mardi 25 février 2014

Une descente en enfer



Auguste Rodin, La Porte de l'Enfer (détail)

Passé deux nuits et deux jours d'enfer en enfer.
On parle souvent des vertiges sous une forme plaisante même s'ils sont là aussi douloureux, mais il y a des vertiges qui sont comme une petite mort ou du moins qui vous engloutissent vous anéantissent au point de ne plus rien contrôler de ce corps qui devient un corps de chiffon. Je voudrais crever quand je vis ces heures-là.
Oui, c'est bien l'enfer ces vertiges quand je ne tiens plus debout, que le plafond tourbillonne et que je m'accroche pour aller vomir (je sais c'est répugnant ce que j'écris). Je ne brûle pas dans cet enfer; ce sont mes larmes qui me brûlent quand la nausée me saisit. Les idées les plus noires se font claires, et vives. Une crise par mois depuis novembre, c'est trop pour avoir envie de vivre.
Je veux bien croire que mes vertiges - en dehors du fait du dérèglement de mon oreille interne - soient augmentés par mon angoisse de vivre. 

"Kierkegaard cerne l’angoisse sous son double registre à la fois psychologique et ontologique en révélant ainsi son point névralgique. Sur le plan psychologique, l’angoisse est liée au sentiment de culpabilité, ce que Kierkegaard illustre à travers son analyse du récit de la chute dans la Genèse. C’est précisément l’observation clinique d’un tel sentiment de culpabilité lié à la sexualité qui permettra à Freud d’engendrer tout l’édifice de la psychanalyse. Sur le plan ontologique, l’angoisse est liée à cet étrange mélange d’effroi et de fascination que suscitent en l’homme le néant et la mort, intuition fulgurante que Sartre et Heidegger développeront avec talent sans oublier leur « dette » intellectuelle pour le philosophe danois. Pour Kierkegaard, le point de jonction entre ces deux dimensions de l’angoisse se trouve dans la liberté. Dans le jardin d’Éden, Adam est angoissé par sa liberté du possible, car il peut violer l’interdit divin à tout instant. Le paradoxe insoutenable soulevé par Kierkegaard est celui d’une loi morale qui incite  l’être libre à la faute et qui pourtant est nécessaire pour extraire l’homme de l’animalité. Dans l’expérience de l’angoisse du néant l’être humain éprouve un sentiment de vertige ontologique face à l’infini des possibilités qu’engendre sa liberté. Dans le vertige physique, on est attiré par le vide qui pourtant nous effraye, tandis que dans le vertige métaphysique, on est fasciné par le néant qui est en même temps source d’effroi. Mais cette épreuve de l’angoisse est précisément pour Kierkegaard ce qui forme l’être humain à l’authenticité de la liberté…. "  
Sören Kierkegaard, Le concept de l'angoisse. 

"J’écrivais des silences, des nuits, je notais l’inexprimable. Je fixais des vertiges."
Arthur Rimbaud, Une saison en enfer, Délires II.



lundi 24 février 2014

Jaccottet et Nizon

Littérature jeudi 20 février 2014

Paul Nizon et Philippe Jaccottet distingués pour l’ensemble de leur œuvre

Paul Nizon. (Keystone)
Paul Nizon. (Keystone)
Paul Nizon et Philippe Jaccottet décrochent le premier prix suisse de littérature 2014 pour l’ensemble de leur œuvre. Les deux auteurs ont reçu chacun 40’000 francs jeudi au cours d’une cérémonie à la Bibliothèque nationale suisse, en présence du conseiller fédéral Alain Berset


Sept autres auteurs obtiennent également un prix pour une de leurs œuvres. Ils reçoivent 25’000 francs chacun.
Les récipiendaires sont David Bosc («La claire fontaine»), Roland Buti («Le Milieu de l’horizon») et Rose-Marie Pagnard («J’aime ce qui vacille»). L’écrivain tessinois Matteo Terzaghi est également primé pour son livre «Ufficio proiezioni luminose».
Outre Sarine, Urs Allemann («In Sepps Welt»), Vera Schindler-Wunderlich («Dies ist ein Arbeitszimmer im Ferien») et Urs Widmer «Reise and den Rand des Universums» sont aussi à l’honneur.
Coïncidence, les deux principaux prix sont attribués pour la deuxième fois à des auteurs qui vivent en France. Le poète, essayiste et traducteur Philippe Jaccottet, né en 1925 à Moudon (VD), est établi dans le sud de la France depuis 1953. Paul Nizon, né en 1929 à Berne, vit lui depuis 1977 à Paris.
Œuvres dans la Pléiade
Les deux auteurs ont déjà reçu d’importantes distinctions. Le Vaudois a reçu le Grand Prix Schiller en 2010 lors des Journées littéraires de Soleure. Le Bernois avait obtenu la même année le Prix autrichien de littérature.
Pour Philippe Jaccottet, la remise de ce prix intervient le jour même où les libraires ont mis en vente un volume de la Pléiade consacrée à son œuvre. Après Jean-Jacques Rousseau, Blaise Cendrars et Charles-Ferdinand Ramuz, le poète vaudois est le quatrième auteur suisse à être publié dans cette prestigieuse édition.

