons de rendez-vous*. Là, on a du temps l'un pour l'autre, une heure, deux heures ou plus, dans ces belles chambres où l'on converse et où l'on ne se met pas à aimer, à faire l'amour tout de suite, mais seulement après de délicates approches, presque comme "en vrai". Et puis c'est chaque fois cette ascension l'un vers l'autre, cet acte d'être couché à deux que je trouve miraculeux. Un miracle, si l'on considère quels remparts d'inconnu, de crainte, de crainte du contact, de méfiance, se trouvent surmontés dans cette... preuve de confiance, je ne vois pas d'autre mot, quand on se couche l'un à côté de l'autre, nu comme à sa naissance, et qu'on commence à se donner ce menu bonheur. Je ne suis pas amateur de sexe rapide et encore moins de spécialités, lui dis-je, mais seulement de cette chose immuable et miraculeuse, et quand c'est bon, ce qui se produit est déjà de l'amour, ou n'en est pas loin.
[...]
Et je continue dans cette veine, et c'est la première fois que j'arrive à expliquer ça si simplement et uniment, ou du moins à le lui expliquer, à elle**, nous n'en avions presque jamais parlé jusque là, et de fait, tout soupçon, tout mépris, toute raillerie la quittent maintenant, et elle me dit : "Je peux comprendre"."


* Expressions écrites en français dans le texte original de langue allemande, 2004.
Pages 189 - 190.
** "elle", Marianne est sa femme.
Paul Nizon, Le livret de l'amour, Journal 1973-1979, éditions Acte Sud, 2007.

samedi 28 août 2010

Un an...

Entre ombre et lumière


Un an... que j'écris ici.
Demain c'est ton anniversaire.
Je n'ai pas tenu parole, j'ai parlé de toi ici.

Avant mon dernier déménagement, j'ai jeté ton odeur, ton vaporisateur dans lequel il n'y avait plus d'eau de toilette mais qui pourtant sentait encore ton Vétiver de G. Une fois par an, (pourquoi seulement une fois par an?), à ton anniversaire, j'enlevais le bouchon et je humais ton odeur, celle qui était dans ta barbe que tu inondais un peu trop. C'est incroyable comme l'odeur n'avait pas changée dans le vaporisateur, vingt deux ans plus tard. Il suffisait que je ferme les yeux et j'avais le nez dans ton cou. Mais pourquoi l'ai-je jeté en déménageant? Le 29 août suivant mon déménagement, l'année dernière donc, je suis allée dans une parfumerie, j'ai fait celle qui voulait offrir une eau de toilette pour homme et j'ai demandé à la vendeuse si je pouvais avoir un échantillon de ce Vétiver pour le tester avec celui à qui je voulais l'offrir. C'était un mensonge, je le voulais pour moi, pour te humer encore... une fois par an, pour ton anniversaire. La vendeuse m'a rempli un petit flacon de son testeur, en me demandant : je vous parfume? Je lui ai dit : oui, s'il vous plaît avec ce Vétiver. Il est quand même fort ce Vétiver, il m'est resté dans le nez toute la nuit. J'ai dormi avec toi. Ne ris pas dans ta barbe je te prie.

Pourquoi je repense à ton odeur ce soir, pas seulement parce que c'est demain que je vais mettre le nez dedans (c'est un rite maintenant) mais je viens d'écouter sur ma chère radio France Culture l'émission de Jacques Attali, Le sens des choses qui traitait de la consolation à propos de la perte d'un être cher. Et Christophe Girard qui était invité parlait de tous ces moments qui nous rappellent l'autre et notamment les odeurs. Je parle de tout cela sans aucune mélancolie, sans aucune tristesse, c'est si loin ta mort. Je ne pense plus à toi à chaque instant comme ce le fut durant des années, il m'arrive même de ne plus penser à toi... pendant une semaine! Je ris. Mais c'est drôle, tu reviens comme ça, par bouffée, quand j'aurais envie de te dire : figure-toi qu'un autre occupe mes pensées. Mais ce n'est pas le cas. Snif! Pfff!

Ethique et morale

Sur la route de Madison

"Faut-il distinguer entre morale et éthique ? A vrai dire, rien dans l'étymologie ou dans l'histoire de l'emploi des mots ne l'impose : l'un vient du grec, l'autre du latin, et les deux renvoient à l'idée de moeurs (ethos, mores) ; on peut toutefois discerner une nuance, selon que l'on met l'accent sur ce qui est estimé bon ou sur ce qui s'impose comme obligatoire.
[…]
La visée éthique.
Je définirai la visée éthique par les trois termes suivants : visée de la vie bonne, avec et pour les autres, dans des institutions justes. Les trois composantes de la définition sont également importantes.
[…]
"Puissé-je, puisses-tu, puissions-nous vivre bien !" […] souci de soi, souci de l'autre, souci de l'institution. Mais le souci de soi est-il un bon point de départ ? Ne vaudrait-il pas mieux partir du souci de l'autre ?
[...]
Estime de soi et sollicitude ne peuvent se vivre et se penser l'une sans l'autre. Dire soi n'est pas dire moi. Soi implique l'autre que soi, afin que l'on puisse dire de quelqu'un qu'il s’estime soi-même comme un autre.

La norme morale.
A la première composante de la visée éthique, que nous avons appelée « souhait de vie bonne », correspond, du côté de la morale, au sens précis que nous avons donné à ce terme, l'exigence d'universalité. […] On a pu être choqué par l'intransigeance kantienne. En effet, la position du formalisme implique la mise hors circuit du désir, du plaisir, du bonheur ; non pas en tant que mauvais, mais en tant que ne satisfaisant pas, en raison de leur caractère empirique particulier, contingent...
[…]"

Pour conclure (j'aimerais la faire mienne, mais...) :
Aristote observe "La raison en est que la loi est toujours quelque chose de général et qu'il y a des cas d'espèce pour lesquels il n'est pas possible de poser un énoncé général qui s'y applique avec certitude."

Quelques réflexions tirées d’un texte de Paul Ricoeur.

J’ai été amenée à m’interroger ce matin sur cette question : éthique/morale, "par souci de l’autre". Ne jamais faire souffrir, savoir se retirer, pour la quiétude de ceux qu’on aime. Savoir "ce qui est estimé bon pour l’autre et ce qui s’impose comme obligatoire pour soi."

Sur la route de Madison

vendredi 27 août 2010

Compromission

Ne touchez pas la hache.
"Une histoire d'amour fou, tragique, impossible. Jacques Rivette signe un bijou épuré en adaptant La duchesse de Langeais de Balzac". Les inrockuptibles.

