vendredi 29 avril 2016

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"L"humour est une plante gaie arrosée de tristesse."





C'était en mai 2014, aujourd'hui le moulin à vent a triste mine
et la tête à l'envers. Comme moi. 
Il est temps de le mettre à la déchetterie!



"Quand je suis triste, je pense à vous, comme l'hiver on pense au soleil, et quand je suis gai, je pense à vous, comme en plein soleil on pense à l'ombre."
Victor Hugo

jeudi 28 avril 2016

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Hier soir je regardais pour la énième fois une cassette (oui, j'ai encore des k7!) vidéo sur l'Expressionisme abstrait. Il y a bien longtemps il y avait une excellente émission à la télévision qui s'appelait je crois, Palettes et j'avais enregistré celles qui m'intéressaient sur l’Expressionnisme abstrait : Jackson Pollock, Robert Motherwell et Jasper Johns. Ce sont de véritables documentaires sur ces artistes avec des témoignages de ceux qui les ont connus et côtoyés.

En regardant  Motherwell, je repensais à ce tableau (qu'on ne voit pas dans le documentaire) et je me posais la question : pourquoi a-t-il écrit,  je t'aime au lieu de I love you puisqu'il ne parlait pas le Français. Je n'ai que cette réponse : pour les étrangers, la France (et Paris en particulier) c'est le pays des amoureux. Hum! Bref, il aurait pu écrire je vous aime mais non, je t'aime

"La démarche intellectuelle de Robert Motherwell se caractérise par le large éventail de ses centres d'intérêt : la philosophie, la littérature symboliste, la psychanalyse et l’art oriental. Sa peinture va du lyrisme le plus violent à une sérénité presque austère. Le noir et le blanc ont été la base de Motherwell pendant plus de quarante ans : « le noir représente la mort, l'angoisse, le blanc représente la vie, l'éclat. »

Dans ce documentaire il dit ceci :

"Ce n'est pas tant ce que vous regardez qui compte mais ce que vous ressentez en regardant un tableau. [...] Il n'y a jamais eu de haine plus grande de la peinture que pour l'Expressionnisme Abstrait."

mardi 26 avril 2016

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Il ne faut pas avoir la jambe cassée pour jouer au golf sur le toit!


Néanmoins, la voiturette est une bonne idée 
pour les joueurs légèrement handicapés *_*

lundi 25 avril 2016

Cours magistral : Séance d'hypnotisme sans magnétiseur*

* Définition de Georges Elgozy dans L'esprit des mots ou l'antidictionnaire.

Conférence (suite)!



Cette conférence  sur l'histoire de ces deux villes ne fut qu'une lecture par le conférencier, sans anecdotes, sans photos interactives sur l'écran. C'était monotone, ardu, ennuyeux et cela a duré plus de deux heures. Pour ne pas m'endormir, au  bout de trente minutes, j'écrivais dans mon carnet mes impressions, du n'importe quoi j'en conviens, captant quelques bribes de mots. Nous partions du XIe siècle.

.  Le Léon et la Cornouaille : les riches dans le Pays du Léon (Brest), les pauvres en celui de Cornouaille (Quimper)...
.  Les Osismes (peuple gaulois)...
.  Les Voies Romaines...
.  Locmaria (Quimper) s'appelait Aquitonia...
. Brest  : Bristocus (mais les avis divergent) au Ve siècle, puis Brest-sur-Chevrette au XIe...
. La capitale était Carhaix  : Vorganium (Rennes : Vorgium)...
Puis nous passions du XIe au XIIIe siècle, dans un cours magistral. Mais nous n'étions pas dans un amphithéâtre. Nous avons tout de même eu le droit à une carte des Voies Romaines en Bretagne, sur l'écran, ainsi qu'un plan de Brest et de Quimper.
. Il faudra 250 ans pour construire la cathédrale de Quimper commencée au XIIIe siècle....
Précisons, je ne notais que des bribes de mots; les notes du conférencier (qu'il lisait d'une voix monotone) étaient très détaillées. Là, nous arrivions à la fin du XVe siècle et en étions à cinquante minutes d'historique. Je sentais déjà ma tête dodeliner. Réagissons rapidement avant de piquer du nez.
. Anne de Bretagne...
. Penmarc'h : fut le plus grand port d'armement d'Europe au XVIe siècle (ça valait le coup de le noter (0_0)).
. XVIIe. Richelieu va faire de Brest un port important.
A la fin de cette première heure mon cerveau n'enregistre plus rien. Le ton est toujours aussi monocorde et rien pour redynamiser le peuple d'auditeurs (peu nombreux).

Au milieu du XVIIIe je tente tout de même de sortir la tête de l'eau pour rentrer dans le sujet et me fixer sur le conférencier. 
(Je lis aujourd'hui la définition de "conférence" : " Au XXe siècle, les conférenciers sont passés du tableau noir, aux diapositives, rétroprojecteur, puis vidéoprojecteur et logiciels spécialisés (ici conférence sur la privatisation des savoirs). Depuis la fin des années 1990, une conférence peut facilement faire intervenir des personnes séparées dans l'espace et dans le temps grâce au téléphone (téléconférence), des enregistrements vidéo ou la visiophonie (visioconférence) ou directement sur Internet via des outils de travail collaboratif).") Ben oui, c'est bien ce que je pensais! Et, même pas de tableau noir pour notre conférencier.