(Article paru dans Le Temps.ch)

Paul Nizon, j'en ai beaucoup parlé ici. Je suis une inconditionnelle. J'ai des lacunes pour Philippe Jaccottet, je vais essayer de les combler. Je n'ai lu que quelques extraits de sa Correspondance avec Gustave Roud.

samedi 22 février 2014

"Il était né pour écrire..."


Ernest Hemingway en 1923
(Photo de son passeport)
Engagé en novembre 1921 comme correspondant étranger du Toronto Star, il déménage à Paris, où il habite, avec sa femme Hadley, au troisième étage du 74 rue du Cardinal-Lemoine, dans le Quartier latin de Paris, de à .


La Closerie des Lilas en 1909.


Aujourd'hui, la terrasse est clôturée et
la clientèle hétéroclite est à l'abri du regard des badauds.

"Je m'assis dans un coin, dans la lumière de l'après-midi qui filtrait par-dessus mon épaule, et je me mis à noircir mon cahier. Le garçon m'apporta un café crème et j'en bus la moitié quand il fut un peu refroidi et laissai l'autre moitié dans la tasse pendant que j'écrivais.
[...]

[...]

Il n'était pas de bon café plus proche de chez nous que La Closerie des Lilas, quand nous vivions dans l'appartement situé au-dessus de la scierie, 113, rue Notre-Dame-des-Champs, et c'était l'un des meilleurs cafés de Paris. Il y faisait chaud, l'hiver; au printemps et en automne, la terrasse était très agréable, à l'ombre des arbres, du côté du jardin et de la statue du maréchal Ney, et il y avait aussi de bonnes tables sous la grande tente, le long du boulevard. Deux des garçons étaient devenus nos amis. Les habitués du Dôme ou de La Rotonde ne venaient jamais à la Closerie. Ils n'y trouvaient aucun visage de connaissance et nul n'aurait levé les yeux sur eux s'ils étaient venus. En ce temps-là beaucoup de gens fréquentaient les cafés du carrefour Montparnasse-Raspail pour y être vus et, dans un certain sens, ces endroits jouaient le rôle dévolu aujourd'hui aux "commères" des journaux chargées de distribuer des succédanés quotidiens de l'immortalité.
La Closerie des Lilas était, jadis, un café où se réunissaient plus ou moins régulièrement des poètes, dont le dernier, parmi les importants, avait été Paul Fort, que je n'avais jamais lu. Mais le seul poète que j'y rencontrai jamais fut Blaise Cendrars, avec son visage écrasé de boxeur et sa manche vide retenue par une épingle, roulant une cigarette avec la main qui lui restait. C'était un bon compagnon, tant qu'il ne buvait pas trop et, à cette époque, il était plus intéressant de l'entendre débiter des mensonges que d'écouter les histoires vraies racontées par d'autres. Mais il était le seul poète qui fréquentait La Closerie des Lilas en ce temps-là, et je ne l'y rencontrai qu'une seule fois. La plupart des consommateurs étaient de vieux barbus aux habits râpés, qui venaient avec leurs femmes ou leurs maîtresses, et arboraient ou non le fin ruban rouge de la Légion d'honneur au revers de leur veston. [...]
La présence de tous ces gens rendait le café accueillant, car chacun s’intéressait aux autres et aux apéritifs, cafés ou infusions qu'ils consommaient, et aux journaux et magazines fixés à des baguettes pour que leur lecture en fût facilitée, et nul ne songeait à se donner en spectacle.
On y rencontrait aussi d'autres consommateurs, des habitants du quartier fréquentaient la Closerie, certains d'entre eux décorés de la croix de guerre et d'autres avec le ruban jaune et vert de la médaille militaire, et j'observais avec quelle habileté ils remédiaient à la perte d'un de leurs membres, et évaluais la qualité de leurs yeux de verre et l'adresse avec laquelle leurs visages avaient été remodelés. [...]
En ce temps-là, nous n'avions aucune confiance en quiconque n'avait pas fait la guerre, mais nous ne faisons non plus entièrement confiance à personne, et pensions souvent que Cendrars aurait pu se montrer un peu plus discret sur la perte de son bras. J'étais heureux qu'il fût venu à la Closerie tôt dans l'après-midi, avant l'arrivé des habitués.
Ce soir-là, j'étais attablé à la terrasse, observant la lumière changeante sur les arbres et les maisons, et le passage des grands chevaux lents sur le boulevard. La porte du café s'ouvrit derrière moi, à ma droite, et un homme en sortit, qui se dirigea vers ma table.
"Ah! vous voilà", dit-il.
C'était Ford Madox Ford, comme il s'appelait lui-même alors, [...]."

Pages 104 - 105 - 106 - 107.