Armand de Montriveau, général français débarque dans une île espagnole lors de l'expédition française pour rétablir l'autorité de Ferdinand VII. C'est dans le monastère des carmélites qu'il découvre que soeur Thérèse est la femme qu'il recherche depuis 5 ans. Il obtient l'autorisation de la voir, en présence de la mère supérieure...
(Ma vidéo est médiocre mais la séquence est belle et je n'ai pas trouvé d'enregistrement de cette séquence. On peut voir ici la bande annonce, de meilleure facture;o))

- Je vous ai cherché dans le monde entier. Depuis 5 ans vous êtes ma pensée de tous les instants.
- Vous oubliez que je ne suis pas libre.
-...
- Vous parlez de vos voeux? J'irais à Rome, j'implorerais toutes les puissances de la terre.
- Ne parlez pas ainsi, je vous aime bien mieux que je ne vous ai jamais aimé. je ne vous vois plus avec les yeux du corps. Que pouvez-vous dire qui puisse balancer cela?
- Je dirais que je t'aime et si tu me suis, je n'entendrais plus d'autre voix que la tienne, je ne verrais plus d'autre visage que le tien. Antoinette, veux-tu me suivre?
- Je ne vous quitte pas, je vis ici pour vous. Mon Dieu, s'il est juste, vous serez heureux.
- Autrefois tu me préférais la société, maintenant c'est Dieu, c'est mon salut. Tu ne m'aimes pas, tu ne m'as jamais aimé.
- Oh... (dans un souffle...)
- Tu aimes mon âme dis-tu? Eh bien tu ne la perdras jamais cette âme. Je me tuerai.
Le marquis de Montriveau (Guillaume Depardieu) tombe follement amoureux de Antoinette de Navarreins (Jeanne Balibar), épouse du duc de Langeais. Celle-ci s'amuse à le séduire mais se refuse à lui et ne cèdera jamais. Comprenant la manoeuvre, Montriveau va ignorer son aimée et se venger...
C'est un très beau film, avec également Bulle Ogier et Michel Piccoli. Guillaume Depardieu est très convaincant dans son rôle et c'est aussi un hommage que je lui rends. Il est mort un an après la sortie de ce film. J'aimais sa rébellion, ses nerfs à vif, sa sensibilité à fleur de peau, sa fragilité. Il me touchait. Les anges meurent jeunes ou ne peuvent que survivre.
Cette phrase de Armand de Montriveau à Antoinette de Langeais (qui ne répond pas) :
"Vous accepteriez de vous compromettre pour moi?"
N'importe quel être qui aime d'amour ne peut répondre que oui.
(Je suis une incorrigible amoureuse romantique, à jamais)

jeudi 26 août 2010

Nicole Garcia

Chère Nicole Garcia,

Tout d'abord, je vous aime. Comment vous dire mon émotion ce soir, de vous voir à Quimper, débattre avec nous de votre film - en tant que réalisatrice - que nous venions de voir : Un balcon sur la mer. Je crois que le premier film où je vous ai aimée c'est dans Duelle de Jacques Rivette, vous étiez avec mes autres stars : mais aussi Elizabeth Wiener, toutes les quatre vous étiez déjà mes idoles.

Aussi ce soir, quand le film s'est arrêté sur la dernière image, avec Jean Dujardin, magnifique dans le rôle (ne pas raconter la fin, le film ne sort qu'en décembre 2010) et que je vous ai vu apparaître sous les applaudissements de la salle, j'ai eu envie de pleurer, du bonheur de vous voir. Oui, cela peut sembler excessif, mais comment dire, toute cette jeunesse que vous me rappeliez et qui renaissait avec votre présence ce soir.

Je m'en suis voulu d'avoir oublié mon appareil photo mais finalement cela n'a pas d'importance, vous étiez telle que je vous aimais, je revoyais ces images de vous, décontractée, nature(lle) (dans Péril en la demeure), cette main que vous passiez dans vos cheveux sans arrêt, cette voix cassée et votre sourire, ce soir, je l'ai vu, exactement comme sur cette photo.


 
Ô que j'ai aimé Péril en la demeure de Michel Deville. Du même cinéaste j'ai aimé passionnément Le voyage en douce avec Dominique Sanda, divine (qui a eu le rôle à votre place) et Géraldine Chaplin, non moins divine.

Dans la salle les courageux vous posaient des questions sur votre film, je m'en fichais de leurs questions, j'avais envie de prendre le micro et de vous dire :
je suis émue de vous voir, je vous aime. Mais ça l'aurait fiché mal hein! D'autant que je n'avais pas grand chose à dire sur le film; plaisant, mais il m'a moins touché* que ce que j'ai pu voir de vous. Ce film parle de vos racines :
histoire de l'Algérie, thriller, drame, histoire d’amour.

J'ai vraiment passé une belle soirée. Je ne sais pas traduire ce que j'ai ressenti, ce soir j'avais le même âge que vous, c'est à dire, vingt ans.


* (Rajout du 20 février 2014)
Revu le film Un Balcon sur la mer. Je devais être trop impatiente de voir Nicole Garcia et trop excitée à l'idée de la voir lors de cette avant-première en 2010. J'avais regardé le film sans "rentrer dedans", j'étais un peu ailleurs. Je "l'attendais. Elle.". En le revoyant ce soir, ma vision était différente, mon point de vue moins subjectif. Un retour vers le passé, une ambiance  mystérieuse, qui m'ont laissé légèrement vertigineuse, scotchée par Jean Dujardin. 

mercredi 25 août 2010

Casting


Quelques courses en ville sous le crachin, les touristes - encore plus nombreux quand le ciel est gris - se bousculent, les parapluies se cognent dans la rue étroite (quelle idée d'ouvrir un parapluie quand la brumisation est gratuite et excellente pour le teint), tout le monde glandouille et malgré le manque de lumière ça mitraille à tout va. Je repense à cette phrase lue hier...

"Dans la ville illustre grouillant de touristes excédés par les touristes, épuisés par la corvée des visites obligatoires, harcelés par les restaurateurs et les échoppiers, seuls semblent en vacances, torses nus dans le bleu du ciel, trois ouvriers sur un toit."
Eric Chevillard, L'autofictif.

...que je pourrais faire mienne si ce n'est que "sur les toits et dans le bleu du ciel" (si si, il y en a aussi) ici ce sont les mouettes qui se marrent en larguant quelques fientes :


Pas très élégant mais très drôle, photo empruntée ici

Sur la terrasse où je m'installe, à l'abri de la pluie, sous une chaleur poisseuse, je lis la presse régionale. Je constate qu'une fois de plus la Bretagne inspire les cinéastes, plusieurs films vont être tournés dans la région et les candidats à la figuration se pressent apparemment. Une expérience que je connais : deux figurations et une silhouette! Des heures d'attente, levée à 5 heures du matin dans le froid (c'était en hiver) pour rentrer à 20 heures et toucher des clopinettes. Fallait que je sois dans la mouise pour remettre ça une deuxième fois! Quant à la "silhouette", je fus choisie après un casting et là ce fut beaucoup mieux payé pour seulement deux heures de tournage, un déjeuner en compagnie des acteurs et du metteur en scène, un type épatant, une vraie convivialité, une belle expérience.
Je lis donc :
"Un casting est organisé à Douarnenez, vendredi 27 août à la Maison du Nautisme à Tréboul. La production recherche essentiellement des hommes âgés de 25 à 60 ans qui cadreraient (sic) avec le décor du port de pêche."
Je me marre. Mon thé arrive, je lève la tête et passe à ce moment-là un type avec une vareuse rouge délavée, un bonnet de marin, une barbe de deux ou trois jours poivre et sel : il "cadrerait" drôlement bien dans le décor celui-là! Mieux que ceux-ci :



Sûr que les "marins audacieux" de Jean-Paul Gaultier auraient l'air d'hurluberlus mabouls à Tréboul!

mardi 24 août 2010

Spleen

Je relis ce que j'écrivais dans mon Journal le 24 août 2007.