Je regardais la lumière de la pièce  qui soudain sortait de l'ombre, le soleil projetant ses rais ((0_0) je poétise) par la fenêtre en éclairant quelques têtes plus ou moins chevelues. Cette percée fulgurante du soleil me donnait sérieusement envie de me carapater (j'argotise;-)) et d'aller manger une crêpe sucrée Place au Beurre (il était 20 heures). Vlatypa que nous venions d'entrer aussi dans le Siècle des Lumières. Coïncidence!  au moment où le soleil fit son apparition dans notre salle obscure.


Nous étions revenus (ou retournés) à Brest :
. La Penfeld :  Rive droite, Recouvrance, "quartier des ouvrier, des pauvres". Rive gauche, les riches, les bourgeois. La ville de Brest se situe à gauche (je parle du fleuve) d'où le terme de Brest-même pour signifier que l'on habite de ce côté-là. Hum! et avec l'accent, gast! (Je peux plaisanter, j'y suis née...).

La femme devant moi avait enlevé sa veste au début de la conférence et l'avait posée sur ses genoux; elle la remonte maintenant comme une couverture, jusqu'au menton (le Siècle des Lumières ne remplace pas un radiateur). Mes deux voisines de droite semblent s'ennuyer autant, sinon plus que moi (qui m'amuse un peu en prenant ces notes) : l'une baille et l'autre fouille dans son sac en faisant du bruit, puis elle se lève et va prendre une brochure qu'elle se met à lire! Son amie ouvre son journal et ne fait même plus semblant d'écouter le conférencier. L'impatience est perceptible dans la salle. J'entends encore :
. Quimper est touchée par le Siècle des Lumières...
Les auditeurs des deux premiers rangs (j'étais au dernier, avec les ânes et mes deux voisines, mais près de la fenêtre) étaient imperturbables mais je sentais une faible agitation quand on entama le XIXe siècle. Le XXe approchait, tout le monde se réveillait, après deux heures d'écoute.
. La Bataille des Cardinaux  (je relevais la tête, hé hé!), 1759.

 Bataille des Cardinaux (en) Battle of Quiberon Bay


La Bataille de la baie de Quiberon, Nicholas Pocock, 1812. 
National Maritime Museum

Puis on passa à la construction du
. Bagne de Brest (cf. Vidocq). De belle architecture (aujourd'hui disparu) il fut surnommé le "Versailles des bagnes". (Rajout personnel, en faisant mes recherches sur Wikipédia, tout cela commence à vraiment m'intéresser. J'ai le temps de m'attarder et de plus, j'ai des images).
 
Enfin, on arrive à la Révolution, youpi! J'ai mal au popotin sur ma chaise aussi peu rembourrée que icelui.
. Blancs/Bleus, rivalités des officiers.
A ces mots je me redresse vivement en pensant à l'injonction souvent prononcée de mon père : "tiens-toi droite si tu veux te marier avec un officier [de la marine]". Mais en vérité, je m'affessais
"La baisse de la vitalité se répercute dans la spiritualité. Une saignée, une ps., un éreintement affaissent l'âme aussi bien que le corps, elles affectent dynamiquement tout l'homme, dont la force s'écoule comme le gaz d'un aérostat. − Le ressort, l'élasticité, l'entrain sont donc le signe d'un superflu de vitalité, la fleur de la santé joyeuse, ... " H.-F. Amiel, Journal intime,25 janv. 1866, p. 96.

Une dame enfilait sa veste, signifiant ainsi son désir d'être arrivée au terme de cette conférence. J'espérais que quelqu’un donne le La en quittant discrètement la salle  pour la suivre. Il était temps de quitter le port, de larguer les amarres.

Oh! le conférencier vient de regarder sa montre et son débit s'accélère subitement. Le règne de Napoléon va vite être expédié, je le sens :
. Construction de l'abattoir à Quimper (0_0), très intéressant ce que je lis.
Pas besoin d'aller à l'abattoir, je suis laminée : mal au dos, aux fesses et début de migraine.
Je n'ai également écouté que d'une oreille distraite l'histoire des évêques de Quimper et des Diocèses bretons, pourtant capitale.

J'élague, c'est la fin, pas de questions dans la salle.  Même plus envie d'aller manger une crêpe, c'est vendredi soir il y a du monde dehors, sur les terrasses devant la cathédrale, tellement belle. Des pigeons près des Halles font la Java et picorent des miettes de gâteaux secs.



Cette conférence m'aura finalement donné l'envie d'en savoir plus, de faire quelques recherches, des lectures via le Net, ce qui est positif. Faire l'Historique de ces deux villes : Brest et Quimper en deux heures et quart est finalement un exploit, c'est tellement condensé, riche qu'il faudrait y revenir siècle par siècle, un travail de thésard?!?

Complément d'informations sur Wikipédia pour l'Historique de Brest et de Quimper! Ce drapeau de Brest (rajout personnel, on n'en a pas parlé) au XVe (superbe) a peut-être inspiré  Mondrian voire  Malevitch ?








dimanche 24 avril 2016

De, la Pudeur

Vendredi 22 avril.