Ernest Hemingway, in Paris est une fête (A moveable feast), édition revue et augmentée, Gallimard, 1964 et 2011 pour la traduction française. (Avant propos de Patrick Hemingway).

"Cet ouvrage contient des matériaux tirés des remises de ma mémoire et de mon cœur. Même si l'on a trafiqué la première, et si le second n'est plus." (Ernest Hemingway).

(Mots en italiques, en français dans le texte).

4e de couverture :

"Édition revue en augmentée : Au cours de l’été 1957, Hemingway commença à travailler sur les «Vignettes parisiennes», comme il appelait alors Paris est une fête. Il y travailla à Cuba et à Ketchum, et emporta même le manuscrit avec lui en Espagne pendant l’été 59, puis à Paris, à l’automne de cette même année. Le livre, qui resta inachevé, fut publié de manière posthume en 1964. Pendant les trois années, ou presque, qui s’écoulent entre la mort de l’auteur et la première publication, le manuscrit subit d’importants amendements de la main des éditeurs. Se trouve aujourd’hui restitué et présenté pour la première fois le texte manuscrit original tel qu’il était au moment de la mort de l’écrivain en 1961. Ainsi, «Le poisson-pilote et les riches», l’un des textes les plus personnels et intéressants, retrouve ici ces passages, supprimés par les premiers éditeurs, dans lesquels Hemingway assume la responsabilité d'une rupture amoureuse, exprime ses remords ou encore parle de «l’incroyable bonheur» qu’il connut avec Pauline, sa deuxième épouse. Quant à «Nada y pues nada», autre texte inédit et capital, écrit en trois jours en 1961, il est le reflet de l’état d’esprit de l’écrivain au moment de la rédaction, trois semaines seulement avant une tentative de suicide. Hemingway y déclare qu’il était né pour écrire, qu’il «avait écrit et qu’il écrirait encore »...

Ernest Hemingway est né en 1899 à Oak Park, près de Chicago. Il passa tous les étés de sa jeunesse en plein bois, au bord du lac Michigan. En 1917, il entre au Kansas City Star comme reporter. Il s'engage en 1918 comme ambulancier de la Croix-Rouge sur le front italien. Après la guerre, Hemingway reprend en Europe son métier de journaliste. En 1936, il devient correspondant auprès de l'armée républicaine en Espagne. Il fait la guerre de 1939 à 1945, participe à la Libération de Paris avec la division Leclerc, puis continue à voyager : Cuba, l'Italie, l'Espagne. En 1954, Hemingway reçoit le prix Nobel de littérature. En 1961, il met fin à ses jours."

Mes derniers souvenirs de la Closerie, l'endroit est beau mais il ne m'a guère enchantée, on est loin de sentir la présence des artistes qui l'ont fréquentée; aujourd'hui c'est devenu un "monument" à découvrir pour les touristes (j'en fus) et une clientèle parisienne "bobo" plus que bohême. Cependant mon plaisir est toujours aussi vif quand je retourne sur ces lieux mythiques de ma jeunesse estudiantine, lors de mes escapades parisiennes. Il serait d'ailleurs temps que j'y songe... je me sens si vieille, j'ai besoin d'un bain de jouvence.
 
C'est en écoutant l'émission de Charles Sigel consacrée à Ernest Hemingway que j'ai eu envie de lire Paris est une fête

lundi 17 février 2014

Beg-Meil et Balbec : ces deux noms sonnent persans, comme un voyage en Orient (cf. Marcel proust)

 Les affiches de Chemins de Fer m'enchantent et me font rêver.


Affiche publicitaire vantant Beg Meil (1896)

Après des jours de pluie, de vent, de tempête, la clémence du ciel ce dimanche matin invitait à la promenade. Je me décidais pour le pays fouesnantais et Beg Meil où je n'étais pas allée depuis des lustres; j'en gardais le souvenir d'une station balnéaire assez chic. Ce n'était sans doute pas la meilleure saison pour y retourner mais l'air de la mer et la lumière me feraient du bien après ces jours sombres. Un petit coup d’œil sur mon écran avant de partir : qu'en dit-on sur la Toile?

"L'écrivain Marcel Proust y séjourna en 1895 et s'en inspira partiellement pour créer Balbec, la célèbre station balnéaire de la Recherche du temps perdu. Yves Guédon écrit en 1910 :

« De notre séjour au Grand Hôtel de Beg Meil nous avions rapporté le plus délicieux souvenir. Toute une colonie d'artistes illustres, à commencer par Sarah Bernhardt, François Coppée, Huguenet, l'homme volant qu'on appelle Latham, le poète Théodore Botrel, nos hommes d'état Briand et Viviani, d'autres encore, nous y avaient précédé. La plage de Beg Meil n'est pas étendue, mais elle est délicieusement assise, presque dissimulée, dans la Baie de Concarneau, abritée de tous les côtés par de grands arbres qui rendent les routes fraîches, à l'abri de la poussière. Après le bain, on peut s'y promener à l'aise et les amateurs de sport que l'été ne désarme pas, trouvent au Grand Hôtel, qui est un modèle du genre, le moyen de s'exercer au tennis, au football ; les enfants ont le trapèze et les pratiquants du canotage peuvent se livrer à leur exercice favori, sans crainte du vent et de la grosse mer. Reste encore la pêche, qui est fructueuse et sans danger.»"