"17 ans que je la bichonne, qu'elle a m'a entendu chanter, crier, rire, pleurer et même parler tout haut, dire mes joies et mes chagrins. Oui, c'est tout cela qu'elle est pour moi. L'endroit où je me réfugie, où j'ai une sensation de liberté quand elle m'emmène en voyage. Je lui disais avant de partir : tu vas tenir le coup, hein!
C'est ma maison ambulante, celle où je me réfugie parce qu'elle m'enveloppe.

Je devrais être gaie, je vais tout à l'heure chercher ma nouvelle voiture, NEUVE!

Je suis triste d'abandonner ma vieille tire! 17 ans de vie commune, deux excès de vitesse (165 sur l'autoroute, quand même - 70 en ville (o_o)), une prune pour un oubli de ceinture, un petit accident, une réparation. Suis con, je l'aimais bien.

Parfois, il faut se séparer... de ce qu'on aime... avant qu'il ne vous lâche."



Ce soir, 24 août 2010, spleen.

Peu à peu le coeur s'éteint
Les espoirs s'envolent un à un
Comme autant de feuilles mortes
Jusqu'à ce qu'il n'en existe plus
Plus aucun espoir
Plus rien.

***

Quelques phrases entendues ou lues ces derniers jours, qui m'interpellent :

"Être vrai, peu le peuvent"
Friedrich Nietzsche.

"Il y a une forte possibilité que je deviendrais Belge pour passer à Knotte-le-Zoute!"
Roman Polanski.

"On a créé un Centre d'Art Contemporain en Limousin dont l'architecture est - paraît-il -un mélange de hangar, de temple grec et d'écurie, avec au bout du monument un phare breton. Et le directeur de ce CAC a cette phrase incroyable : En Limousin, si on veut s'en sortir il nous faut passer du cul des vaches à la modernité, pas bientôt mais tout de suite".
Alain Finkielkraut dans Répliques reprenant une "histoire" de Philippe Muray.

"Qu'ils disent du mal de moi derrière seulement, mon cul vous contemple".
Gustave Flaubert par la voix de Fabrice Luchini.

"Il n'y a rien de plus violent qu'une rupture qui se fait en douceur".
Nicolas Rey dans Micro Fiction.


lundi 23 août 2010

AIRES DE JEUX


Il y avait longtemps...
que je n'avais pas fait un tour au QUARTIER (CAC) un dimanche. Cet été en passant devant, l'affiche de l'exposition en cours ne m'inspirait pas. Je pensais que cela s'adressait aux enfants : AIRES DE JEUX
La police ou les corsaires.
Mais je dois reconnaître après m'être attardée dans chaque salle que c'est une exposition attractive et que j'en suis ressortie avec plein de couleurs dans la tête et de dynamisme. Le regard des artistes sur les aires de jeux nous aide à nous rendre compte qu'il s'agit d'objets risqués.

"L'exposition explore le tiraillement des aires de jeux entre un idéal de réalisation optimale des enfants et une forme de discipline. L'aire de jeux est, à l'image de toute structure éducative, sociale ou de vie en commun, vecteur d'une idéologie qui échappe bien souvent à ses utilisateurs comme à ses concepteurs. A travers une sélection d'oeuvres qui s'articulent les unes aux autres, l'exposition mêle des pratiques liées à la sculpture, au design et à la performance depuis les années 60 mais ne montre pas d'aires de jeux à proprement parler. [...] La police (comprise dans les sens d'une norme imposée de l'extérieur, d'un règlement sans explication) ou les corsaires (la possibilité d'un geste libre et fondateur), telle est bien l'alternative qu'il faut comprendre ici, et qui se pose déjà à même les aires de jeux."

Je n'ai pas envie de m'attarder sur le charabia explicatif de cette exposition, j'aime pour ma part pénétrer dans ce que je vois, toucher si je peux, écouter aussi car le son est très présent avec des écrans géants et des enfants, parfois violents et rebelles, dans des aires de jeux.

Le sous-titre de l'exposition : La police et les corsaires, reprend les termes de Michel Foucault dans son texte Des espaces autres : "Dans les civilations sans bateaux les rêves se tarissent, l'espionnage y remplace l'aventure, et la police, les corsaires".

Anne Frémy
Née en 1955 à Paris où elle vit et travaille. Elle est auteur, artiste et iconographe. Elle travaille avec l'image dont elle exploite les possibles sens par leurs associations. Ell a particulièrement utilisé l'image auprès d'architectes avec qui elle a collaboré (Paul Chemetov, Jean Nouvel, Patrick Bouchain...)



Homo Ludens 2010 - impressions numériques sur plexiglass


Florence Doléac
Née en 1968 à Toulouse vit et travaille à Paris. J'ai particulièrement aimé Le salon de lecture gonflable (Ballooon) de Florence Doléac dans lequel je me suis attardée, assise sur un ballon, puis plus confortablement encore, par terre sur le tapis le dos bien enveloppé dans les ballons qui prennent la forme du corps. Je me disais que ce serait très chouette d'en avoir quelques-uns dans mon salon!
"Florence Doléac explore l'espace dans lequel le design dialogue avec l'art. Ballooon devient un salon de consultation d'ouvrages, proposés par les artistes et les commissaires, permettant de prolonger les réflexions initiées par l'exposition : la question du contrôle social, de l'idée de l'enfance, des pré-conceptions qu'elle véhicule".




Pour le coup, les livres mis à disposition sont des livres pour adultes ou alors enfants surdoués. Hum! Il s'agit d'une sélection de livres qui aident à penser la difficile question de l'efficacité de la pédagogie par les formes.


Surveiller et punir de Michel Foucault, Les mots et les choses, Le pouvoir psychiatrique, Démocratie et éducation... Shakespeare... Le Capital de Karl Marx...

Corin Sworn
Née en 1977 à Londres vit et travaille à Glasgow en Ecosse.
Pour l'exposition, elle a réalisé avec Nicolas Parti et Ciara Philips des posters reprenant des indications et recommandations pour les jeux sûrs (play safe posters), quand le conseil devient consigne et tue toute impulsion de jeu.