Depuis trois semaines je suis en immersion avec Vincent. Il détestait son nom, imprononçable disait-il, Van Gogh. Il le détestait aussi pour d'autres raisons (j'en parlerai, peut-être). Il signait rarement ses tableaux et quand il le faisait il signait Vincent. [...] Une tendinite s'installe (golf elbow), je joue trop. J'y suis pourtant retournée ce midi. Je me suis sentie légère, aérienne dès que je suis arrivée au départ du 1. Dès que je suis  au golf, plus de noir : du vert, du silence (à part les grenouilles qui font un de ces raffuts, c'est la saison des amours paraît-il), une petite balle blanche, un bien-être total. Deux joueurs âgés (encore plus que moi) venaient de me doubler avec leur voiturette, sur le chemin qui mène au départ. Ils étaient en retard sur leur horaire et se sont excusés [...]. Un autre joueur attendait aussi au départ, seul. Nous avons laissé partir les joueurs en voiturette. [...] Nous avons peu parlé sur le parcours, j'aime les partenaires qui ne parlent pas beaucoup, on se concentre mieux sur son jeu. C'était agréable. J'avais mal au bras mais je jouais bien. Arrivés au 9 j'ai arrêté et il a continué pour faire 18 trous. [...] Tout à l'heure je fouillais dans mes archives, pour ma sœur; elle me demandait si le Weigelia que j'avais à la campagne avait des feuilles vert clair ou vert foncé (0_0)? Je pensais vert clair. Du coup j'ai recherché des photos (elles étaient vert foncé, on dira vert moyen!) et je revoyais avec un peu de nostalgie mon jardin et l'intérieur de ma maison; je leur trouvais un charme fou. Mon jardin était rustique, en harmonie avec le champ attenant tondu par des moutons.



Le Weigelia 



 Lavatère

Il ne faut pas regarder en arrière. Il faut aller de l'avant. Je ne peux vivre que le présent, au jour le jour. J'ai regardé d'autres photos et j'ai retrouvé celle-ci, prise au Guilvinec, en février 2004. Un chalutier... amoureux?


Ce soir à la Maison du Patrimoine il y avait une conférence : 

"Quimper et Brest sont-elles différentes? Le conférencier tentera de répondre en comparant l'histoire de ces deux villes, en analysant les racines historiques, géographiques et culturelles de leurs différences". J'y suis allée... (A suivre, peut-être, pas sûr c'était ennuyeux).


Dimanche 24 avril.

J'avais posté le billet ci-dessus (texte intégral) vendredi soir. J'écoutais ensuite une des émissions que j'avais ratée des NCC consacrée à La Pudeur. Je n'en dormis pas de la nuit et hier matin je supprimais ce billet qui, avait déjà été lu par un nombre non négligeable de visiteurs. Je le republie aujourd'hui, légèrement amputé. Je ne me suis jamais interrogée vraiment de savoir si parler ici de mon quotidien, de mes intimes pensées, était impudique ou honteux. Je ne le ressentais pas ainsi, j'écris pour moi-même, pour me libérer d'un trop plein d'angoisses, de mélancolie, de solitude, sans penser du tout - au moment où j'écris - au lecteur... jusqu'à ce que...
Il est temps que (le) je disparaisse de ce blog. Ça ne devrait pas être insurmontable.

[...] = texte supprimé.

jeudi 21 avril 2016

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Prince est mort!

Mon (modeste) hommage...

Cher esprit chère âme

Hier soir sur Arte.

JANE EYRE

On aime ou pas.  Romantique.
J'adore!



Je ne vous parle pas avec ma chair 
mais avec mon âme.


Scène finale ici

A l'adolescence j'éprouvais à la lecture du roman de Charlotte Brontë des émotions fortes qui me laissaient penser qu'il n'y avait d'amour que, absolu. 

Ce matin sur les ondes, entendu ceci, prouvé scientifiquement :

"Un homme qui partage sa vie avec une femme d'esprit serait préservé de la vieillesse."

Ohé les gars... je suis là! [Rires spirituels *_*]


lundi 18 avril 2016

Dans la presse...

... lue avec beaucoup de retard (JDD 27 mars et 3 avril 2016).

+ 24 %
"C'est la progression des ventes de la marque Porsche en France en 2015, avec plus de 5.000 voiture livrées. Dans le monde, la progression atteint 19 % et c'est une année record avec 225.000 véhicules vendus.
Du coup, la semaine dernière, la direction du constructeur allemand a annoncé l'octroi d'une prime exceptionnelle à la totalité de ses salariés. Elle s'élève à 8.911 euros [...] et non sans humour, une référence historique au modèle de la fameuse 911."
(Passionnant, euh! c'est mon côté Fangio qui se réveille).

"Légion d'honneur, cuvée de Pâques.
Décorations : un dessinateur, deux chefs étoiles, des élus..."
Je note que Benoîte Groult a reçu la décoration de Grand Officier, à 96 ans! Elle n'a toujours pas décidé d'appuyer sur La Touche étoile (publié en 2006, à 86 ans) et elle a eu raison.  Enfin, je-dis-ça-je-dis-rien. Hum!
« Je veux m’en aller, ma hotte lourde de souvenir et les yeux pleins de la fierté d’avoir vécu vivante jusqu’au bout. »
Une Croix d'honneur méritée.