"Proust rédige ici les premières pages de Jean Santeuil. On retrouve dans ce roman inachevé des description de Beg-Meil et des environs." (Source)

L'entrée dans la station est très cossue avec une allée centrale de palmiers majestueux, un seul remplirait ma terrasse! Je me dirige vers le centre : quelques restaurants, bars, crêperies sont ouverts, sans doute grâce aux vacances scolaires des parisiens. Je vais directement vers les plages et la pointe rocheuse. Le parking est plein, et quelques immatriculations annoncent des touristes. Ça souffle encore pas mal. Dans le sentier côtier on longe une forêt de pins dont quelques-uns fraîchement déracinés, probablement par la tempête Ulla. La plus terrible fut celle de 1987 (un ouragan) qui dévasta les dunes et aucuns des pins maritimes n'y résista.








De belles images plus ensoleillées, de Beg Meil ici.

De retour au parking, je repris ma balade sur le sentier côtier dans l'autre sens. Je m'arrêtai devant cette propriété dans un parc immense avec vue sur la grande plage. Le portail était ouvert, une fugitive pensée me traversa : certains "naissent avec une cuillère en argent dans la bouche"!





Ma promenade se termina sur ces gambettes colorées...


... j'aurais pu dire alors, comme R. Enthoven parlant de Socrate et de Théétète : "il n'est pas beau, ça arrive à des tas de gens très bien Paola."

J'avais envie d'aller prendre un thé pour me réchauffer, ça caillait tout de même, mais les cafés ouverts étaient dans le bourg. Je repris ma voiture et fis une halte à Sainte-marine où il est toujours agréable de siroter sur le port, la vue est admirable par n'importe quel temps! J'optai pour la crêperie, le Café de la Cale était fermé. Je testai la crêpe toute simple au beurre Bordier à la vanille de Madagascar, avec une bolée de cidre; tant pis pour le thé. Je m'attendais à un beurre fondu dans la crêpe. Que nenni, morceau de beurre dur comme du béton impossible à étaler sur la crêpe, je me demandai si ce morceau de beurre se mangeait tel quel (0_0), j'en coupai un morceau, le goûtai, du gras dans la bouche, même au-goût-de-vanille-de-Madagascar, écœurant :



Je mangeai ma crêpe en écartant le beurre-beurk! Pas du tout apprécié.



En allant régler l'addition, elle me demanda si j'avais aimé le beurre Bordier, je ne lui mens pas et je lui dis : pas du tout, il y en avait trop et je pensais qu'il serait fondu. Elle me répond : il nous est fourni dans cette dose individuelle. 
Pfff! Ce n'est pas une raison pour le servir dur et impossible à faire fondre. Manger du beurre à la petite cuillère (en argent ou pas) non merci. Ah mais! Cela dit, le beurre Bordier est très bon, nature, sur du pain, avec les fruits de mer mais l'excellence restera pour moi l'Echiré.

Au retour de ma balade, en reprenant la route j'écoutais la fin de l'émission Le Gai savoir et je riais encore en entendant cette autre phrase de Raphaël Enthoven, sur un ton désespéré :
"Le métier de professeur est très difficile Paola, car rares sont les bons élèves."
Émission passionnante que j'ai écoutée ce matin n'ayant entendu que des bribes hier : Socrate par lui-même.

samedi 15 février 2014


 
Günter Walraff


Il avait 42 ans en 1986 lorsque fut publié Tête de Turc.
Gilles PERRAULT parle de "Tête de Turc", qu'il a préfacé. Le journaliste Gunter WALLRAFF a écrit ce rapport après l'enquête qu'il a menée pendant deux ans et demi en Allemagne chez Tissen sur les conditions de travail des immigrés turcs dans l'industrie. Il a vécu le racisme au quotidien. Se masquer pour mieux démasquer la société et les perversités du système, telle a été la technique adoptée par WALLRAFF, qui s'était fait "une tête de Turc" pour devenir l'un d'eux. On peut voir un extrait du film "Ganz hunten", réalisé par Gunter WALLRAFF, dans l'émission Apostrophe de 1986. Gilles PERRAULT commente les images de Gunter WALLRAFF en train de se maquiller en turc, puis se rendant aux usines Tissen en minibus.


