mardi 18 mars 2014

C'est quoi le sujet?

Lundi 17 mars 2013.

J'entre dans son cabinet les joues en feu. Je suis stressée. J'ai noté sur un papier tout ce dont je voulais lui parler, pour ne pas oublier.
Derrière son bureau, après un bref bonjour, elle consulte son ordinateur, ne me pose aucune question, attend que je parle. Par où commencer? Mes vertiges bien sûr. Elle écoute, ne dit rien, n'est pas concernée. Juste trois mots : on n'a pas de traitement efficace, il faut vivre avec. Mon angoisse? Elle s'en fout. Lexomil? Elle m'en prescrit (je ne le prends pas). Stilnox? Elle m'en prescrit (je ne le prends pas). (Je les garde... en réserve...).
Pas une question, pas un conseil, pas une suggestion, aucune empathie, aucune compassion, la froideur totale. Je pourrais lui demander n'importe quel médicament sans qu'elle moufte? J'aurai dû lui demander du chlorure de potassium (0_0), ça l'aurait un peu secouée!
Elle ne me regardait pas, ne quittait pas son écran, imprimait les ordonnances.
Je n'avais pas eu besoin de lire ce que j'avais écrit sur mon papier, je savais ce dont je voulais lui parler mais je sentais tellement d'indifférence que je ne lui ai pas dit le dixième de ce que j'avais prévu. 
Elle me tend les prescriptions.
Je vous fais un chèque de combien? 
23 euros.
A ma dernière visite, il y a trois mois, elle n'avait pas pris ma tension. Je lui dis : vous ne prenez pas ma tension? (Je m'en fichais, mais je trouvais anormal qu'elle ne la prenne pas même si je savais qu'elle était normale, je la prends de temps en temps). Elle me répond : ce n'est pas le sujet aujourd'hui mais venez je vais la prendre! J'étais éberluée : il faut quel sujet pour prendre la tension quand on va chez le toubib? Mon visage congestionné par le stress n'était pas un "sujet" suffisant?
Elle était correcte, ma tension. Pas elle.
Je vais changer de généraliste. Je l'avais choisie au hasard, parce qu'elle n'était pas loin de chez moi, après que la mienne - merveilleuse, attentive, nous parlions de tout, de la vie - ait déménagée dans une autre ville, il y a trois ans.

Dans le miroir de l’ascenseur je regarde mon visage : joues écarlates, yeux brillants, rouges, je n'ai pourtant pas pleuré. Je tire la langue, comme un pied de nez, à moi? à elle?