"L'amour à perpétuité". Vous n'aurez pas ma haine de Antoine Leiris qui publie un bref récit des douze jours passés après le drame du Bataclan (son drame). Sa lettre m'avait bouleversée (je n'étais pas la seule à l'avoir été).
"[...] il a replongé dans ses chers bouquins, un asile plus utile à ses yeux que les cellules d'urgence psychologiques. Il vient d'achever Gros-Câlin, le premier livre publié par Romain Gary sous le pseudonyme d'Emile Ajar. Cette "histoire d'un mec qui adopte un python car il a grand besoin d'affection" l'a rassuré : "Je suis encore apte à sourire. Le chagrin est là, mais la vie aussi.".

Au Centre Pompidou, Paul Klee jusqu'au 1er août : une rétrospective avec 230 œuvres exposées!
Paul Klee : L'arme du rire (cf. Télérama).
Paul Klee : L'esprit railleur, l'ironie romantique.

Bon, il y a autre chose dans la presse de plus intéressant, mais tout de même Paul Klee et Gros-Câlin, ça vaut le coup de les noter.

(Je me demande dans quels libellés mettre ce billet? Divers? Variétés (0_0)? Hi!)
  • La réalité est si infiniment diverse qu’elle échappe aux déductions les plus ingénieuses de la pensée abstraite ; elle ne souffre pas de classifications nettes et précises. La réalité tend toujours au morcellement, à la variété infinie. (Dostoïevski, Souvenirs de la maison des morts, 1862)

***




Ruines du cœur

Mon cœur était jadis comme un palais romain,
Tout construit de granits choisis, de marbres rares.
Bientôt les passions, comme un flot de barbares,
L'envahirent, la hache ou la torche à la main.

Ce fut une ruine alors. Nul bruit humain.
Vipères et hiboux. Terrains de fleurs avares.
Partout gisaient, brisés, porphyres et carrares ;
Et les ronces avaient effacé le chemin.

Je suis resté longtemps, seul, devant mon désastre.
Des midis sans soleil, des minuits sans un astre,
Passèrent, et j'ai, là, vécu d'horribles jours ;

Mais tu parus enfin, blanche dans la lumière,
Et, bravement, afin de loger nos amours,
Des débris du palais j'ai bâti ma chaumière.


François Coppée




dimanche 17 avril 2016

Le jeûne de l'esprit, oui et, la jeunesse d'esprit

En tartinant mon toast à l'heure de mon p'tit dèj j'écoutais ce matin  (je ris mais c'est sérieux) cette émission : La vie liturgique, L'esprit du carême (alors que je suis à Théo grâce à Dieu) et j'entendais (à peu près ceci):

"Le carême est le temps du jeûne. Le Grand Carême est un temps d'attente. Le jeûne doit aussi être le jeûne de l'esprit, le jeûne des passions et des mauvaises pensées; il faut les abstraire."

Il était temps que je jeûne et me purifie! Pour le moment je petit-déjeunais,  je remettais le jeûne à plus tard et sans doute à la Trinité puisque Pâques était passé. En revanche je me disais qu'il serait bien en effet que j'abstraie de mes mauvaises pensées, celle de mourir à laquelle je pense si souvent. J'éteignais rapidement la radio pour augmenter le volume du son de mon CD et écouter religieusement ce passage du Dixit Dominus de Vivaldi qui me donne envie de mourir (ben voilà) tellement c'est beau. Je n'ai pas retrouvé ce morceau par l'ensemble choral de Lausanne dirigé par Michel Corboz (mon préféré, nettement supérieur et celui que j'écoute sur mon CD).

A propos du jeûne, c'est devenu à la mode : le jeûne thérapeutique (je rigole, je jeûne sans le savoir et je médite, en le sachant). On n'entend parler que de ses bienfaits et de nouveaux gourous en profitent pour s'en mettre plein les poches tandis que leurs adeptes se décomposent en quelques jours. Quels c..loches!


samedi 16 avril 2016

Chasseur le matin, poète l'après-midi, critique après le dîner*


* Quelle bonne idée! 

de Claude Didry invité de l'émission La Suite dans les idées : Le travail devrait faire l'emploi. 

"Le travail n'est plus à l'ordre du jour. [L'enjeu c'est l'emploi et donc le chômage] et pour faire disparaître le chômage il serait intéressant de faire disparaître le travail. Ce qui se joue c'est d'imaginer une société de mobilité radicale dans laquelle les individus - aurait dit Marx en son temps - sont chasseurs le matin,  poètes l'après-midi et critiques après le dîner. C'est une imagination qui me paraît - au regard des enquêtes d'emplois de l'Insee - complètement coupée de la réalité que vivent les membres de la population active."

Claude Didry pointe "les erreurs de diagnostics" sur lesquelles repose le projet de Loi El Khomri.  (Suite sur France-Culture).

Claude Didry, L'Institution du travail, Droits et salariat dans l'histoire, éditions La Dispute, 2016.