Eamon O'Kane
Né en 1974 à Belfast vit et travaille à Odense au Danemark. Il effectue une relecture de l'héritage des formes du modernisme : Mondrian, Charles & Ray Eames, Le Corbusier, Frank Lloyd Wright. Ici il insiste sur la dimension pédagogique des formes du modernisme et leur historicité, et qu'il convenait selon lui, de donner aux enfants dans un ordre précis.






Bref, quand l'art contemporain est ludique il me plaît.
L'art contemporain est une ouverture sur le monde.

Rajout du 9 août 2016 : je découvre ce site Artsy Education (en anglais) dont le rôle est justement d'initier de manière ludique à l'art contemporain.

dimanche 22 août 2010

Festival du cinéma à Douarnenez

Edwy Penel à Douarnenez hier.
Jane Birkin sera présente le 24 août. Elle parlera de Aung San Suu Kyi, Prix Nobel de la Paix, opprimée depuis 20 ans par la Junte militaire au pouvoir.

Une semaine consacré aux Caraïbes pour ce 33è festival du cinéma à Douarnenez.

"Dès demain et jusqu'au 28 août, Douarnenez s'embarque pour les Caraïbes. A l'affiche de son 33e Festival de cinéma, la petite ville bretonne met en effet le cap sur les cultures et les peuples des mers chaudes, avec plus de cent films sélectionnés. Un crochet en Birmanie, et quelques escales bretonnes, sont également prévus." Télérama, le 20 août.

Pour terminer sur une de mes "stars" : Nicole Garcia sera à Quimper à 19 h 30 et à Bénodet à 21 h pour présenter son film en avant-première le 26 août.

Qui a dit qu'il ne se passe jamais rien dans le Finistère?

samedi 21 août 2010

Voyage dans les mots

Mûrier platane

Je reviens ce soir rendre visite à Oceania que j’ai découverte trop tard. Elle est partie mais son blog reste ouvert. C’est un trésor, rempli de poésie, de douceur, de générosité. Nombre des auteurs qu’elle aimait sont aussi les miens et les relire chez elle ajoute à l’émotion que certains soulèvent toujours en moi.

Et je lis ce billet : Oceania (Derrière la fenêtre) rédigé le 25 septembre 2009 et publié le 10 mars 2010, trois mois avant son décès :
« L’an prochain, si nous ne sommes pas plus, que nous ne soyons pas moins. »
Ça me chamboule.

Lire Oceania c’est déposer quelques fleurs sur ses cendres.

vendredi 20 août 2010

Vie et destin, suite


"Aussi loin que je remonte dans mes souvenirs, la frontière entre le réel et l’imaginaire a toujours été désespérément brouillé.
Il m’aura fallu presque une vie pour comprendre que c’était là la clé de mon existence même. Cela m’aura valu plus que ma part de chagrins, d’affrontements, de catastrophes et de déceptions. Mais j’ai vu s’ouvrir devant moi des portes qui, sans cela, seraient demeurées fermées jamais.
L’art et la poésie, la fantaisie et l’imaginaire m’ont toujours paru plus réels que les étroites limites du monde au sein duquel j’ai grandi dans la Pologne communiste. Très jeune, j’avais déjà l’impression d’être différent de ceux qui m’entouraient : je vivais dans un monde à part qui n’appartenait qu’à moi parce qu’il était le fruit de mon imagination.
Je ne pouvais assister à une course cycliste à Cracovie sans me voir aussitôt sous les traits d’un futur champion. Je ne pouvais voir un film sans m’en imaginer vedette ou, mieux encore, réalisateur, derrière la caméra. Assis au poulailler d’un théâtre, je ne doutais pas un instant que, tôt ou tard, ce serait moi qui occuperais tous les regards, au centre de la scène de Varsovie, à Moscou, voire - pourquoi pas ? - à Paris, cette capitale culturelle du monde, si lointaine et si romanesque. Tous les enfants ont un jour ou l’autre laissé courir leur imagination. Mais contrairement à la plupart, qui se résigne bientôt à la grisaille quotidienne, je ne doutais pas un seul instant que mes rêves se réaliseraient un jour. J’étais possédé de la certitude naïve et bébête que cela n’était pas seulement possible mais inévitable – joué d’avance, aussi inévitable que la morne existence qui aurait dû normalement m’échoir.
Mes amis et les membres de ma famille, habitués à rire de ma folie des grandeurs, ne tardèrent pas à me considérer comme un bouffon. J’ai toujours adoré faire rire et jouais donc ce rôle de bonne grâce. Peu m’importait. Par moments, les obstacles qui se dressaient sur mon chemin étaient tels que je n’eus pas trop de toute mon imagination pour simplement survivre."


Ainsi commence ce livre, premier paragraphe, page 11 : Roman par Polanski, éditions Robert Laffont, 1984. (Traduit de l’anglais par Jean-Pierre Carasso)

Depuis la mort de Sharon, pourtant, et en dépit des apparences, ma joie de vivre est restée incomplète.
Dans les instants d’insupportable tragédie personnelle, il est des gens qui cherchent et trouvent une consolation dans la religion. Dans mon cas, c’est le contraire qui s’est produit. Ce que je possédais de foi religieuse a été réduit en miettes par le meurtre de Sharon. Il a conforté ma foi en l’absurde.
Je continue de faire les gestes d’un professionnel du spectacle, je sais encore raconter des histoires drôles […], mais je sais au plus profond de mon cœur que l’esprit du rire m’a quitté. Ce n’est pas seulement que le succès m’a laissé blasé, ou que je suis aigri par le drame ou mes propres folies. J’ai l’impression de besogner sans but discernable. J’ai le sentiment d’avoir perdu le droit à l’innocence, à la pure jouissance des plaisirs de la vie. […]
Je sais bien que je passe aux yeux de bien des gens pour une espèce de gnome méchant et débauché. Mes amis – et les femmes de ma vie – savent à quoi s’en tenir."


Page 496, dernier chapitre, dernière page.

Durant une semaine France Culture a consacré l’émission Une vie, un destin à Roman Polanski et ce livre dans ma bibliothèque a survécu à mes déménagements. J’étais déjà fascinée par le cinéaste de Rosemary’s baby. C’est pourquoi j’ai écouté chaque jour avec un grand intérêt ces émissions qui m’ont permis de découvrir un autre homme que celui que la presse people veut bien nous dévoiler. C'est un survivant.

C’est mon 500è billet !!! huit jours avant la date d’anniversaire de mon premier billet, je voulais faire coïncider les deux mais cela me donne encore huit jours pour réfléchir : arrêter, poursuivre, arrêter, poursuivre, arrêter, poursuivre, une litanie qui me trotte dans la tête comme deux noms qui dansent… en transe.

jeudi 19 août 2010

Gustave Thibon

Hier, sur l'ardoise du Café du Palais, où je prenais mon café :

"Être dans le vent
une ambition de feuille morte".
Gustave Thibon

Je découvre un homme, philosophe-paysan-poète, dont je n'avais jamais entendu parler. Quelle lacune!
"L'un des événements les plus marquants de sa vie est sa rencontre avec Simone Weil (1909-1943). C'est en 1941 qu'il accueille cette dernière dans sa ferme en Ardèche. Chassée de l'université parce que juive, elle lui confie le manuscrit de "La Pesanteur et la grâce", qu'il publie en 1947. "Vous êtes français comme on ne l'est plus depuis trois siècles" lui disait-elle."