Plus récemment Gunter Wallraff appelle au boycott d'Amazon

La question du beau et du laid



"Rien n’est beau seul l’homme est beau. C’est sur cette naïveté que repose toute esthétique, elle en est la première vérité. Ajoutons-y d’emblée la seconde : rien n’est laid sinon l’homme qui dégénère, voilà qui circonscrit l’empire du jugement esthétique. Comme la physiologie le vérifie, tout ce qui est laid affaiblit et afflige l’homme, cela lui rappelle la décadence, le danger, l’impuissance, cela occasionne de fait en lui une perte de force. On peut mesurer l’effet du laid au dynamomètre ; là où l’homme est déprimé en général, il flaire la proximité de quelque chose de laid. Son sentiment de puissance, sa volonté de puissance, son courage, son orgueil, cela baisse avec le laid cela augmente avec le beau. Dans l’un comme dans l’autre cas, nous tirons une conclusion : les prémisses en sont accumulées dans l’instinct en quantité formidable. Le laid est compris comme un indicateur et un symptôme de dégénérescence. Le plus lointain rappel de la dégénérescence produit pour effet en nous, le jugement laid. Tout signe d’épuisement, de pesanteur, d’âge, de lassitude, toute espèce d’absence de liberté se manifestant comme crampe, comme paralysie, avant tout l’odeur, la couleur, la forme de la dissolution, de la décomposition, fut-ce sous la forme diluée à l’extrême du symbole, tout cela suscite la même réaction : le jugement de valeur, laid. Il y a là irruption d’une haine : qui l’homme prend-il en haine ici ? Mais cela ne fait aucun doute : le déclin de son type. Il hait depuis l’instinct le plus profond de l’espèce, cette haine contient de l’horreur, de la prudence, de la profondeur, de l’anticipation ; c’est la haine la plus profonde qui soit, c’est grâce à elle que l’art est profond."

Nietzsche, in Incursions de l'inactuel.

Extrait tiré de l'émission des NCC, Le Crépuscule des  idoles de Nietzsche.
Le Nietzsche de Dorian Astor





jeudi 13 février 2014

***




Toit en zinc ce midi après averse de grêle

mercredi 12 février 2014

"On va Exiter... mais la vie ça rend accro..."

Je pense à elle ce soir je ne sais pas pourquoi. 
Peut-être parce que j'en parlais hier?

En 2002 interview biographie lors de la sortie du film de 
Pedro Almodovar Parle avec elle.





Et voilà, il fallait que je tombe sur cette autre interview; il n'y a pas de hasard! Encore une raison de plus pour me sentir proche d'elle.
En 2012, quand Chaplin rime avec Berlin. 

"La Gazette de Berlin a rencontré Geraldine Chaplin, pour un entretien aussi court qu'intense. La fille du cinéaste mythique, au regard aigu et au rire explosif, nous livre avec une clairvoyance désabusée sa vision du grand âge et de la fin de vie."
La Gazette : Pour revenir sur le film*, est-ce que ça vous fait peur le grand âge? Est-ce une chose à laquelle vous pensez ?
Géraldine Chaplin : J'en ai une peur bleue. Je déteste l'idée d'être encore plus vieille que ce que je suis, mais bon, l'alternative c'est la mort... De toute façon, on est nombreux à être de Exit.

La Gazette : Exit ?

Géraldine Chaplin : En fait il y a un programme en Suisse qui s'appelle comme ça : Exit. Mais il y en a peut-être deux qui le font chaque année, alors que tout le monde est de Exit. La vie c'est hyper addictif ! Alors je suis de Exit, avec mon mari on va Exiter, mais je doute qu'on le fasse, parce que la vie ça rend accro... Peut-être si on a une maladie vraiment terrible qui fait beaucoup souffrir. Mais en tout cas, je ne veux pas être un fardeau pour les enfants.
C'est marrant ce film, parce que j'ai une copine depuis 50 ans, on a toujours pensé qu'on allait vivre ensemble quand nous serions vieilles. On est déjà vieilles et on vit pas ensemble. On n'en a pas eu le besoin. C'est un peu les aveugles qui soignent les aveugles. Mais c'est une idée sympa d'être des copains et de vivre ensemble. Mais c'est peut-être un désastre. On ne sait jamais. Mais c'est mieux que de vivre avec les enfants. Quelle horreur ! Les pauvres enfants. C'est horrible !
Je n'ai pas eu de grand mère, c'est un manque. C'est peut-être pour ça que je déteste autant la vieillesse ?"
Propos recueillis par Marion Muracciole et Régis Présent-Griot pour La Gazette de Berlin. (Extraits).

* "Et si on vivait tous ensemble aborde de manière fine et émouvantes des questions plus que jamais d'actualité. De la sexualité chez les personnes âgées à la relativité de la vieillesse, du cancer à la maladie d'Alzheimer.
Que cinq amis décident d'emménager ensemble, cela s'est déjà vu. Mais que ces cinq là soient tous septuagénaires et abritent un jeune thésard allemand, qui prend leur communauté comme sujet d'étude, est déjà plus intrigant."


Est-ce plus rassurant d'être deux - de le faire à deux - que seul(e) pour Exiter? Je pense que oui. Rien n'est plus angoissant - pour n'importe quel motif - que d'affronter la vie ET la mort dans la solitude. "Exiter" c'est être assisté, aidé, c'est vraiment mieux que de se retrouver sur un brancard aux urgences à 97 ans pendant 24 heures!!! dans le couloir, comme dans un terrible reportage que j'ai vu hier! Ne pas attendre que la mort vienne...