 

vendredi 15 avril 2016

Je sais ce que je suis


Hier soir, en regardant La Grande Librairie j'étais surprise d'apprendre que Roman Polanski avait accepté la réédition de cette autobiographie Roman par Polanski qui, apparemment est une réédition légèrement "augmentée" puisque le livre fait 544 pages au prix de 25 euros.
Je sortais alors de ma bibliothèque ce pavé de 497 pages (édition originale de 1984) que je vais peut-être relire... plus de trente ans plus tard.  Ma mémoire est de moins en moins performante, je peux donc le relire.  Cet ouvrage était alors édité chez Robert Laffont, au prix de 95 F. Cet homme, sa personnalité, ses souffrances, ses folies, sa vie ne m'ont jamais laissé indifférente et j'aime nombre de ses films.



4e de couverture (édition 1984)



"Je continue de faire les gestes d'un professionnel du spectacle, je sais raconter encore les histoires drôles et les jouer pour obtenir le meilleur effet, je ris encore beaucoup et j'aime la compagnie des gens qui savent rire, mais je sais au plus profond de mon cœur que l'esprit du rire m'a quitté. Ce n'est pas seulement le succès qui m'a blasé, ou que je suis aigri par le drame et mes propres folies. J'ai l'impression de besogner sans but discernable. J'ai le sentiment d'avoir perdu le droit à l’innocence, à la pure jouissance des plaisirs de la vie. Ma naïveté puérile et ma fidélité en amitié m'ont coûté cher - particulièrement dans mes relations avec la presse. Mais ma méfiance croissante est aussi destructrice.
Je sais bien que je passe aux yeux de bien des gens pour une espèce de gnome méchant et débauché. Mes amis - et les femmes de ma vie - savent à quoi s'en tenir. 
[...]  On a répandu sur mon compte tant d'inexactitudes, de malentendus et de véritables  calomnies que les gens qui ne me connaissent pas se font une idée entièrement fausse de ma personnalité. La rumeur publique, désormais amplifiée par l'énorme puissance des médias, vous crée un image qui s'attache à vous à jamais - une espèce de caricature qui passe pour la réalité. Je sais ce que je suis, ce que j'ai fait, et ce que je n'ai pas fait. Ce qui s'est passé et ce qui se passe."
(Page 496).

Roman Polanski, in Roman par Polanski, éditions Robert Laffont, 1984. Traduit de l'anglais par Jean Pierre Carasso.

jeudi 14 avril 2016

Deux belles heures





En voilà un qui ne fera pas de poussin.

Sous un ciel assez chargé qui ne se dégagera qu'à la fin de ma partie, je profitais hier (une fois de plus à l'heure du déjeuner) d'être seule sur le parcours de my private golf (je vais finir par le croire) pour faire quelques vidéos et, jouer deux balles : la mienne et la sienne [Rires]. Je donnais ainsi corps à l'absent. Bonne joueuse, je désignais celle qui était la meilleure sur chaque trou comme étant la sienne... jusqu'au 4. Et là, au 4, coup de fer 7 pour être sur le green, je tape ma balle (la plus éloignée du green) puis je vais taper la sienne avec un wedge et là, incroyable, elle arrive en roulant tout doucement EXACTEMENT à côté de la mienne. Bon sang, je ne le crois pas! Elles sont restées sur le plateau du haut, il reste un long putt en descente à faire. Délicat.


Je jure que ces deux balles sont arrivées comme ça (très mignonnes).
OK! les greens ne sont pas terribles en ce moment, le carottage s'impose.


Je décide - soyons folle - de les putter en même temps et de rêver que l'une rentrera direct dans le trou (0_0). Ce serait mon coup de billard du siècle. Hugh!  Vous allez voir ce que vous allez voir, non mais! C'est assez difficile de poser mon appareil de photo en équilibre sur le sac de golf, il a basculé quand je l'ai enclenché. 
(On ne voit pas très bien. Tsss! Ne pas laisser  la flèche sur la barre de lecture sinon on ne voit rien. Hum! C'est  plus "lisible" en cliquant sur Dailymotion).


Golf à deux balles par watnews
 
Yes!!! Enfin presque! Une des balles, la sienne (hum!) est arrivée à 10 cm du trou et l'autre, la mienne, je l'ai enquillée. Ah ah! Trop fort.
Du coup, à partir du 5, j'ai décidé que sur tous les trous je désignerai la meilleure balle comme la mienne. Les absents ont toujours tort;-)

Au 8, je tapais deux bons drives. Hé hé! Je m'arrêtais un instant, je ressentais un bien-être tel que je me disais : j'aimerais mourir maintenant et, comme je n'étais pas morte, je rajoutais : je voudrais mourir au golf. Sérieusement.  Mourir juste après cette minute de silence troublée - mais pas perturbée - par les gazouillis des oiseaux et les coassements des crapauds. Ce serait une belle mort.






Ce fut : deux belles heures...

mardi 12 avril 2016

"Surtout ne pas penser[...] Juste devenir idiot" (Robert Walser)

Mes deux coups de cœur de la journée.

Matin : Arnaud Rykner pour Dans la neige dans l'émission Entre les lignes.

"Dans ce roman, Arnaud Rykner s’est inspiré de la vie de l’écrivain suisse Robert Walser, avant de prendre des libertés. « Surtout, ne pas penser (…) Juste devenir idiot » écrivait ce dernier." 