Remerciements au Café du palais!

mercredi 18 août 2010

VIP sans l'être, sans lettre!

Ce fut une journée débridée à faire ce qui s’appelle : beaucoup de mouvement pour pas grand-chose !
Rien d’intéressant donc, je soulignerai simplement mon passage à la médiathèque puisqu’il faut bien appeler ainsi les nouvelles bibliothèques.
La mienne, la Médiathèque des Ursulines est un très beau bâtiment, un ancien couvent rénové, sur trois étages. Au rez-de-chaussée une grande salle dans une belle lumière pour accueillir des expositions et un auditorium (fauteuils très confortables, ce n’est pas négligeable). Une autre salle spacieuse pour consulter sur place les quotidiens, magazines... A chaque étage, une salle avec des ordinateurs pour l'accès gratuit à Internet.

L’accès de ce lieu magique par le jardin est somptueux, esplanade François Mitterrand, eh oui, nous avons un Maire PS. Petite anecdote qui mérite d’être narrée :

Lors de mon retour en Bretagne il y a 17 ans, il fallait que je retrouve un job. Mon ancien boss bien introduit dans le monde politique m’avait obtenu un rendez-vous avec le Maire (il est à ce jour toujours l'élu) de cette ville où je vis aujourd'hui. Le jour J, rendez-vous à 9 heures. Je n’y habitais pas encore mais je la connaissais, enfin, je croyais m’en souvenir. Arrivée dans le centre en voiture, près de la préfecture, je regarde l’heure, ouille je n’avais plus que dix minutes pour trouver une place pour me garer et je ne savais plus très bien comment faire pour accéder à la Mairie. Au feu rouge, deux motards de la gendarmerie ; j’ouvre ma fenêtre :
- Bonjour messieurs. J’ai rendez-vous avec Monsieur le Maire, pourriez-vous m’indiquer la Mairie ? (Ô joie, j’étais encore immatriculée 75).
- Suivez-nous !
Et vlatypa que je les suis à fond de train, ils ont mis les sirènes en branle (oui oui), les voitures se rabattant pour laisser passer le "cortège". ROYAL ! Je jubilais. Ils m’emmènent devant la Mairie, plus de place à chercher, j’étais au parking VIP. Non mais quel pied ! C’est dingue tout de même, ils m’ont cru sur paroles, sans me demander de preuve (mais j’avais la lettre de mon boss tutoyant le Maire ; entre camarades…)
Le Maire fut très accueillant, ben oui, entre potes n’est-ce pas, nous sommes de la même"classe" me dit-il en regardant mon CV ! (Je croyais que ça ne concernait que les hommes la "classe" ?) Bref, il ne m’a pas trouvé de boulot, juste quelques adresses pour prendre contact de sa part ce qui m’a valu un entretien passionnant avec la directrice du Centre d’Art Contemporain, sans aboutissement positif mais le moment fut assez excitant.

Revenons à la médiathèque d’où on aperçoit la flèche de l’église Saint Matthieu.



La façade de l’autre côté, sur la rue, face à l’église Saint Matthieu

me fait penser (de très loin mais tout de même) à l’Institut du Monde Arabe

(que j’aime beaucoup, c’est mon côté oriental, fan de Oum Kalthoum, mais seulement dans son contexte;o)). Je trouvais même que la rue Falkirk (adresse de la médiathèque) avait une consonance arabe, ignare que je suis. Un petit tour sur gogol et je découvre cette roue Falkirk incroyable d'ingéniosité : un ascenseur à bateaux. Falkirk n’a rien à voir avec l’Orient mais avec l’Ecosse !

En quittant la bibliothèque, cet arbre attire mon regard à chaque fois que je passe ici.


C’est un pin encerclé dans un muret de pierres tout neuf, une clôture bucolique pour le préserver ; derrière, un bâtiment en rénovation.
Comme un arbre dans la ville
Je suis né dans le béton…


Et je rentre chez moi, les touristes sont encore là, il fait beau, il fait bon, je ne savais pas qu’en rentrant j’allais trouver un mail me parlant de Saint Matthieu !
Il n’y a pas de hasard… tout est écrit !

mardi 17 août 2010

Une femme avec laquelle je ris, je pleure, je cause et je pense

Le Chef d'Oeuvre Inconnu de Balzac. Extrait :

"Ma peinture n'est pas une peinture, c'est un sentiment, une passion ! Née dans mon atelier, elle doit y rester vierge, et n'en peut sortir que vêtue. La poësie et les femmes ne se livrent nues qu'à leurs amants ! possédons-nous le modèle de Raphaël, l'Angélique de l'Arioste, la Béatrix du Dante ? Non ! nous n'en voyons que les Formes. Eh ! bien, l'oeuvre que je tiens là-haut sous mes verrous est une exception dans notre art. Ce n'est pas une toile, c'est une femme ! une femme avec laquelle je ris, je pleure, je cause et je pense. Veux-tu que tout à coup je quitte un bonheur de dix années comme on jette un manteau? Que tout à coup je cesse d'être père, amant et Dieu? Cette femme n'est pas une créature, c'est une création. Vienne ton jeune homme, je lui donnerai mes trésors, je lui donnerai des tableaux du Corrège, de Michel-Ange, du Titien, je baiserai la marque de ses pas dans la poussière; mais en faire mon rival ? honte à moi ! Ha ! ha! je suis plus amant encore que je ne suis peintre. Oui, j'aurai la force de brûler ma Belle Noiseuse à mon dernier soupir; mais lui faire supporter le regard d'un homme, d'un jeune homme, d'un peintre ? non, non ! Je tuerais le lendemain celui qui l'aurait souillée d'un regard ! Je te tuerais à l'instant, toi, mon ami, si tu ne la saluais pas à genoux ! Veux-tu maintenant que je soumette mon idole aux froids regards et aux stupides critiques des imbéciles ? Ah ! l'amour est un mystère, il n'a de vie qu'au fond des coeurs, et tout est perdu quand un homme dit même à son ami : - Voilà celle que j'aime !"...

A lire en entier (seulement 20 pages!) pour en comprendre la ferveur. Une magnifique réflexion sur l'art. Il a inspiré au cinéma le film La belle noiseuse à Jacques Rivette en 1991.