Il n'aurait fallu
Qu'un moment de plus
Pour que la mort vienne
Mais une main nue
Alors est venue
Qui a pris la mienne

Aragon

mardi 11 février 2014

***

Une série de merveilleuses photos à voir ici.

***

Moral en berne.
Oui, je sais, c'est ch... les déprimés.
Rayon de soleil pourtant aujourd'hui.
Sortir.
Centre-ville aussi mort que samedi avec beaucoup de magasins fermés.
Pris un chocolat au XXI. Toujours aussi aimable (adorable) le patron.
Je lis la presse locale. Rubrique sportive. Sourire. Je trouve qu'il a une belle cambrure ce lutteur en kilt! Franchement, il est plus élégant que son adversaire [Rires]. J'aime les hommes en jupes et les femmes en pantalon (0_0)! Je me verrais bien au bras d'un Sean Connery en kilt et moi en Géraldine Chaplin en smoking! (En rectifiant un tantinet les âges pour la concordance).



Lutte écossaise. La Bretagne accueille les internationaux de back-hold
qui accueillera des lutteurs venus d'Écosse, d'Angleterre, de Sardaigne et de Pologne.

lundi 10 février 2014

Petit à petit l'oiseau fait son bonnet (0_0)







Vu il y a quelques jours un film de Jean Rouch : JAGUAR tourné en 1954 et finalisé en 1967.

Lam, Illo et Damouré sont trois jeunes gens qui décident de partir à l'aventure, en suivant la route de leurs ancêtres qui mène en Gold Coast, pour gagner beaucoup d'argent et ramener les merveilleuse marchandises de la Côte.
Lam est l'un de ces bergers nomades qui vivent dans la brousse du Niger. Illo, lui, est un chasseur d'hippopotames; il habite tout naturellement au bord du fleuve. Quant à Damouré, c'est un jeune élégant du village de Ayorou qui passe ses journées à monter à cheval. Autrefois, les hommes du fleuve, de la brousse et des villages se faisaient la guerre. Aujourd'hui, ils ne se rencontrent que chaque semaine au marché, où toutes les décisions importantes sont prises. Ainsi, Illo est venu vendre du poisson, Lam, un taureau, Damouré lui, fait l'écrivain public, le plus simplement du monde.


"C'est avec ce film que Jean Rouch inaugure une nouvelle façon de tourner, suite à une discussion avec Damouré Zika lors de La Chasse à L'Hippopotame : Damouré après la projection demande à Rouch de faire maintenant un vrai film de cinéma avec lui. Chaque matin les acteurs et Jean Rouch décident des scènes à tourner la journée, Rouch filme avec une caméra très légère à l'épaule (sans prise de son des dialogues), puis à la fin le film est projeté et les acteurs dialoguent et commentent le film afin d'en reconstituer la bande son. Le film influencera grandement ce qui deviendra la Nouvelle Vague."
(Source Wikipédia)

Jean Rouch (1917-2004) est un cinéaste-photographe-ethnologue, il fut également directeur de la Cinémathèque française. Voir ici sa filmographie, biographie, photos... (un beau site).

J'ai capturé quelques images du film et me suis permise ce petit montage, avec un accompagnement musical (Crawling' Kingsnake, Etta James) qui n'est pas du tout celui du film. Le temps de pause des images est un peu trop long mais je n'ai pas voulu "tronquer" la musique. Donc, à regarder, ou pas.




A voir (ou pas) ici film complet avec de meilleures images et le joyeux accent ensoleillé de Damouré et ses compagnons. On parlerait aujourd'hui d'un road-movie.

Je me suis demandée pourquoi le film était dédié à Gérard Philipe et quelques recherches m'ont appris que l'acteur était décédé deux ans après le tournage du film de Jean Rouch et que Anne Philipe était, avec Jean Rouch, à l'origine de la création du Comité du film ethnographique.

"Née le 20 juin 1917 à Bruxelles, Anne Philipe fait ses études en Belgique, puis s'installe en France au début de 1939. En 1951, elle épouse le célèbre comédien et acteur de cinéma Gérard Philipe (mort en 1959). En 1955 paraît sous le titre Caravane d'Asie le journal du voyage exceptionnel qu'elle a fait en 1948 après un séjour d'un an en Chine : elle avait entrepris de revenir vers l'Inde par la Route de la soie et était la première Française à traverser le Sin-Kiang avec une caravane de marchands qui se rendaient au Cachemire. Auteur de plusieurs documentaires sur l'Asie et l'Afrique, Anne Philipe est, avec Jean Rouch, à l'origine de la création du Comité du film ethnographique. Elle a publié notamment dans Le Monde et dans Libération des reportages sur Cuba, le Venezuela, le cinéma japonais, et a assuré pendant un temps dans Les Lettres françaises la critique des films scientifiques et documentaires. Elle a écrit aussi Le Temps d'un soupir, récit d'inspiration autobiographique paru en 1963, et Les Rendez-vous de la colline (1966). Anne Philipe est décédée en 1990." 

samedi 8 février 2014

Le mariage des dolmens et des mosquées : un beau rêve de barde

"Celui qui ajourne le moment de bien vivre, 
attend comme les paysans que la rivière ait fini de couler."
Horace, extrait des Épîtres.