Après-midi : L'adorable absent.

ABSENCE. Tout épisode de langage qui met en scène l'absence de l'objet aimé - quelles qu'en soient la cause et la durée - et tend à transformer cette absence en épreuve d'abandon.

"Quelquefois il m'arrive de bien supporter l'absence. Je suis alors "normal" : je m'aligne sur la façon dont "tout le monde" supporte le départ d'une "personne chère"; [...]
Cette absence bien supportée, elle n'est rien d'autre que l'oubli. Je suis, par intermittence, infidèle. C'est la condition de ma survie; car si je n'oubliais pas, je mourrais. L'amoureux qui n'oublie pas quelquefois, meurt par excès, fatigue et tension de mémoire (tel Werther).
[...]
De cet oubli, très vite, je me réveille. Hâtivement, je mets en place une mémoire, un désarroi. Un mot (classique) vient du corps, qui dit l'émotion d'absence : soupirer : "soupirer après la présence corporelle" [...]

(Quoi, le désir n'est-il pas toujours le même, que l'objet soit présent ou absent? L'objet n'est-il pas toujours absent? - Ce n'est pas la même langueur : il y a deux mots : Pothos, pour le désir de l'être absent, et Himéros, plus brûlant, pour le désir de l'être présent.)

Je tiens sans fin à l'absent le discours de son absence; situation en somme inouïe; l'autre est absent comme référent, présent comme allocutaire. [...]
[...]
[...] L'absence est la figure de la privation; tout à la fois, je désire et j'ai besoin. Le désir s'écrase sur le besoin : c'est là le fait obsédant du sentiment amoureux."

Roland Barthes, in Fragments d'un discours amoureux.

lundi 11 avril 2016

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Photos du jour





Et pendant ce temps-là... le coup de billard du siècle!!! au Masters 2016.

dimanche 10 avril 2016

[...] un coin de ciel bleu. Grande allégresse

Après une journée de mélancolie puissance dix et une morne soirée hier, mon réveil ne fut guère plus joyeux. Tout était gris autour de moi, le ciel, la terrasse et en moi, le noir total. Qu'allais-je faire de cette journée pour secouer la déprimée? D'abord prendre un petit déjeuner en ne pensant à rien ni à personne. Allumer la radio? Pas envie. Allumer ma tablette? Plus pratique finalement pour lire la presse que de déployer un journal encombrant sur mes toasts beurre-confiture. Que dit-on en Suisse?  Deux articles m'intéressent : Mémoire et oubli, les deux trames de l'existence et L'oubli est difficile pour le cerveau. "... l’oubli intentionnel ne constitue pas un processus passif. Le cerveau doit travailler activement pour effacer un souvenir à dessein." 
Petit déj terminé. Vite, ne pas traîner, ne pas cogiter, ne pas allumer l'ordinateur, vite dans la salle de bain. Dans la salle de bain j'ai dit! Ben non, je prends un bouquin et je lis :

Vendredi 17 avril 1931

Temps très humide, très froid : horrible atmosphère de bord de mer; tout  est détrempé, et les arbustes fouettés par le vent, comme toujours à Dieppe. Petit déjeuner à l'hôtel habituel [du Rhin et Newhave]. Nous nous mettons en route. Vent et pluie; il fait presque noir. La pluie entre. Au bac de Quilleboeuf, L. aperçoit un coin de ciel bleu. Grande allégresse. Déjeuner à l'auberge près du bac : bon marché, ordinaire; du poisson brûlé. Un vieux couple (des gens de la campagne) en train de déjeuner. Lui met un doigt d'eau-de-vie dans son café. Nous repartons. Suivons des routes de campagne. Pas une maison. Arrivons à Alençon, vieille ville blanche, élégante, avec un grand magnolia surchargé de fleurs. [...] Mauvais dîner, sauf le vin, une bouteille entière. Clients : quatre hommes d'affaires français, un homme d'affaires chinois; une jeune fille qui ressemblait à Fredegong Shove [une cousine de V. W.] et un très vieil homme. Conversation sur les trains pour Paris. Eau froide pour un bain, qui nous a coûté les yeux de la tête. Froid mordant; mais avons été suffoqués au petit matin par l'air brûlant du chauffage. En route pour Saumur. Roulons lentement. Temps d'avril, froid très vif; ne sommes pas assez couverts. Déjeuner à Sablé-sur-Sarthe, plutôt mauvais là encore. Vieille petite ville sur la rivière. Vu un vieux château à Durtal, transformé en asile de vieillards ou hôtel : pas vilain, avec poivrières à l'épreuve de la pluie.
Virginia Woolf, Journal intégral 1915-1941.