J'ai découvert avec bonheur ce texte il y a quatre ou cinq ans, je ne sais pourquoi j'y repense ce soir.

lundi 16 août 2010

Vie et destin, Roman Polanski

Une semaine sur Roman Polanski sur France Culture, chaque matin. Passionnant. Une vie tragique.
Sans savoir que l'émission lui était consacrée j'ai emprunté la semaine dernière le DVD de son film Lunes de fiel tiré du roman de Pascal Bruckner que j'ai regardé ce soir. En bonus une interview de Emmanuelle Seigner et un long entretien de Pascal Bruckner. Deux entretiens qui aident à la compréhension de ce film, pour le moins déroutant.

"Dans ce bateau de luxe où ils ont échoué, Mimi (Emmanuelle Seigner) et Oscar (Peter Coyote, formidable) s'apprêtent à piéger un couple déjà en faillite, mais encore trop digne pour être vraiment défait. C'est à l'homme qu'ils s'attaquent, bien sûr : c'est tellement plus facile... Nigel (Hugh Grant) ne connaît pas la perversité d'autrui. C'est dire qu'il ignore la sienne. Parce qu'elle est femme, sa femme, Fiona (Kristin Scott Thomas, parfaite) est plus claire. « Tout ce que tu feras, je le ferai en mieux », dit-elle à Nigel lorsqu'elle le sent sur le point d'être aspiré dans le cercle ­ vicieux, bien sûr ­ d'Oscar et de Mimi. Nigel est un spectateur. [...]
Un couple, qui se tue à jouir et qui finit par jouir à se tuer. La chute de deux corps dans la mort... Désir. Possession. Torture. Destruction. Le parcours est clair, net et précis."
Télérama.

Un film angoissant, destructeur avec quelques scènes où l'érotisme devient douleur, poussé à son paroxysme. La scène du baiser où Kristin Scott Thomas danse avec Emmanuelle Seigner ne laisse pas indifférent. Du tout;o).

Bon, je l'ai vu, sans ennui, avec un un certain intérêt. Il semblerait que le scénario, les personnages - selon Pascal Bruckner - ne reflètent pas ceux du livre, Roman Polanski aurait "adoucit" la violence des personnages (Mimi et Oscar) et censuré des scènes scatologiques (dixit P. Bruckner); on l'en remercie.

dimanche 15 août 2010

Tant que le bourdon butine j'ai pas le bourdon

Ce matin au réveil ciel incroyablement bleu (on nous annonçait un mauvais temps), les mouettes ont commencé leur joyeuse chorégraphie rieuse – ou l’inverse, au choix !
Courte nuit ou plutôt longue nuit sans sommeil, troublée par mes pensées et d’horribles crampes. Ma cure de magnésium et autre grigri ne servent à rien.

A midi, sur un coup de tête, au son des cloches, tandis que les chrétiens sortent de l'église après la messe, je commence à poncer le bas de la porte d’entrée qui s’écaille, profitant de l’absence de mon voisin, en vacances. L’ancien propriétaire m’avait laissé un pot de peinture de la couleur adéquate pour repeindre la porte (sic). Gonflé ! Il aurait pu le donner à mon voisin. Bonne poire, ou bonne pomme, c’est selon, je me lance. Deux couches pour le bas, demain je donnerai une troisième en repeignant toute la porte dont le reste n’est pas abîmé. Je déteste les jours fériés; j'adore bosser les jours fériés.
Une femme seule doit savoir bricoler !

Stupéfiant, il est 14 heures, je prends un café sur la terrasse, je lève les yeux et je vois un arc-en-ciel qui entoure le soleil, oui, qui encercle le soleil. Jamais vu ça. J’essaie de le photographier, cadrant au pif car je ne peux pas regarder le soleil en face. Le résultat n’est pas probant ni à la hauteur de ce que je vois.




Tant pis, l’essentiel n’est pas dans la photo mais dans le regard. Ici on ne voit pas l'arc-en-ciel.

Plus tard… je tente une sieste pour récupérer le manque de sommeil. Je n’y arrive pas, trop de choses dans la tête pour somnoler.
C’est la Sainte Marie : bonne fête maman. Je pense à ta succulente tarte aux pommes, à ta solitude aussi, à ces mots écrits sur un petit bout de papier, retrouvé, après ta mort : "je ne trouve plus mes mots, je cherche mes mots, je dois les agacer". Putain tu me manques tiens. J'adore dire des gros mots quand je pense à toi. Je pense…. je pense… je pense… Quand vais-je arrêter de penser ?
Alors je lis. Ceci – c’est étrange au moment où je pense à ma mère :
"Cette année aussi, ma mère s’est installée pour ses vieux jours dans un appartement où elle sera seule, le dernier ?"
Paul Nizon, Journal, le 16 novembre 1976, Zurich.
Et je me souviens de toi maman quand tu étais dans ton appartement, seule.
Aujourd’hui, c’est moi qui suis installée, seule, dans mon nouvel appartement; le dernier ? Je l’espère. Je préfère mourir avant qu’on ne m’emmène ailleurs.

Qu’est-ce que c’est ? Un pétard vient d’exploser en bas de chez moi ; envolée de pigeons et tourterelles effrayés. Puis un deuxième pétard, les cons !
Et maintenant j’entends un bruit qui cogne. C’est le 15 août, le quartier est vide. J’ai laissé la porte de l’entrée ouverte pour que la peinture sèche.
Je me drape dans mon paréo, je descends en trombe les escaliers craignant qu’un cinglé mette un troisième pétard dans le hall. Pas d'artificier en vue, youpi! Je tâte la peinture, à peine sèche, c’est de la glycéro. Je pousse tout de même la porte sans la fermer complètement. Suis pas trouillarde heureusement. Ma devise c’est : il n’arrive malheur qu’aux trouillards ! J’y crois sans savoir pourquoi. Comme pour les chiens : seuls ceux qui en ont peur se font mordre.

17 h 30. J’écris tout ceci dans mon cahier sur ma terrasse, en écoutant Philippe Sollers sur France Culture qui parle de Bordeaux, qui s’interrompt de temps en temps pour nous laisser entendre ses divins choix musicaux.

Tout va bien, la vie est belle ?


Oui, la vie est belle - malgré tout... ce qui ne va pas bien - puisque le bourdon butine, tout près de moi.

samedi 14 août 2010

Parlez-moi d'amour


Une journée comme je les aime.
Je me demande ce que seraient ces journées sans France Culture ?
Quelques phrases retenues de mon écoute :

"Le pur amour pose l’absence de tout intérêt. Dépossession de soi". Il s'agirait ici d'amour religieux le sujet étant Bossuet, mais le "pur amour" vaut pour tout amour.
Répliques.

« Je suis un homme très fidèle. Il y a les amours nécessaires qui imposent une fidélité à toute épreuve mais qui n’empêchent pas les amours contingentes. C’est une escroquerie de penser que la sexualité peut se satisfaire de la fidélité. Chacun doit faire ce que bon lui semble, l’essentiel est de ne jamais en parler, ne pas faire comme Sartre et Beauvoir parlant sans contrainte de leurs amours contingentes. »
Je reproduis ici approximativement ce que disais Philippe Sollers que l’on peut réécouter ici.