Le centre-ville était abandonné aujourd'hui, la plupart des magasins fermés, toutes les nuits la rivière déborde. Certaines portes étaient ouvertes et j'apercevais des tuyaux de pompage, des intérieurs de magasins dévastés. Faire des photos, en présence des propriétaires des lieux me paraissaient indécent. Mais le pire est ailleurs, dans d'autres villes, bien plus touchées.







Gardons l'espoir de jours meilleurs. Un peu de poésie avec cet écrivain-poète qui a su si bien célébrer la Bretagne, et ici l'Ouest et le Sud.

 
Je vous salue mes grands oiseaux
qui couvez dans mon cœur des
élans maritimes
je vous salue brousse de houles
je vous célèbre forbans et paladins
..........................................................
J'ai vu, Amer,
des eaux pareilles au lait
des chamelles rieuses
féconder les vallées chérifiennes
ô vie, ô séguias, ô glèbe femelle!
A Témara, prés de Salé
j'ai pleuré sur la splendeur
des mers sarrazines désertées.
Et j'ai rêvé de toi, gardienne
de l'extrême Ouest.
Ah quand allierai-je à tes noroîts
le miel des aurores africaines?
Ah quand allierai-je la vigueur de tes chênes
à la sensualité des figuiers ?

Partir pour revenir à toi
voguer pour retrouver tes abers
te haïr pour férocement t'aimer
....................................................................

Et ceci sera mon testament
à mes Berbères je lègue
les oiseaux des Glénan
et le sourire de Concarneau
à mes Berbères je lègue
l'allégresse des fontaines
et les printemps du pays Gallo.

Et ceci sera mon testament
à mes amis je lègue
l'alliance de l'Ouest et du Sud
le mariage des dolmens
et des mosquées
et les fiançailles des roses
d'avec les oliviers.


Xavier Grall, Le rituel breton, poème lyrique, extrait.

jeudi 6 février 2014

Le plaisir est dans la rareté



Le quotidien, depuis des semaines : pluie, vent, grêle, tempêtes.


Ici, il n'y a pas eu mort d'homme, heureusement. Les dégâts sont énormes et j'ai bien fait de ne pas renouveler mon abonnement cette année! Deux après-midi par mois, toute une année, je n'en pouvais plus. Les dernières semaines, je ne faisais que barboter rapidement dans la piscine, puis lecture d'une heure dans la salle de repos et contemplation insatiable de la baie; puis je quittais rapidement le centre pour faire une promenade au bord de la mer, avec une jouissance accentuée par l'ennui que je venais d'éprouver à la thalasso. Le plaisir du début était devenue une corvée*, presque une appréhension, à l'idée de côtoyer cette population qui venait faire des cures de quelques jours, d'une semaine, pour moult raisons : se ressourcer, perdre du poids, ou autres... peut-être aussi dans l'idée de faire une cure jouvence? Utopie! Leur programme de la journée en main : massages, enveloppements, gym aquatique, trois ou quatre soins dans la journée, pendant six jours. Épuisant! Un autre genre d'usine avec des soins à la chaîne et un personnel souvent las et on le comprend.

* Le plaisir est dans la rareté.

"La rareté du fait donne du prix à la chose" (Jean de La Fontaine)

mercredi 5 février 2014

***


 



Les seules sucreries que j'aime ce sont celles qui sont salées! me disais-je en prenant mon petit café avec un palet à la fleur de sel. Mmm! ce goût exquis... de sel et, de caramel. Ceux-là, on ne les trouve pas dans les grandes surfaces. Non mais! Toutefois, après vérification, la boutique est en ligne. Ils sont au même prix que dans le magasin où je les achète (chers, mais, miam!). Côté pratique : par deux dans des sachets hermétiques. 
Interdit à ceux qui sont au régime sans sel. 
Réservé à ceux qui sont en bonne santé : like me, of course!
Caramel, beurre de baratte, fleur de sel, que du naturel + un bon coup de vent et une pluie battante (notre quotidien ces temps-ci) : bonne mine de Bécassine assurée! 


mardi 4 février 2014

Je ne puis respirer que dans les régions inférieures


 "Être insignifiant et le rester"