Étrangement, cette lecture m'a donné un coup de fouet. Le bonheur illusoire du voyage.  Éclaté de rire. La douche allait peaufiner le reste.
Plus tard, je me décidais après un déjeuner très léger, avalé rapidement, à aller au cinéma pour tenter de parfaire la remontée du moral et j'allais voir L'Avenir avec Isabelle Huppert, sans vraiment savoir quel en était le sujet. Au retour, je lisais quelques critiques sur Internet pour vérifier si elles correspondaient à mon désenchantement. Pas vraiment, elles sont plutôt bonnes. Je suis sortie du cinéma avec - à nouveau - le moral dans les chaussettes et je n'ai rien perçu de cette Liberté censée retrouvée par la femme que son mari délaisse pour une autre; seulement du désarroi, ok, mais tout était en effet trop "lisse". "Difficile liberté"! A voir, surtout pour Isabelle Huppert. Extraits  critiques :

""L'Avenir" n'a rien de cumulatif, de démonstratif, de pesant. Il avance subtilement, avec toute la fluidité de la vie, quand bien même celle-ci charrie un tel flot d'amertume." (Le Monde).

" Le film accorde autant d'importance aux mots qu'au silence. (...) L'humour (bienvenu et nouveau), (...) s'invite aussi. Et puis il y a Isabelle Huppert, émouvante, qui ne cesse de trotter, dans la panique. Et qui chemine aussi, ouverte à tous les possibles, dans un présent qui semble infini." (Télérama).

 "(…) on croit d’abord voir un joli film de plus, sans plus, et in fine on est subjugué par une beauté sans apprêt, une complexité jamais rambarde et une richesse de sens qui nous élève". (Les Inrockuptibles). 

Et, tout de même : 
"On aurait mauvais jeu de reprocher à "L’Avenir" les distinctions reçues, mais il aurait peut-être été salutaire que se fendille un peu plus sa surface si lisse." (Libération)... qui, à mon avis, en fait la critique la plus juste dans le bon et le moins bon, à lire ici.  

"Cette œuvre tournée « à l’os », confinée dans un petit milieu social et culturel, ponctuée de dialogues à la tonalité pas toujours très juste, a souvent de quoi agacer. Sa cérébralité la rend hélas très extérieure." (La Croix).

"C'est un film sans risques qui plaira pour cette raison à ceux qui y voient la touche si française d'un cinéma de l'entre-soi." (L'Express).
Retour at home sous un vent décoiffant. Tea-time. "Un coin de ciel bleu. Grande allégresse". "L'oubli" : mon prochain exercice cérébral. C'est pas gagné.

samedi 9 avril 2016

Vincent, le lumineux

"Ce que j'estime la chose la moins enviable au monde, c'est une certaine forme de popularité."
Vincent van Gogh


Vincent van Gogh, La Vigne rouge, 1888
Huile sur toile : 75 x 93 cm

C'est le seul tableau qu'il ait vendu publiquement de son vivant.

"Ce tableau représente les vendanges dans la campagne arlésienne, probablement au Trébon, au nord de la cité en direction de Montmajour. Cette œuvre est remarquable par ses couleurs, notamment par l'opposition des complémentaires jaune et violet,[travail inédit ?] et en ce sens annonce le fauvisme. Dans sa lettre du 2 octobre 1888, Vincent fait part de son projet à Eugène Boch :
« Eh bien je dois aller travailler dans la vigne près de Mont Major. Elle est toute pourpré jaune vert sous le ciel bleu, un beau motif de couleur. »".
 
(A suivre...) 

Je voudrais être jeune jeune... longtemps longtemps

Scène nocturne du 22 avril 1915

Gui chante pour Lou

Mon p’tit Lou adoré Je voudrais mourir un jour que tu m’aimes
Je voudrais être beau pour que tu m’aimes
Je voudrais être fort pour que tu m’aimes
Je voudrais être jeune jeune pour que tu m’aimes
Je voudrais que la guerre recommençât pour que tu m’aimes
Je voudrais te prendre pour que tu m’aimes
Je voudrais te fesser pour que tu m’aimes
Je voudrais te faire mal pour que tu m’aimes
Je voudrais que nous soyons seuls dans une chambre d’hôtel à Grasse pour que tu m’aimes
Je voudrais que nous soyons seuls dans mon petit bureau près de la terrasse couchés sur le lit de fumerie pour que tu m’aimes
Je voudrais que tu sois ma sœur pour t’aimer incestueusement
Je voudrais que tu eusses été ma cousine pour qu’on se soit aimés très jeunes
Je voudrais que tu sois mon cheval pour te chevaucher longtemps longtemps*
Je voudrais que tu sois mon cœur pour te sentir toujours en moi
Je voudrais que tu sois le paradis ou l’enfer selon le lieu où j’aille
Je voudrais que tu sois un petit garçon pour être ton précepteur
Je voudrais que tu sois la nuit pour nous aimer dans les ténèbres
Je voudrais que tu sois ma vie pour être par toi seule
Je voudrais que tu sois un obus boche pour me tuer d’un soudain amour


Guillaume Apollinaire 

* Je ne sais pourquoi je pense  à la scène finale du film de Liliana Cavani, Au-delà du Bien et du Mal, dont j'avais parlé ici et à cette sublime "chevauchée fantastique" de Lou Andreas-Salomé (Dominique Sanda, diaboliquement divine dans le rôle de Lou) avec Friedrich Nietzsche.


jeudi 7 avril 2016

Un certain regard...