En parcourant quelques blogs, un peu de frivolité, c’est l’été et il fait parfois chaud… Lire le billet de Eric Poindron dans son Cabinet de curiosités toujours étonnant.

ici sur Paul Nizon et ce Journal.

Oui, une belle journée comme je les aime, quand ça me parle d’amour, d’amours…


La lectrice de Jacques Henner.
Tiré de Les femmes qui lisent sont dangereuses,
de Laure Adler et Stefan Bollmann (Flammarion).


Lecture sur ma terrasse, en peignoir ;o), la chaleur n’est pas ici.

10 mai 1976, Paris.
[…]
Je n’ai jamais voulu être un chasseur d’actualités, j’ai toujours recherché le signifiant, disons même : le grand. Et c’est ainsi que je veux aborder le thème de "Salve Maria". Ce ne sera en aucun cas une mise à jour de mon autobiographie. Ce sera quelque chose de très profond, fait d’amour, de lointain (d’éloignement), de miracle et de mystère, implanté dans une situation juvénile pleine d’éclat, et dans une ROME imaginaire. A en retenir son souffle et à en écarquiller les yeux. Quelque chose d’entièrement "inventé", de jamais vu et en même temps d’éternel. Le mythe de l’amour ?
"Salve Maria" montre un jeune homme qui entre dans la vie comme par un escalier, par une belle passerelle, et rencontre une jeune femme dont il tombe terriblement amoureux. Mais au moment où il découvre qu’il l’aime, tout est déjà fini. C’est comme la conjonction de deux astres qui auraient des orbites différentes et dont l’union serait donc impossible. Il y a quelque chose de cruel, de mortellement triste, un tragique presque antique dans cette idée, et en même temps quelque chose d’extraordinairement beau. Je veux décrire cet onirisme de l’occasion manquée et de la rencontre impossible, ou plutôt : de cette occasion qui est déjà manquée avant que l’histoire commence, et toute la suite ne serait qu’épilogue.
Il flotte une lumière étrangement éclatante sur ce décor.

Il faut que j’invente librement, sans partir de ma story, je veux dire : de mon autobiographie.
La figure du TEMOIN
.

Paul Nizon, Le livret de l’amour, Journal 1973-1979. Pages 134-135. Un bel article à lire

vendredi 13 août 2010

Garder son jardin secret

Hier 19 h.
On s’était donné rendez-vous au XXI pour prendre un verre dans un bain de foule (de touristes). Elle sortait de son bureau et était là, la première ; d’habitude c’est moi qui arrive avant elle. J’étais contente que ce fut elle la première, cela voulait dire qu’elle n’était plus angoissée à l’idée de se retrouver seule attablée dans un café. Elle progresse. D’ailleurs elle va beaucoup mieux, elle va même bien en ce moment. Elle était en train de consulter son téléphone portable quand je suis arrivée.
On s’embrasse, se sourit. Le garçon nous saute dessus pour prendre notre commande. Les deux terrasses sont pleines, c’est très bruyant, parents avec des enfants qui n’en peuvent plus de se faire trimbaler en ville par ce temps qui n’incitait pas à la plage ; les cloches de la cathédrale qui sonnent, Dieu soit loué ;o), et viennent couvrir les cris des mômes.
- Comment vas-tu ?
- Bien et toi ?
Et blablabla… on se raconte ce qu’on veut bien se dire de nos histoires. Soudain son regard s’enfuit, zut, la voilà qui repart dans son monde me dis-je. Elle regarde son téléphone portable, il n’a pourtant pas sonné. Elle n’a pas de message. Puis elle commence à pianoter et envoie un message… à une de ses collègues de bureau qui se trouve sur la terrasse avec deux amies. Non mais je rêve! Elle me dit : j’ai envoyé un message à une collègue, celle qui est là-bas et elle me la montre. Et à partir de là, elle n’était plus avec moi. Elle regardait si sa collègue allait sortir son téléphone de son sac et lui répondre. Mais que nenni ! Pendant ce temps-là j’ai failli m’étouffer avec le Tabasco que j’avais mis dans mon jus de tomate. Hum !

20h. On se pointe au Cosy, sans réservation, il est tôt et le rez-de-chaussée est déjà complet. Une petite table de libre au 1er, on s’installe. Endroit assez insolite, restauration sur trois étages dans une maison ancienne du vieux quartier. Murs en pierres dont les jointures sont jonchées de pièces jaunes. Selon la patronne, les clients qui ont aimé l’endroit mettent une pièce dans le mur en espérant revenir dans ce restaurant et retrouver leur pièce (sic). C’est la Fontaine de Trévise de notre ville. Je n’ose pas prendre de photos, je sais que ça l’énerve quand je sors mon appareil ; l’endroit est plutôt sympathique. Derrière nous un couple d’anglais, à notre droite, deux couples d’italiens.
On commande et blablabla et blablabla… Elle me demande ce que je lis en ce moment et je lui sors le Journal de Paul Nizon de mon sac. Elle lit la quatrième de couverture, me le rend en me disant :
- Je n’y comprends rien !
Elle me demande si mon nouvel ordinateur me satisfait, si je suis contente de mon fournisseur Internet, qu’elle a des problèmes avec le sien, qu’elle n’a plus d’Internet en ce moment mais qu’elle s’en fout :
- Ça ne m’intéresse pas, Face book tout ça, les blogs, Internet, toute cette nouvelle communication m’agace et NE M’INTERESSE PAS !
- Ben moi ça m’intéresse, non pas Face book, mais de faire des découvertes parfois étonnantes via des blogs, via des recherches sur "gogol", tous ces nouveaux moyens peuvent enrichir culturellement si on sait faire le tri.
Et voilà que son téléphone sonne ; un message, elle le lit, un grand sourire sur son visage, elle me dit : c’est ma collègue, elle me demande où je suis ! (Ouais, c’est vachement intéressant ça).
- Tu vois bien que tu communiques toi aussi avec ces nouveaux moyens que tu décries.
- Oh mais c’est vraiment rare, faut que je ne puisse pas faire autrement me dit-elle avec aplomb !
- Mais c’est très bien lui dis-je pour l’encourager.
J’étais tellement contente de voir qu’elle allait mieux, qu’elle arrivait à sourire, qu’elle était allée au Festival de Cornouaille et à l’Interceltique de Lorient (c’est sa passion) , mais pas toute seule m’a-t-elle dit mystérieusement. Elle ne voulait pas m’en dire plus mais je devinais que c’était bon pour elle. Moi non plus, je ne voulais pas lui en dire plus de ce qui était bon et doux pour moi. Gardons notre jardin secret.
Je me demande ce qu’elle penserait de moi exposant ainsi un peu de ma vie sur la toile. Elle me prendrait pour une malade, sûr.

Le service est rapide, faut libérer des places, des gens font la queue dehors !