"En vérité, je n’ai jamais été un enfant, c’est pourquoi, je le crois fermement, je garderai toujours quelque chose de l’enfance. Je n’ai fait que pousser et vieillir, mais le fond est resté. J’ai gardé autant de goût pour les incartades qu’il y a des années, mais voilà, justement, je n’ai jamais fait vraiment d’incartades. Il y a bien longtemps j’ai blessé mon frère à la tête. C’était un événement, mais pas une incartade. Bien sûr, j’ai commis une foule de sottises et d’enfantillages, mais l’idée des choses m’intéressait toujours plus que les choses elles-mêmes. J’ai commencé très tôt à tirer de tout un sentiment de profondeur, même des sottises. Je ne me développe pas. J’affirme cela comme ça, en l’air. Peut-être ne porterai-je jamais ni branches ni rameaux. Une beau jour ma personne et ma conduite dégageront une quelconque odeur, je serai fleur et je répandrai un léger parfum, comme pour mon propre plaisir, puis je baisserai la tête, cette forte tête que Kraus appelle sotte et orgueilleuse. Mes bras et mes jambes deviendront étrangement flasques, mon esprit, ma fierté, mon caractère, tout, tout se brisera et se fanera, et je serai mort, non pas vraiment mort, mais mort d’une certaine manière, après quoi je végéterai peut-être encore pendant soixante ans. Je vivrai vieux. Mais je n’ai pas peur de moi. Je ne m’inspire vraiment aucune peur. Je ne respecte pas du tout mon Moi, je me contente de le voir et il me laisse froid. Oh, s’échauffer ! Comme c’est magnifique ! Je serai toujours capable de m’échauffer, car rien de personnel ni d’égoïste ne m’empêchera jamais de me passionner, de m’enflammer, d’éprouver de la sympathie. Comme je suis heureux de n’avoir rien découvert en moi qui fût estimable ou curieux ! Être insignifiant et le rester. Et quand une main, une circonstance, une vague me soulèveraient et me porteraient jusqu’en haut, là où règnent la puissance et le crédit, je détruirais l’état des choses qui me serait favorable, et je me jetterais moi-même au fond de l’obscurité basse et futile. Je ne puis respirer que dans les régions inférieures."

Robert Walser, in L’Institut Benjamenta (Jakob von Gunten), éditions Gallimard, collection L’Imaginaire, 2004. Editions Grasset, 1960. Titre original : Jakob von Gunten, 1909.

«Nous apprenons très peu ici, on manque de personnel enseignant, et nous autres, garçons de l'Institut Benjamenta, nous n'arriverons à rien, c'est-à-dire que nous serons plus tard des gens très humbles et subalternes.» Dès la première phrase, le ton est donné.
Jakob von Gunten a quitté sa famille pour entrer de son plein gré dans ce pensionnat où l'on n'apprend qu'une chose : obéir sans discuter. C'est une discipline du corps et de l'âme qui lui procure de curieux plaisirs : être réduit à zéro tout en enfreignant le sacro-saint règlement.
Jakob décrit ses condisciples, sort en ville, observe le directeur autoritaire, brutal, et sa sœur Lise, la douceur même. Tout ce qu'il voit nourrit ses réflexions et ses rêveries, tandis que l'Institut Benjamenta perd lentement les qualités qui faisaient son renom et s'achemine vers le drame.
«L'expérience réelle et la fantasmagorie sont ici dans un rapport poétique qui fait invinciblement penser à Kafka, dont on peut dire qu'il n'eût pas été tout à fait lui-même si Walser ne l'eût précédé», écrit Marthe Robert dans sa très belle préface où elle range l'écrivain, à juste titre, parmi les plus grands.


4e de couverture. 


lundi 3 février 2014

Les Bretons de l'est

 

Fictions/ La Vie moderne

Episode 1

"- Ça va vous ?
- Trop aimable, merci.
- Je suis votre voisin du dessus, vous me remettez ?
- Comment donc, allons...
- Vous avez une seconde ?
- Absolument.
- Ce ne sera pas long.
- Je vous en prie.
- Vous êtes juif ?
- Pardon ?
- J'ai vu ça sur Internet.
- Ah, si c'est sur Internet, alors, oui, oui.
- J'aimerais savoir ce que c'est.
- Ce que c'est ?
- Oui, c'est quoi au juste ?
- Quoi donc ?
- Juif. (...) J'entends partout "juif, juif, juif", et je ne sais toujours pas ce que c'est, et comme il se trouve que nous sommes voisins... (...) Je me suis dit comme ça, entre voisins...
- Oui ?
- Vous pourriez peut-être me mettre au parfum ?
[...]
[...]
[...]
- Ma femme est de Quimper et mon grand-père maternel est né à Brest. Brest-Litovsk. Je suis, nous sommes, des bretons de l'est.
[...]
- Est juif celui qui ne nie pas qu'il l'est quand il l'est." (0_0) 

Pour la suite de la conversation, écouter... (ça ne dure que 7 minutes et c'est bien mieux avec le son!).
"Version brève et radiophonique de "Pour en finir avec la question juive" de Jean-Claude Grumberg, publié aux éditions Actes Sud, 2013."

(Dans quelle rubrique vais-je mettre ce billet! Racisme? Humour?)