La dent Parachée, Savoie



Marc Riboud, Les montagne Huang Shan, Chine

ELLE ET MOI.- Toutes enveloppées de brume sur lesquelles elles semblaient flotter comme des îles fantomatiques, les montagnes de Savoie avaient ce matin quelque chose des paysages aquarellés par les Chinois, et je me suis promis de les fixer à mon tour sur le papier à l'instant même où ma bonne amie me signalait ce qu'elle voyait elle-même à la fenêtre de l'étage d'en dessous. Or c'est cela même qui se passe souvent entre nous, qui voyons la même chose au même instant et qui nous le signalons alors : "Regarde..."

(A La Désirade, ce dimanche 15 octobre)
Page 161.


DU VRAI ET DU FAUX.- Je me me sens très seul à penser comme je pense, mais ce qui compte est de persévérer en toute sincérité et bonne foi, contre toute distraction et tentation de suivre  telle mode ou telle toquade passagère. Je sais ce qui est bon pour moi et ce qui est néfaste. Je sens, plus encore  que je ne sais, ce qui est vrai et ce qui est du toc, ce qui sonne juste et ce qui sonne faux.

Page 267.

ON THE BLOG.-  Il y a une année, jour pour jour, que j’ai entrepris la mise en ligne  quotidienne de mes Carnets de JLK, comptant aujourd’hui 744  textes et visités chaque jour par quelques centaines de lecteurs plus ou moins fidèles  (1308 visites en juin 2005, et 12505 en avril 2006) dont la plupart me sont inconnus alors que de vraies relations personnelles se sont établies avec quelques-uns.  Jamais, à vrai dire, je n’aurais imaginé que je prendrais tant de  goût à cette activité si contraire apparemment à la silencieuse et solitaire concentration que requiert l’écriture. Or restant à l’écart du clabaudage souvent insane, vide ou vulgaire qui s’étale sur la Toile, il m’est vite apparu que tenir un blog pouvait se faire aussi tranquillement, sérieusement, ou joyeusement selon les jours, en toute liberté ludique ou panique, que tenir des carnets comme  je m’y emploie depuis 1966, d’abord de façon sporadique puis avec une régularité et une densité croissantes.
A la différence de carnets ordinaires, le blog est une pratique qui a ses risques, essentiellement liés au fait qu’on écrit quasiment sous le regard du lecteur. L’écriture en public m’a toujours paru artificielle, voire grotesque, et je ne me sens pas du tout porté, à l’ordinaire, à soumettre au regard anonyme un texte en cours d’élaboration, dont je réserve l’éventuelle lecture à mes seuls proches. Si je me suis risqué à dévoiler, dans ces Carnets de JLK, une partie des notes préparatoires d’un roman en chantier, et l’extrait d’un ou deux chapitres, je me garderai bien d’en faire plus, crainte d’être déstabilisé d’une manière ou de l’autre. 
Mais on peut se promener nu sur une plage et rester pudique, et d’ailleurs ce qu’on appelle le narcissisme, l’exhibitionnisme ou le déballage privé ne sont pas forcément le fait de ceux qui ont choisi de «tout» dire. Ainsi certaines lecteurs de L’Ambassade du papillon, où je suis allé très loin dans l’aveu personnel, en me bornant juste à protéger mon entourage immédiat, l’ont-ils trouvé indécent alors que d’autres au contraire ont estimé ce livre pudique en dépit de sa franchise.
Si la tenue d’un blog peut sembler vaine (au double sens de l’inutilité et de la prétention vaniteuse) à un littérateur ou un lecteur qui-se-respecte, l’expérience personnelle de la chose m’a prouvé qu’elle pouvait prolonger, de manière stimulante et enrichissante, voire libératrice du point de vue du jaillissement des idées et des formes, une activité littéraire partagée entre l’écriture continue et la lecture, l’ensemble relevant du même atelier virtuel, avec cette ouverture « interactive » de plus.
Ayant toujours été rebuté par la posture de l’homme de lettres confiné dans sa tour d’ivoire, autant que par l’auteur en représentation, et sans être dupe de la « magie » de telle ou telle nouvelle technique, je n’en ai pas moins volontiers emprunté à celle du blog sa commodité et sa fluidité, sans éprouver plus de gêne qu’en passant de la « bonne vieille » Underwood à frappe tonitruante, à l’ordinateur feutré. Bref, le blog n’est pas du tout pour moi la négation de l’écrit : il en est l’extension dont il s’agit de se préserver des parasites. 
Michel Butor, dans l’évocation de sa maison A l’écart, parle de son atelier à écrire comme le ferait un artisan, et c’est ainsi aussi que je vois l’outil blog, entre le miroir et la fenêtre, le capteur nocturne (ah le poste à galène de mon grand frère !), et le laboratoire ouvert au tourbillon diffus et profus de l’Hypertexte.
Un blog est enfin une nouvelle forme de l’Agora, où certains trouvent un lieu d’expression personnel ou collectif à caractère éminemment démocratique (d’où la surveillance de plus en plus organisée des régimes autoritaires), une variante du Salon français à l’ancienne qui voit réapparaître le couple éternel des Verdurin, ou le dernier avatar du Café du commerce…
(Au Cap d'Agde, ce lundi 5 juin)
Pages 142-143.

Jean-Louis Kuffer, in Riches Heures (Blog-Notes 2005-2008), éditions l'Age d'Homme, 2009.