Il est 21 h 30, plus un nuage dans le ciel, c’est un comble, le soleil se fiche de nous et montre le bout de son nez avant d’aller se coucher après une journée plutôt grise. Elle s’était garée sur les quais ; nous faisons un bout de chemin ensembles. Je lui propose de venir prendre une tisane, écouter de la musique chez moi mais elle préfère rentrer, elle travaille le lendemain. On s’embrasse chaleureusement, je la sens toujours un peu fragile. C’est mon amie et j’aime nos différences. Je rentre tranquillement, la rivière est très haute, presque au ras des quais, sans doute une grande marée.

Le long des quais la fête foraine est installée jusqu’au 15 août.



Ça craint un peu, je vais tout de même faire une petite vidéo.


Vraiment ringard. Mais, ne jamais oublier que moi aussi je fus jeune et… craignos !

jeudi 12 août 2010

Une passion bafouée

Lettre d’une inconnue.

Stefan Brand (Louis Jourdan) est un riche pianiste qui aime sortir la nuit et séduire les femmes. Alors qu'il emménage dans un nouvel appartement, la fille de la voisine tombe sous le charme : elle l'épie, le suit, l'aime follement en secret. Elle le rencontrera un jour, ils passeront la nuit ensemble. Pour lui, ce ne sera qu'une passade, pour elle ce sera l'amour de sa vie.
C’est le portrait d’une femme sublime, Lisa, incarnée par Joan Fontaine ! L’amour dans toute sa gravité, sa dévotion, sa passion.

"Passion bafouée. Celle d’une femme dont le cœur bat en secret pour un pianiste volage qu’elle a croisé à trois reprises, qu’elle épie, qui l’ignore, auquel elle s’offre corps et âme, mais qui ne la reconnaît pas, ou trop tard, en recevant une lettre posthume dans laquelle elle avoue sa vaine quête : "Je n’ai que toi, toi qui ne m’as jamais connue et que j’ai toujours aimé." Seule la caméra rapproche dans un même mouvement les amants que tout sépare. La dévotion de la femme douce illuminée par un amour absolu se heurte à l’aveuglement d’un amant frivole aux abandons sensuels sans lendemains. Cette Adèle H. viennoise hante des lieux qui trahissent la malédiction de ses espoirs, son chagrin et l’irrémédiable incompatibilité du cynisme et du sacré."
Jean-Luc Douin.


Vu ce film hier soir (DVD emprunté à la médiathèque). Le deuxième film de Max Ophüls tiré de la nouvelle de Stefan Zweig. J’étais bouleversée; Joan Fontaine en femme désespérément amoureuse et Louis Jourdan en dandy frivole sont magnifiques. Deux destins croisés, gâchés. Un film superbe et mélancolique. Tout ce que j’aime.

La scène où il joue du piano rien que pour elle : elle s’agenouille près de lui pour l’écouter jouer, ferveur de son regard.
Lui : Promets-moi…
Elle : N’importe quoi.
Lui : Je ne sais pas où vous vivez. Promets de ne pas disparaître.
Elle : Moi je ne disparaîtrai pas. Elle lève les yeux vers lui, un regard intense, quêtant une réponse mais il se tait.

Cette autre scène, exquise : ils sont dans un train imaginaire, une sorte de manège enchanté, mû par un pauvre homme qui pédale pour faire avancer le train. Une suite de paysages et de pays traversés. Quand le train s’arrête Stefan paie la tenancière du "manège" pour repartir… dans un autre pays, dans un autre voyage, ici la Suisse (encore elle;o)). Ils ne regardent pas le paysage, le voyage est un prétexte, seul compte ce moment - que l'on voudrait parfois infini - de la découverte de l'autre, ce voyage du coeur, des sens, de l'âme. Quand le "voyage" est fini, Stefan revient vers la tenancière et la paie pour une nouvelle traversée de... tous les pays.... Que j'aime cette scène! Beaucoup de douceur, de volupté, mais c’est un film poignant, dramatique.


"Je le sais maintenant, rien n’arrive jamais par hasard. Chaque instant est mesuré. Chaque pas est compté."
[…]
"J’ai l’impression que vous comprenez ce que je ne sais même pas dire."

Je repensai ensuite à Madame de qui m'avait aussi chavirée mais dont je garde un souvenir plus léger et délicieux.

mercredi 11 août 2010

Même pas peur!

Cette nuit j'ai dormi avec une araignée sous mon oreille(r)!
Découverte en faisant mon lit ce matin, je n'ai même pas crié. Il faut dire qu'elle était minuscule mais pas du tout étouffée par les plumes, enfin, euh, par le latex veux-je dire; car, oui, j'ai enfin trouvé l'oreiller qui me convient... souvenez-vous...
Je voyais ses petites pattes tricoter. Je l'ai délicatement prise dans un chiffon et l'ai secouée par la fenêtre. Du coup j'ai tout de même passé la tête de loup un peu partout.
Mais elle ne m'a pas piquée.
Qu'en penserait Freud? (J'entends en ce moment M. Onfray... il nous parle du spiritisme, de la transmission de pensée, de l'inconscient, de l'ultra-sensible; vite écoutons-le).

Quelle vie passionnante.

mardi 10 août 2010

Quand je pense à toi

En parcourant les blogs hier soir, je lisais celui-ci, toujours intéressée de savoir pourquoi un écrivain est aussi un blogueur.

Et oui, encore la Suisse. Pourquoi m’intéressé-je ainsi à la Suisse ? Sans doute à cause de tes origines, de ta double nationalité. Mais aussi - je me répète - parce que c’est un pays d’artistes, d’écrivains, de cinéastes talentueux.

Ce matin je me suis décidée à changer le ruban adhésif qui "encadrait" ta dernière toile. L’ultime ; celle que tu as peinte alors que tu ne pouvais plus contrôler la moitié de ton corps, mais tu n’étais pas une moitié d’homme pour autant. Toile inachevée que tu as pourtant signée au pinceau, avec des bavures. Je l’aime, je ne m’en séparerai jamais. J’y vois ton cerveau bouillonnant, "tumoreux", amoureux.


En défaisant le scotch entoilé, je découvrais cet espace de la toile cloutée sur le châssis, que parfois les artistes peignent soigneusement (je trouve cela horrible), rempli de couleurs dégoulinantes et je trouvais cela beau.


J'ai tout de même recouvert cet espace d'un scotch entoilé neutre, tout neuf.


La voici prête, à retrouver sa place, derrière mon écran. Quand je lève les yeux, je m’y enfonce, comme dans une vague déferlante qui m’engloutirait. Mais en fond d'écran, sur mon ordinateur, c'est la vie que je voie, et j'ai encore plus envie d'être engloutie. Je ris, la vie c'est ça : l'amour, la mort, l'amour, la vie. Merveilleuse vie.


Les autres, les achevées, sont partout, sur les murs. Celle-ci, il n'y a que moi qui puisse la trouver belle, et intéressante. En réalité les couleurs sont plus sombres que sur ces photos.